samedi 13 avril 2024

BASKETFUL OF HEADS (Joe Hill / Leomacs)


June Branch passe l'été avec son amant, Liam Ellsworth, à Brody Island où il sert comme adjoint du shérif Wade Clausen. Celui-ci l'informe de l'évasion de plusieurs détenus de la prison voisine et deux d'entre eux courent encore. Liam est envoyé chez la femme et le fils de Clausen, Roberta et Bobby, pour s'assurer de leur sécurité. June le suit et découvrent l'étonnante collection d'armes antiques de la famille, dont une hache de viking.


Dans la soirée, alors que le temps vire à l'orage, Clausen rappelle sa femme pour qu'elle aille réconforter une voisine dont le mari a été tué par les fugitifs et son fils pour qu'il aille au poste de police répondre aux appels radio. Seuls dans le maison de Clausen, Liam et June entendent quelqu'un entrer par effraction. June va se cacher mais Liam ne revient pas. 


Surmontant sa peur, elle va voir ce qui se passe et tombe nez à nez avec un des fugitifs dont elle se protège avec la hache viking. Quand le malfrat refuse de la laisser tranquille, elle le décapite. Mais une surprise macabre l'attend... la nuit va être longue pour June Branch.


J'ai procrastiné avec la critique de cet album, désormais disponible à bas prix dans la collection Urban Nomad, des albums petit format entre 5,99 et 9,99 Euros, parfaits pour découvrir des comics qu'on hésitait à lire auparavant ou pour se refaire une collection (comme ça a été mon cas avec Y le dernier homme de Brian K. Vaughan et Pia Guerra, disponible en 5 tomes).


Et c'est justement en me procurant le cinquième et dernier tome de Y le dernier homme que j'ai également acheté Basketful of Heads dont j'avais beaucoup entendu parler (souvent en bien) et qui présente l'avantage d'être un récit complet (même si une fausse suite, avec d'autres auteurs, a depuis vu le jour sous le titre Refrigerator full of Heads).


On doit cette histoire à Joe Hill, qui n'est autre que le fils de Stephen King, que je vous ferai pas l'affront de vous présenter. En 2019, il inaugurait avec cette histoire son label chez DC Comics, Hill House, depuis abandonné. Il a ensuite signé Plunge, une autre mini série, dessinée par rien moins que Stuart Immonen (la dernière réalisée par le maestro canadien à ce jour), hélas ! complètement ratée. Avant cela, il a écrit la série Locke & Key, dessiné par Gabriel Rodriguez, un gros succès, (très mal) adaptée par Netflix.
  

Basketful of Heads compte donc sept épisodes pour un récit dont l'action se déroule en une nuit dans la région du Maine (où est né et vit Joe Hill ainsi que son père). On y suit les heures éprouvantes traversées par June Branch, une jolie fille venue tenir compagnie à son copain, adjoint du shérif de Brody Island, alors qu'un orage très violent éclate et que des prisonniers sont en cavale dans le coin. Pour se défendre, elle dispose d'une hache viking aux propriétés étonnantes...


En effet, quand elle tranche la tête de quelqu'un avec cette arme, la victime continue de vivre, sa tête de parler. Et June ne trouve rien de mieux que de déposer les caboches de ceux qu'elle décapite dans un panier (basket). Surtout, elle va découvrir une sombre affaire à laquelle sont mêlés le shérif, son fils, sa femme, le maire et Liam, son chéri.

Bref, personne n'a, c'est le cas de le dire, toute sa tête dans ce sac de noeuds. Joe Hill traite ça sans grand sérieux, conscient que l'argument sur lequel repose son intrigue (le pouvoir de la hache) est tellement saugrenu qu'il est inutile d'essayer de convaincre le lecteur que ça peut être autre chose qu'une farce sinistre.

A y examiner de plus près, c'est un slasher à l'envers : au lieu de subir l'action et d'avoir peur d'être attrapé par des criminels, June les élimine (ou presque...) les uns après les autres avec la même sauvagerie que le ferait un psychopathe muni d'une hache classique. Mais peut-on garder la raison en commettant de tels actes ? Et surtout peut-elle gagner contre tant d'adversité ? Le suspense s'avère efficace même si donc il est souvent désamorcé par l'humour noir de l'auteur.

C'est qu'elle n'a pas tellement le choix, June. Et en apprenant les antécédents de ce qui se produit, elle est comme investie d'une mission qui la galvanise. Elle fait preuve d'intrépidité, de témérité, pas toujours d'une grande jugeotte, mais justement ça nous la rend sympathique. Et le dénouement est savoureux quand on découvre qui est la taupe qui a motivé le shérif et ses partenaires à se compromettre...

Avant Immonen, Hill a déjà pu s'appuyer sur un artiste de première classe avec Leomacs. De son vrai nom Massimiliano Leonardo, ce dessinateur italien a d'abord travaillé dans son pays natal pour l'inévitable éditeur Sergio Bonelli et les séries Dylan Dog et Tex. Puis il franchit les Alpes et collabore avec Pierre Makyo et Frédéric Richaud sur le roman graphique La Montagne Invisible. Il a aussi été storyboarder pour des films d'animation.

Fort de ce bagage technique complet, il tente sa chance aux Etats-Unis avec cette série qui va lui permettre d'être remarqué par Joshua Williamson pour qui il dessinera la mini Rogues sur le DC Black Label. Son style appartient au registre réaliste et il assume crayonnés et encrage, son trait est très expressif, avec cette pointe de légère exagération qui convient si bien à un récit de genre comme celui-ci. Il pousse le détail très loin avec des décors plus ouvragés que la moyenne des comics et son découpage a l'efficacité de tous ceux qui ont été formé aux fumetti.

Parfois déroutant, souvent emballant, Basketful of Heads mérite sa bonne réputation. Depuis Joe Hill a repris son métier de romancier et Leomacs oeuvre actuellement sur la série Ghostlore écrite par Cullen Bunn (publiée par Boom ! Studios).

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