Le piège du Minotaure, Amora l'Enchanteresse et Skurge l'Exécuteur se referme complètement sur Thor, incapable de penser clairement en présence du Roxxon Thor. Cette fois, le dieu du tonnerre est dans les cordes et la chute est d'autant plus terrible qu'elle est médiatisée...
Bon, d'abord les mauvaises nouvelles : pour le troisième mois consécutif, cet épisode n'est pas dessiné par Martin Coccolo. J'étais plus que satisfait quand Ibraim Roberson le remplaçait mais chez Marvel, toutes les bonnes choses ont une fin et quelqu'un dans le staff éditorial a dû se dire que ça suffisait et ils l'on collé sur un autre titre à venir (un mash-up entre une resucée de l'event cosmique Annihilation et l'univers 2099).
Malgré tout, on pouvait encore espérer que la série bénéficierait d'un fill-in artist de bonne qualité. Alors va pour Carlos Magno. Je ne suis pas un grand fan mais sait-on jamais, le gars peut s'être dépassé et nous sortir un épisode du feu de dieu. Ce n'est hélas ! pas le cas. Les planches sont correctes, sans plus, avec quelques plans qui dépotent bien, mais aussi des personnages qui font vraiment de drôles de gueule parfois, des postures un peu maladroites, un découpage sommaire.
Ce n'est pas fini ! Coccolo revient bien le mois prochain... Mais ensuite il est à nouveau remplacé par Valentina Pinti, qui est vraiment une dessinatrice très moyenne (vue récemment sur la série Blade), et ensuite encore par Jan Bazaldua (grande spécialiste des planches sans décor et des personnages fades, qui a récemment bossé sur la nouvelle série Captain Marvel).
La question est donc : Coccolo fait-il encore partie de l'équipe artistique ? Ou doit-on se préparer à ne plus le revoir dessiner régulièrement The Immortal Thor ? Je suis très perplexe car ce dessinateur de talent a enchaîné sept épisodes de haut niveau. Je peux comprendre qu'il ait eu besoin de souffler (par les temps qui courent, 7 épisodes d'affilée, c'est déjà une belle performance). Et puis deux-trois mois de break, ça lui permet de s'avancer sur des épisodes sans doute déjà écrits par Al Ewing. Sauf que, visiblement, non...
C'est vraiment dommage et frustrant parce que ça donne l'impression : 1/ que la série n'a pas d'editor compétent, capable de prévoir le remplacement ponctuel ou durable de l'artiste régulier (ce qui est aussi une spécialité Marvel), 2/ que, après avoir goûté au caviar, on a droit à des lentilles, 3/ que finalement Marvel attrape les lecteurs avec un duo créatif (Ewing-Coccolo) classieux puis ensuite fourgue le bébé à des dessinateurs de deuxième, voire troisième catégorie. Je serai Al Ewing, je l'aurai un peu mauvaise. Je ne suis "qu'un" lecteur et ça me reste en travers de la gorge.
C'est d'autant plus déplorable que ce dixième épisode est vraiment bon : son scénario est rondement mené, Ewing a coincé Thor, le piège qu'il lui a tendu est parfait, habile, pervers. On n'a pas le droit de donner un aussi bon script à un piètre dessinateur, encore moins les prochains à des artistes qui ne feront que le mettre platement en images. Je peux me tromper là encore, mais étant donné ce que j'ai vu de Pinti et Bazaldua, je ne crois pas aux miracles.
En fait, ça m'énerve et j'en reviens toujours à C.B. Cebulski, l'editor-in-chief de Marvel Comics. Quand il a été promu, malgré un gros caillou dans sa chaussure (quand il se fit passer pour un mangaka, Akira Yoshida, pour une mini-série sur Kitty Pryde, afin de séduire des lecteurs japonais), ce bonhomme avait la réputation d'être un dénicheur de talents exceptionnel. Sans doute comme beaucoup d'autres, je me suis dit qu'avec lui l'artistique allait redevenir une priorité pour Marvel.
Son bilan depuis 2017, ne dit rien de tel. Il n'a pas mis l'artistique en avant, se contentant de maintenir en poste des editors plus préoccupés par le fait de noyer le marché avec des séries, des spin-off, des events, des tie-in innombrables, perdant puis récupérant des auteurs (en perdant plus qu'il n'en a regagné !), échouant à établir des agendas tenables et sérieux pour les dessinateurs (dont certains ont aussi fait leurs bagages). Franchement, on a dit beaucoup de mal de son prédécesseur Alex Alonso, mais Cebulski n'a pas fait mieux, loin de là.
Il manque une vision chez Marvel, une vue d'ensemble, une vision d'avenir. On ne voit pas où ils vont ni où ils veulent aller. Il y a parfois des trucs qui surnagent, mais ça semble tenir du miracle et ça ne dure généralement pas longtemps. Quelqu'un comme Ewing se donne du mal, mais il n'est pas payé en retour (combien d'artistes a-t-il vu défiler après avoir entamé un run avec eux ?). Hickman a obtenu de travailler dans son coin, sur des titres qu'il modèle à sa guise (après que Jordan White l'ait découragé de développer son plan jusqu'à son terme sur X-Men). C'est bien peu. Et les artistes sont atrocement traités, souvent obligés de travailler sans marge de manoeuvre ou condamnés à bosser éternellement sur des personnages qu'ils ont longtemps animé (Romita Jr et Bagley sur la franchise Spider-Man).
Je suis quelque peu découragé. Je n'ai pas envie d'arrêter de lire The Immortal Thor parce que je trouve que Ewing accomplit quelque chose de remarquable. Mais je n'ai pas envie non plus de lire une série mal dessinée. La bande dessinée, si quelqu'un est en mesure de le comprendre chez Marvel, ne fonctionne qu'avec un bon auteur et un bon artiste : tout miser sur le scénariste et filer les scripts à des fill-in mal dégrossis n'est pas un service à rendre à une série ni un moyen de fidéliser le lecteur - en tout cas pas pour moi.
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