mercredi 3 septembre 2025

WOLFS (Jon Watts, 2024)


Margaret, procureur de Manhattan, appelle un numéro qui lui a été donné par un ami pour s'assurer les services d'un fixer professionnel et anonyme. Il arrive quelques minutes après dans sa luxueuse chambre d'hôtel et découvre au pied du lit le corps sans vie d'un garçon que, explique-t-elle, elle avait invité à monter plus tôt et qu'il a perdu l'équilibre en sautant sur le lit et est tombé sur le chariot à boissons en verre. C'est alors qu'on frappe à la porte : Margaret va ouvrir et un deuxième fixer entre, envoyé par la directrice de l'hôtel, Pam, qui a tout vu grâce aux caméras placées dans la chambre.
  

Pour protéger la réputation de Margaret mais aussi celle de l'hôtel, Pam convainc les deux fixers de collaborer. Ils acceptent, à contrecoeur, et fournissent un alibi à Margaret et la renvoient chez elle pendant qu'ils s'occupent du cadavre. Alors que le premier emballe le corps, le second découvre un sac à dos dans lequel il y a quatre pains de drogue. Pam l'appelle et exige qu'il livre cette drogue à son destinataire. Les deux hommes transportent le cadavre dans le coffre de la voiture du 1er fixer lorsqu'ils s'aperçoivent que le garçon se réveille. Ils l'assomment.


Alors qu'ils se rendent chez June, un médecin clandestin, ils s'interrogent sur la provenance de la drogue et en déduisent qu'il s'agit de la cargaison volée à Lagrance, un albanais. Mais à qui était-elle destinée ? June s'occupe du garçon qui en profite pour fuir. Les deux fixeurs le rattrapent et l'interrogent dans un hôtel miteux. Il leur explique alors avoir accepté de livrer la drogue pour aider un ami, Diego. Pour savoir où il doit la livrer, il doit récupérer un pager dans un club. Problème : l'endroit appartient à Dimitri, un malfrat croate dont les deux fixers se sont fait un ennemi...


Fort du succès de ses trois Spider-Man (Homecoming/ Far from Home/ No Way Home) réalisés pour Marvel Studios, Jon Watts, désireux de ne pas être réduit à ça, signe un deal avec Apple pour développer une nouvelle franchise, Wolfs. Mais le studio, ambitieux autant que prudent, préfère finalement exploiter le premier volet directement sur sa plateforme de streaming plutôt qu'en salles.


Ce choix enterre définitivement le projet de deux nouveaux volets pour le cinéaste et ses vedettes, engagés à grand frais. Depuis Apple a, semble-t-il, révisé sa stratégie comme en atteste la sortie en salles de F1 - le film, avec le succès commercial qu'on connaît. Mais c'est dommage car Wolfs avait tout pour connaître aussi une belle carrière et j'aurai aimé suivre les aventures de ses héros.


Qualifié par certains critiques de spectacle paresseux, véhicule pour ses stars, Wolfs ne mérite pas ces jugements tranchés et sévères. Je ne prétends pas que c'est un grand film, c'est juste un excellent buddy movie comme on n'en voit plus guère, et qui flatte en effet ses vedettes en misant énormément sur leur complicité naturelle.


L'intrigue écrite par Watts met en scène deux nettoyeurs forcés de travailler ensemble après avoir été appelés respectivement au secours par une magistrate désespérée et la patronne d'un hôtel de luxe dans lequel la première est descendue. "La nuit va être longue" s'accordent-ils à dire alors qu'ils répugnent à collaborer, estimant chacun être le meilleur dans sa partie.

L'action a la bonne idée en effet de se dérouler en une seule nuit, qui va effectivement être longue pour les deux hommes. Alors qu'ils pensaient débarrasser un cadavre d'une suite luxueuse, ils découvrent vite que le macchabée n'en est pas un et leur filent entre les doigts. Quand ils le rattrapent, ils tombent sur une affaire qui se complique puisqu'il est mêlé à une livraison de drogue.

Reste que la mission est la même : à la fin, il faudra éliminer de gamin pour éviter qu'il parle de Margaret et de l'hôtel. Sauf qu'évidemment ils se prennent de sympathie pour leur cible, pris dans un mic-mac qui le dépasse et auquel il s'est mêlé pour aider un ami qui vient de perdre sa mère et n'a donc pu s'en occuper lui-même.

Ce qui manque sans doute le plus à Wolfs, c'est du rythme. Le film n'est pourtant pas bien long (108'), mais il aurait gagné à être encore plus concis. Ses effets comiques auraient été encore plus percutants (la comédie ne souffre pas de temps morts) et son suspense plus intense. En même temps ce côté laid-back lui donne son charme, un peu rétro, presque démodé, mais si agréable.

Comme je le disais plus haut, Wolfs s'appuie essentiellement sur l'alchimie du duo George Clooney-Brad Pitt, éprouvée depuis la trilogie Ocean's (eleven/ twelve/ thirteen) et Burn after reading (même s'ils ne partageaient qu'une scène sans dialogue). Depuis quelque temps Clooney s'est pratiquement retiré alors que Pitt, couronné par un Oscar du meilleur second rôle, est toujours au top.

A ce sujet, Watts a raconté avoir d'abord convaincu Clooney de s'engager dans son film mais quand il lui a expliqué son souhait de reformer son tandem avec Pitt, Clooney l'a mise en garde, estimant que son ami refuserait, préférant les projets plus ambitieux. Watts ne s'est pas découragé et a persuadé Pitt... Qui lui a alors avoué que Clooney l'avait appelé entre temps pour qu'il joue la star capricieuse.

Ce genre de connivence ne se créé pas comme ça : elle est le fruit d'une véritable amitié en dehors de plateaux de tournage. C'était le cas entre Paul Newman et Robert Redford (même si ceux-là étaient beaucoup moins farceurs). Mais ça en dit long sur le statut acquis par Clooney et Pitt, qui sont devenus d'authentiques icones du cinéma US, peut-être les dernières de leur catégorie.

Existe-t-il spectacle plus amusant de les voir jouer deux rivaux dans leur profession et s'envoyer des vacheries au visage ? Je ne le crois pas. Rien ici n'est sérieux et les deux comédiens jouent comme s'ils adressaient en permanence des clins d'oeil au public. On prend un plaisir fou à les voir faire comme si, être ces sexagénaires élégants, cools, un film dans le film.

Pourtant le film ne s'arrête pas là et les met face au prodigieux Austin Abrams, désopilant en cadavre récalcitrant et môme touchant qui leur rappelle sans cesse qu'ils devraient s'associer tant ils se complètent. Qu'importe alors que le film soit un peu trop mou, désinvolte, qu'il accumule des péripéties superflues, on est accros. 

Jon Watts sait qu'il a de vrais experts devant son objectif et il est spectateur comme nous. Le buddy movie fonctionne beaucoup sur ce compérage et on aurait tort de bouder notre plaisir, même si Apple a tué dans l'oeuf une franchise si prometteuse.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire