dimanche 28 avril 2024

LOVE LIES BLEEDING (Rose Glass, 2024)


1989. Jackie couche avec JJ qui al présente ensuite à son beau-père pour qu'elle décroche une place de serveuse dans le stand de tir qu'il dirige. Le soir venu, Jackie pousse la porte d'une salle de sport tenue par Lou. Une fois les clients partis, celle-ci lui propose des stéroïdes pour améliorer ses performances de culturiste avant un concours qu'elle disputera à Las Vegas. Après lui avoir injecté une dose, elle l'embrasse et l'emmène chez elle où elles couchent ensemble.


Le lendemain matin, au petit-déjeuner, Lou invite Jackie à s'installer chez elle en attendant son départ pour Vegas. Mais lorsque Lou apprend que Jackie travaille au stand de tir, c'est-à-dire chez son père avec lequel elle est en froid depuis plusieurs années, un malaise s'installe. Il ne dissipe pas le soir venu quand les deux femmes dînent avec JJ et sa femme Beth, la soeur aînée de Lou, qui subit des violences conjugales. Lou menace JJ qui lui révèle avoir couché avec Jackie.


Revenues chez Lou, elles se disputent puis se réconcilient au lit. Au matin, un coup de fil réveille Lou : Beth a été hospitalisée après avoir été de nouveau frappée par JJ. Elle va à son chevet où elle retrouve son père qui entend régler ce problème lui-même. En voyant le désarroi de Lou, Jackie s'absente en prenant le volant de sa voiture. Elle se rend chez JJ qu'elle surprend et tabasse à mort. Lorsque Lou rentre chez elle en taxi, elle remarque sa voiture devant la maison de sa soeur et trouve à l'intérieur Jackie en état de choc puis le cadavre de JJ.


Ensemble, elles déplacent le corps dans le coffre de la voiture de JJ puis quittent la ville. Daisy, l'ex de Lou, les aperçoit. Lou a une idée pour faire disparaître le cadavre tout en faisant en sorte qu'on ne lie pas le crime à elle ou à Jackie. Mais c'est sans compter avec des flics corrompus, deux agents du FBI qui enquêtent sur le père de Lou, la jalousie de Daisy et l'incapacité de Jackie à se contenir...


Love Lies Bleeding est le deuxième film de Rose Glass, après Saint Maud sorti en 2021. Ce long métrage avait attiré l'attention de Kristen Stewart qui avait fait savoir à la cinéaste son envie de travailler avec elle sur une histoire originale. Entre temps, l'actrice s'est mariée avec la scénariste et productrice Dylan Meyer, officialisant leur homosexualité (même si ce n'était plus un secret depuis longtemps).


Toutefois, cela motive Stewart à s'affirmer en s'engageant dans des oeuvres où sa sexualité n'est plus cachée. Un élément déterminant pour apprécier Love Lies Bleeding qui s'inscrit dans la veine du thriller lesbien, quelques mois après la sortie de Drive-Away Dolls d'Ethan Coen. Sauf qu'ici on n'évolue pas dans un registre comique et léger.


Le film co-écrit par Rose Glass et Weronika Tofilska est un curieux objet hybride qui mêle romance gay, polar, drame psy, et ose même sur la fin ajouter un zeste de fantastique quasi-super-héroïque. Pourtant, malgré tous ces ingrédients, ça fonctionne et le spectateur, qui adhèrera à ce drôle de mix, sera conquis par les surprises que lui réservent l'intrigue.

L'action se situant à la fin des années 80 nous replonge à l'époque où tous les mecs arboraient la coupe mulet, les filles des brushings, et les vêtements des couleurs souvent flashy. Il semble que cela ait été retenu surtout pour inscrire le récit à un moment où le culte du corps était très présent, notamment avec la starification au cinéma de comédiens comme Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger, ce dernier ayant été d'abord un champion de culturisme comme ambitionne de l'être le personnage de Jackie.

Bien que Rose Glass soit bisexuelle et ses deux actrices principales gays, le film se dispense intelligemment de tout militantisme. Tout juste est-il évoqué le fait que Jackie a quitté sa famille et sa région parce qu'elle était victime des préjugés de sa communauté (en plus de son tempérament volcanique). Quant à Lou, elle assume son homosexualité mais sort d'une relation bancale avec Daisy, dont on devine la toxicomanie (ce qui explique son caractère extrême et sa jalousie).

Le scénario se découpe en trois actes nets : d'abord la rencontre et la romance entre Lou et Jackie, puis l'agression de Beth et ses conséquences dramatiques, et enfin un dénouement en forme de règlement de comptes familial. Ces trois blocs narratifs sont denses car chaque personnage bénéficie d'une évolution riche et imprévisible : ce soin apporté à la caractérisation autant qu'à l'intrigue remplit bien les 100' du film et empêche le spectateur de s'ennuyer.

C'est donc une belle réussite, superbement filmé, et magnifiquement interprété. Dans les seconds rôles, on trouve Dave Franco (le frère de James) parfait en mari ignoble, Jenna Malone poignante en femme battue mais incapable de dénoncer son époux, et surtout Ed Harris, affublé d'une perruque assez incroyable mais qui réussit à vous foutre les pétoches malgré tout.

Surtout, Love Lies Bleeding repose sur un duo d'actrices phénoménal : Kristen Stewart est parfois horripilante mais quand elle s'empare d'un rôle avec l'énergie qu'elle affiche ici, elle est tout simplement magistrale, vibrante de colère rentrée. Face à elle, on découvre Katy O'Brian, qui en plus de s'être entraînée pour être sculptée comme une vraie culturiste, a une présence cinégénique prodigieuse - franchement, si Marvel l'avait embauchée elle pour jouer Jennifer Walters / She-Hulk (en supposant que le studio aurait aussi fait l'effort d'avoir un vrai scénario), ce serait déjà une star. L'alchimie entre Stewart et O'Brian est juste fascinante et leur duo va rejoindre au panthéon des héroïnes cultes Thelma et Louise.

Violente, surprenante, habitée, cette romance queer sortira en France le 12 Juin prochain. Ne la manquez pas !

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