jeudi 11 avril 2024

BATMAN / DYLAN DOG #2 (Roberto Recchioni / Gigi Cavenago et Werther Dell'Edera)


Batman découvre que Catwoman a été empoisonnée par un produit mélangeant la toxine du Joker et un composant créé par le Dr. Xarabas. Pour concocter un antidote, il a besoin de prélever un échantillon sur un cobaye de Xarabas. Dylan Dog le guide jusqu'au dernier repaire connu du savant fou.


Là, ils affrontent une bande de zombies parmi laquelle se trouve Groucho, l'ami de Dylan Dog. Après les avoir sauvés, lui et Catwoman, Batman et Dylan Dog apprennent par Groucho quel est le projet de Xarabas et du Joker : ramener à la vie Christopher Killex, un serial killer collecteur d'âmes. 


Pour le retrouver avant eux, un seul endroit : l'enfer. Et pour y accéder, il leur faut trouver quelqu'un capable de les y emmener et de les y protéger. Batman sait à qui s'adresser...


Ce deuxième volet du crossover entre Batman et Dylan Dog donne la part belle à ce dernier alors que le premier épisode, c'était son partenaire qui était davantage mis en avant. On peut interpréter cela de différentes manières (une contrainte éditoriale pour que les deux héros aient autant de temps de présence à l'image). Mais en l'occurrence, ici, cela s'inscrit dans une logique narrative.


Roberto Recchioni est un scénariste assez malin pour composer avec ces éléments et faire admettre au lecteur que ses choix sont justifiés. Par exemple, le Joker et Xarabas sont absents de ce numéro mais leurs présences et leur plan hantent tout le récit. L'alliance de ces deux sinistres vilains est assez terrifiante pour qu'on redoute les fruits de leur collaboration.


Le scénario emprunte donc le registre du parcours initiatique. Batman s'en remet à Dylan Dog et ses compétences de détective du surnaturel tout en partageant avec lui son carnet d'adresses. Le fan de Batman ne sera donc pas dépaysé par les guest-stars issus du catalogue de DC qui apparaissent dans ce numéro.


Catwoman convalescente après avoir été empoisonnée, Recchioni a eu la permission d'utiliser deux autres héros liés au monde de la magie : John Constantine d'abord est sollicité pour ouvrir à Dylan Dog un passage vers l'enfer, puis Jason Blood / Etrigan le démon pour leur servir de guide. L'auteur italien maîtrise parfaitement les caractéristiques de ces deux anti-héros.

Constantine est donc dépeint comme un parfait dépravé, cynique, la clope au bec, mais Recchioni se permet de jeter un regard ironique sur l'enquêteur britannique lorsqu'il se plaint du spectacle offert par Piccadilly Circus avec sa foule de bourgeois-bohèmes tandis que lui a connu ce quartier au temps des punks. Dylan Dog lui rétorque qu'il y a pire qu'un jeune désenchanté chantant "no future" : c'est un vieux désenchanté. Savoureux. Et tout à fait juste.

L'entrée en scène d'Etrigan est spectaculaire et Recchioni lâche la bride au démon qu'il montre dans toute son inquiétante furie, soulignant que sa sauvagerie en fait un compagnon peu fiable. Par contre, il rédige les dialogues de l'alter ego de Jason Blood en respectant sa manie de faire des rimes - et là, on voit Constantine se plaindre à nouveau, mais plus légitimement quand Dylan Dog se met à finir les phrases du démon.

Cet humour, subtil, donne à l'épisode un relief faussement léger : l'évocation du tueur en série Christopher Killex, que le Joker et Xarabas veulent ressusciter n'augure rien de bon. Déjà que Batman et Dylan Dog sont en retard, alors si en plus un troisième larron aussi redoutable s'ajoute à l'affaire, ça risque de faire du grabuge. D'où ma conviction que cette mini-série va voir apparaître d'autres invités.

La pagination est encore une fois élevée (66 pages) mais on ne voit pas le temps passer et surtout c'est un rapport quantité/prix imbattable pour un fascicule vendu 4,99 $ !

En outre, c'est toujours aussi formidablement dessiné par la paire Gigi Cavenago-Werther Dell'Edera  - même si je ne repère toujours pas où ce dernier est intervenu. Le style de Cavenago est tellement puissant et m'est tellement plus familier que, sans vouloir minorer la contribution de Dell'Edera, je ne la reconnais pas.

Donc, je m'en tiendrai à ce que j'ai apprécié et qui me semble quand même majoritairement dû à Cavenago. L'artiste transalpin a cette manière de découper ses planches avec des cases de dimensions souvent généreuses, qui lui permettent donc de soigner les décors et de composer des plans en en disposant les éléments avec harmonie. A chaque fois, l'espace des actions est magnifiquement exploité et les couleurs de Giovanna Niro font le reste avec une palette privilégiant les tonalités vives.

Mais Cavenago peut aussi surdécouper une scène et rendre ainsi l'action plus hachée, plus dynamique, comme quand Batman affronte férocement la bande de zombies dans l'ancien repaire de Xarabas. Toutefois, l'épisode, par son contenu, favorise la représentation des lieux dans ce qu'ils ont de plus foisonnant, qu'il s'agisse de l'appartement crasseux de Constantine à l'intérieur majestueux de la demeure de Jason Blood, ou encore des paysages infernaux. Tout ce passage, qui occupe pratiquement un tiers de l'épisode est sensationnel et témoigne de l'immense talent graphique du maestro.

C'est, vous l'aurez compris, un pur régal et, à coup sûr, quand tout ça sera disponible en album, ça fera un sacré beau recueil, bien garni, scénaristiquement et visuellement somptueux.  

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