dimanche 26 mai 2024

TYLER RAKE (Sam Hargrave, 2020)


Fils du baron de la drogue indien Ovi Mahajan, en prison, Ovi Junior fait le mur pour rejoindre ses amis à une fête. Trop timide pour aller parler à la fille qui lui plait, il sort avec un copain fumer lorsqu'ils sont abordés par deux policiers. Ovi Jr. est enlevé. Informé, son père refuse de payer la rançon qu'on lui réclame car il connaît le commanditaire du rapt : Amir Asif, son rival basé à Dacca au Bangladesh.


Il ordonne donc à son homme de main, Saju Rav, de lui ramener son fils sinon il fera exécuter sa femme et son propre enfant. Pour faire le sale boulot, Saju fait appel aux services de Niki Khan qui, elle-même, contacte Tyler Rake, un ancien soldat australien devenu comme elle mercenaire. Ils partent avec une équipe réduite à Dacca au Bangaldesh. Tyler rencontre les ravisseurs, des hommes de main sans envergure, et les élimine puis prend la fuite avec Ovi Jr. avec lequel il gagne le point d'extraction, un bateau stationné sur la rivière la plus proche.
 

Mais Saju élimine les hommes sur le bateau et le sniper de l'équipe de Niki qui les couvre en attendant Tyler et Ovi Jr. pour récupérer ce dernier. Cependant, Niki comprend qu'on les a doublés car l'argent qui devait leur être versé pour cette mission n'est pas transféré - et pour cause : les comptes de Mahajan ont été gelés par les autorités indiennes. Elle en informe Tyler qui, échappant à Saju, file avec Ovi Jr..
 

Mais les ennuis ne font que commencer pour le mercenaire et son "colis" car, prévenu de la situation, Amir Asif a fait boucler toute la ville de Dacca par les forces de police aux ordres du colonel Rashid qu'il soudoie...


Récemment, à l'occasion de la sortie de The Fall Guy, un article dans le magazine "Première" revenait sur les films dont la réalisation était confiée à d'anciens cascadeurs comme David Leitch, et ce depuis le duo Hal Needham - Burt Reynolds (le premier ayant été d'abord la doublure du second avant de le diriger) dans les années 70.


Sam Hargrave est un des anciens élèves de Leitch et il a aussi ces dernières années beaucoup collaboré sur les films Marvel studios comme coordinateur des cascades. C'est ainsi qu'il a attiré l'attention d'Anthony et Joe Russo, les réalisateurs de Captain America : Le Soldat de l'Hiver ou le diptyque Avengers : Infinity War / Endgame. C'est Joe Russo qui a écrit le scénario de Extraction (le titre original de Tyler Rake) et l'a confié à Hargrave pour le mettre en images.


Les présentations étant faites, il me faut maintenant préciser que j'avais vu ce premier volet des aventures de Tyler Rake dès leur mise en ligne sur Netflix en 2020, mais je l'ai revu pour rédiger cette critique et j'ai enchaîné avec la suite (dont je vous parlerai plus tard).

Depuis le premier John Wick, sorti il y a tout juste dix ans, le film d'action s'est trouvé un nouveau maître étalon, un peu comme la saga Jason Bourne a lourdement influencé la saga James Bond incarné par Daniel Craig. Désormais, le public veut visiblement ressentir sur le grand écran les épreuves des héros de ce genre d'histoires et ne plus avoir affaire à des surhommes impeccablement coiffés même après une grosse baston. Cela s'accompagne d'une écriture plus viscérale et d'une caractérisation parfois plus sommaire où la motivation du héros est expliquée par une contrariété somme toute assez accessoire (John Wick part en guerre parce qu'on a tué son chien).

Tyler Rake sort du même moule : derrière la machine à tuer super coriace il y a un coeur qui bat. Notre mercenaire a perdu son fils de six ans atteint d'un lymphome mais était absent lorsqu'il est mort, parti en mission en Afghanistan, moins par sens du devoir que parce qu'il ne supportait pas la souffrance de son enfant. Son couple n'y a pas résisté et au début du film il vit dans une région isolée de l'Australie où il boit beaucoup de bière tout en s'abrutissant avec des calmants. En fait il se suicide à petit feu et ne repart au charbon qu'en souhaitant sans le dire en finir.

Mais le scénario  est roublard : cette fois on fait appel à ses talents pour exfiltrer un gamin qui est certes le fils d'une ordure mais qui n'a rien demandé, et donc s'il le sauve, c'est un peu comme s'il sauvait son propre fils. Le voici lâché en plein Dacca au Bangladesh, pris entre mille feux : un homme de main qui veut récolter les lauriers après que Rake et son équipe aient fait le plus dur, un baron de la drogue à l'origine du kidnapping du gamin qui veut humilier son rival, des flics corrompus et surarmés, des petites frappes hargneuses...

Sam Hargrave fait preuve d'une solide maîtrise de son affaire : le récit file à toute allure, sans temps mort, et les scènes spectaculaires, souvent brutales, s'enchaînent avec quelques morceaux de bravoure exceptionnels comme ce plan-séquence de 11' depuis la fuite en voiture de Rake et Ovi Jr. jusqu'à leur ascension dans un immeuble bientôt envahi par les forces spéciales puis un combat féroce entre Rake et Saju puis enfin la fuite à nouveau dans un van qui finira sans course sans ses passagers qui en ont sauté avant la collision avec un autre véhicule. C'est littéralement à couper le souffle et l'opérateur steadycam accomplit une prouesse tout comme le coordinateur des cascades pour ces enchaînements sidérants.

Alors évidemment ça ne vole pas très haut et le passage où Rake raconte son drame au gamin est mélo au possible. Cette brute écrase une larme pour nous montrer qu'il est encore sensible. Le gamin lui-même est une vraie tête à claques au début puis ensuite devient le meilleur allié de Rake. Saju est sans doute le plus ambivalent. Quant au grand méchant Asif, c'est l'archétype de la crapule sans coeur qui fait jeter des enfants dans le vide pour savoir qui l'a volé, arrose des flics pour se salir les mains à sa place, et monte le bourrichon à des petites frappes rêvant devant ses bijoux dorés. Donc, oui, c'est manichéen, binaire, mais c'est aussi bougrement divertissant et le cadre est exotique et magnifiquement exploité.

Hargrave peut surtout s'appuyer sur Chris Hemsworth, une autre vieille connaissance puisque l'acteur a été entraîné par son réalisateur sur les Avengers des frères Russo. Hemsworth avec sa voix de baryton et sa présence physique impressionnante, qui assure la majorité de ses cascades, authentiquement folles, mais qui montre quand même un vrai talent d'acteur et fait de Tyler Rake autre chose qu'un personnage qui aurait pu être joué par Chuck Norris. Dans in second rôle, on trouve aussi Golshifteh Farahani, cette sublime comédienne iranienne honnie par les mollahs et qui s'avère étonnamment à l'aise et crédible dans son rôle à la fois classe et badass. David Harbour campe lui un gredin de la pire espèce, trahissant son ami pour une prime.

Le final est tout de même assez audacieux car les auteurs, n'étant pas assurés que Netflix commande une suite, suggèrent le pire pour le héros. Mais je ne spoile personne en disant que Tyler Rake survit puisque suite il y a eu (et même qu'un troisième volet est prévu) et qu'elle est encore plus folle, plus aboutie, plus "plus". Mais donc, je vous en parlerai très vite.

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