vendredi 3 mai 2024

BLOOD HUNT #1 (Jed MacKay / Pepe Larraz)


Une armée de vampires attaquent après qu'une nuit soudaine se soit abattue sur le monde. Les super-héros sont débordés par cette crise. Depuis la Cité Impossible, leur nouveau Q.G., les Avengers sont eux aussi pris à parti par le Couvent du Sang. Et Blade rend visite au Dr. Strange et Clea pour leur fournir de précieux renseignements...
 

J'ai craqué. Je n'en suis pas fier, mais c'est comme ça : j'embarque dans le nouvel event Marvel, écrit par Jed MacKay et dessiné par Pepe Larraz. J'avoue que Larraz m'a motivé, sans lui, c'est clair que j'aurai zappé tout ça. Et puis le format aussi : cinq épisodes, ce qui est étonnamment succinct (même si ce premier épisode est plus gros que la moyenne).
 

Bon, ça, c'est sûr, on va pas lire Blood Hunt pour son synopsis : des vampires, un couvent du sang, une énième menace mondiale, un cliifhanger qu'on voit arriver à des km mais qui, évidemment, a tout d'un leurre (si c'est pas le cas, ça va quand même être dur à justifier...).


Mais si on veut investir dans quelque chose qui ne va pas vous faire des noeuds aux neurones et qui est superbement dessiné, ça devrait le faire. En tout cas, ça le fait bien sur ce premier volet. On a droit à des moments spectaculaires et convenus au possible, un casting qui brasse large mais qui utilise des personnages animés par Jed MacKay dans les séries qu'il écrit (Moon Knight, Doctor Strange, Avengers, et bientôt X-Men). Zéro surprise donc.


Il y a un côté prévisible et confortable dans tout ça : Marvel ne se cache même plus, c'est juste un event de plus, qui sera oublié dès qu'il sera fini, sans certainement beaucoup de conséquences. On n'est pas là pour réinventer la roue mais pour vendre un max de copies : d'ailleurs l'éditeur a eu une idée magnifique, chaque épisode sortira en deux versions - une classique (comme celle que je me suis procuré) et quelques jours après une autre non censurée sur les scènes les plus gore (sous titrée "Red Brand") -  avec l'espoir que les pigeons achèteront les deux.


A ce stade-là, ce qui surprend le plus en fait, c'est l'absence totale de conviction dans le projet : Marvel sort des events à une rythme si soutenu qu'il est impossible de croire que ça va changer quoi que ce soit. Le point positif, c'est qu'on n'a plus le slogan "après ça, plus rien ne sera jamais comme avant". Mais le contrepoint, c'est qu'on se demande à qui tout ça s'adresse.

Evidemment, les events sont des sagas fédératrices, un moyen pratique pour convoquer un max de personnages et donc attirer un max de lecteurs qui y trouveront le héros ou l'équipe de héros qu'ils préfèrent. Et si ce n'est pas dans la saga principale, ce sera dans la tonne de tie-in qui l'accompagne.

On peut aussi s'interroger sur la temporalité des events : à quand tout ça est-il censé se passer ? Prenons Thor, qui prend très cher ici, mais qui est également en ce moment dans un very bad trip dans sa propre série. Blood Hunt ne se déroule donc pas en même temps que The Immortal Thor, mais ça ne nous dit pas quand. Le plus pratique, c'est de se dire que les events, en fait, se passent dans une dimension parallèle, sans même que les héros s'en rendent compte. Mais alors pourquoi Marvel ne créerait-il pas un univers parallèle saisonnier rien que pour ses events, genre Ultimate Events

La différence entre Marvel et DC à ce niveau-là est de plus en plus nette : depuis plusieurs events (Knights Terror, Beast World), DC a fait d'un personnage, Amanda Waller, la chef de la Suicide Squad, l'ennemi, la méchante. Son obsession : en finir avec les super-héros, et même au-delà avec les méta-humains, qu'elle juge depuis toujours plus dangereux qu'efficaces, qu'elle considère comme des aimants à problèmes. Plus de super-héros, plus de méta-humains = plus de problèmes ! Simple. Basique. Et donc, Waller est l'instigatrice des events, elle créé au besoin des méchants pour pousser les super-héros à la faute, les torturer mentalement et physiquement. Et le prochain event DC, Absolute Power, sera la culmination de ses manigances. On arrive au bout d'un long processus, sur plusieurs années, plusieurs events. C'est un boulot éditorial remarquable, même si les events qui se sont succédés ont été très inégaux (et même franchement moyens).

Chez Marvel, il n'y a pas ça, pas de constante. Les menaces se succèdent, sans lien (en tout cas sans lien apparent). Et le phénomène est devenu flagrant depuis que les "architectes", c'est-à-dire les scénaristes vedettes de Marvel, sont partis et que l'éditeur ne les a pas remplacés, préférant s'appuyer sur des editors menant chacun leur département de leur côté. Quand Bendis était la star des scénaristes Marvel, il développait des intrigues dans des séries comme New Avengers et elles aboutissaient à des events comme Secret Invasion ou Siege. Quand ce n'était pas Bendis, c'était Millar qui déclenchait une Civil War, avec des retombées lourdes sur plusieurs séries. Jason Aaron a aussi préparé sa War of the Realms à partir de son long run sur Thor. Hickman idem avec ses Avengers et New Avengers pour Infinity et Secret Wars.

Mais aujourd'hui, tout ça a disparu. Jed MacKay, par exemple, pour Blood Hunt, a, paraît-il (je ne sais pas si c'est vrai, je ne lis pas ses séries), préparé le terrain dans Moon Knight surtout. Mais, objectivement, préparer un event à partir de Moon Knight, ça ne peut pas préparer autant de lecteurs que s'il l'avait fait dans Avengers, et je suis sûr que beaucoup de lecteurs de Blood Hunt #1 vont se demander qui est ce mec avec Tigra au début qui fait penser à Moon Knight mais qui n'a pas du tout le costume habituel de MK. Quant à Blade, sa dernière série en date vient de s'achever au bout de dix n°° (chez Marvel, on jure que c'était le plan initial, mais ça ressemble quand même fort à un bide commercial pour une série qui avait été relancée en espérant profiter du film Blade mais qui n'a toujours pas été tourné à cause réécritures), donc, bon, là non plus, on ne peut pas dire que c'est le véhicule de la hype.

De toute façon, ce qui manque immédiatement à un event comme Blood Hunt, c'est une rampe de lancement, des épisodes qui auraient amené cette histoire, et plus globalement quelque chose qui suggérerait ou dirait franchement que tout ce qui a occupé les héros collectivement depuis un moment aurait une source commune, comme Amanda Waller chez DC. Du coup, on lit ça et on se dit : c'est beau, Pepe Larraz est un putain d'artiste (mais qui semble désormais cantonné à dessiner des mini-séries événementielles - Blood Hunt paraît juste après Big Game qu'il a illustré pour Mark Millar chez Image et qui était déjà l'event du "Millarworld"). Mais on ne se dit jamais : Jed MacKay va nous sortir un putain d'event de la mort, vachement bien amené, et qui va tout chambouler.

Sachant cela, et je pense fournir des arguments raisonnables, objectifs, vous savez si oui ou non ça vaut la peine de lire Blood Hunt. Si ça ne vous fait absolument rien de lire cinq épisodes de super-héros contre des super-vampires sans aucune répercussion, allez-y. Si vous attendez plus, évitez. 

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