3 amies - Arlene, Shanna et la DJ Jungle Julia - fêtent l'anniversaire de Julia à Austin, Texas. Elles descendent dans un bar où Julia révèle qu'elle a passé une annonce pour qu'un auditeur qui se présentera devant Arlene en lui récitant un extrait d'un poème de Robert Frost gagnera une lap dance réalisée par cette dernière. Un cascadeur, Mike, assis au comptoir, tente sa chance. 
Mais Arlene est réticente car elle l'a aperçu plus tôt dans la journée et pense qu'il les a suivies, elle et ses amies, jusqu'ici. Pourtant elle finit par s'exécuter. Lanna, une quatrième fille, rejoint la bande pour les conduire dans une maison où elles passeront le week-end ensemble. Mike, lui, offre à Pam, une ancienne camarade de lycée de Julia, de la reconduire chez elle...
14 mois plus tard, Mike observe trois amies - la maquilleuse Abernathy Ross, la cascadeuse Kim Mathis et l'actrice Lee Montgomery - dans une station-service de Lebanon, Tennessee. Elles vont ensuite à l'aéroport chercher Zoë Bell, une consoeur de Kim. Mike les photographie ensemble à leur insu.
Autour d'un bon repas, Zoë explique à ses amies qu'elle a rendez-vous avec Jasper pour acquérir sa Dodge Challenger de 1970, identique à celle du film "Point Limite Zéro". Sur place, Abernathy convainc Jasper de les laisser essayer la caisse en le laissant faire connaissance avec Lee pendant ce temps...
L'énorme succès critique et commercial de Kill Bill a incité Quentin Tarantino à réfléchir à son projet suivant, pour lequel il voulait une durée de tournage moins importante. Son ami Robert Rodriguez (Desperado, El Mariachi) lui propose alors un projet à la fois fou et décalé : un double programme en hommage au cinéma Grindhouse, ces films de série B ou Z projetés dans des drive-in.
On imagine la réunion avec les frères Weinstein où les deux réalisateurs leur exposent ce truc improbable, à la distribution compliquée. Mais que pouvaient-ils refuser à Tarantino, leur poule aux oeufs d'or ? Les deux films seront projetés au Festival de Cannes et reçus très tièdement par la presse et les spectateurs présents sur la Croisette. 
Pour limiter la casse (en vain), les Weinstein décident finalement de sortir les deux films séparément avec un nouveau montage des deux cinéastes. Planète Terreur de Rodriguez d'un côté, Boulevard de la Mort de l'autre. Signalons que le titre français, quand Tarantino le découvrit, plut davantage à l'auteur que son propre titre original, Death Proof !
En attendant que je vous parle un jour de Planète Terreur, place à Boulevard de la Mort. Je ne vais pas prétendre que c'est un grand Tarantino, ni même une de ses meilleures oeuvres, et pourtant j'ai une affection particulière pour ce plaisir coupable. Il n'est pas long (113'), son intrigue est très simple (quoique habilement détournée), et la mission initiale pleinement remplie.
Il y a deux parties dans Death Proof auxquelles correspondent deux styles visuels : la première suit quatre filles en goguette et s'appuie sur les dialogues de Tarantino, sa manière de parler de tout et de rien, de tourner autour du pot, tout en glissant un élément périphérique à la causette qui déclenchera les hostilités. C'est le segment le plus stylisé du film.
En effet, l'image saute par moments, la pellicule est rayée, il y a des faux raccords... Mais tout ça est volontaire. Tarantino a voulu imiter la patine de ces vieux films, comme s'il avait été projeté trop de fois et que qu'il avait été usé. L'effet est d'abord surprenant, puis tellement bien fichu qu'on se prend au jeu et on admire le soin accordé à imiter une production fauchée.
On retrouve le talent extraordinaire de l'auteur pour faire monter la tension. La présence de ce Mike, cascadeur balafré, au comptoir, est immédiatement menaçante. Il a évidemment suivi ces filles jusqu'à ce bar et les reluque d'une façon bizarre, avec une lueur étrangement lubrique dans le regard. On pense qu'il a envie de s'en taper une (ou plusieurs). Mais pas de manière conventionnelle...
Il jette son dévolu sur une autre pourtant et ce qu'il lui fera subir est absolument brutal. Death Proof trouve son explication dans le fait que sa voiture est un véhicule spécialement conçu pour des cascades, elle résiste à tous les chocs et protège son conducteur. La tête de mort sur la capot est à la fois grotesque et effrayante.
Ce n'est pas spoiler que de révéler que Mike va tuer toutes ces donzelles. Et pourtant s'en tirer : physiquement d'abord, même s'il est amoché, et judiciairement ensuite, car s'il les a assassinées avec préméditation, rien ne le prouve. Lui était parfaitement sobre au volant tandis que ses proies étaient toutes en état d'ébriété. Le shérif renoncera à le poursuivre à cause de ça.
Tarantino a donc créé un de ces méchants d'anthologie dont il a le secret, une ordure absolue, cruelle, bestiale, mentalement dérangée. Fin du premier acte. 
Le second segment se déroule 14 mois plus tard et Mike, rétabli, cible à nouveau quatre filles. Sauf que cette fois-ci, il va tomber sur un os, et de taille... Mais là, si je vous en dis plus, ce serait criminel. Tarantino abandonne tous les trucages visuels de la première partie. Il filme juste le début de celle-ci en noir et blanc, sans doute pour souligner l'aspect macabre, comme revenu d'entre les morts, de Mike.
Mais ensuite la pellicule est propre. Il faut alors préciser que Boulevard de la Mort a été aussi photographié par Tarantino, une première - et une dernière. Mais le résultat est impeccable (comme souvent dans ce cas-là : Steven Soderbergh signe souvent la photo de ses films, sous des noms d'emprunt, et on ne perd pas au change).
Le cinéaste avait déclaré, lors du Festival de Cannes, qu'il regrettait l'époque des vrais stuntmen, déplorant que maintenant, avec les effets spéciaux, toutes les cascades étaient remplacées par des CGI (Computer-Generated Imagery). Rappelez-vous : c'était en 2007. Et l'an dernier, David Leitch, pour The Fall Guy, ne disait pas autre chose, 17 ans après Tarantino.
Pour Death Proof, Tarantino voulait surtout rendre hommage à des films comme Point Limite Zéro (Richard Sarafian, 1971) ; Larry le dingue, Mary la garce (John Hough, 1974) et d'autres longs métrages avec des courses-poursuites automobiles d'anthologie. Sans trucages. Et la seconde partie de son film leur est dédiés.
L'astuce, c'est alors de retourner l'intrigue. Dans la première partie, un cascadeur psychopathe éliminait sauvagement des filles sans défense au terme d'une soirée de bavardages frivoles et de climat délétère. Dans la seconde partie, c'est tout le contraire : l'action prend le dessus et les filles leur revanche. Mike va tomber sur plus fort que lui et le payer cher.
Tarantino inverse donc les codes du slasher movie : il a fait de Mike un danger mortel pour mieux orchestrer sa défaite finale. Il n'est pas question de raconter l'histoire de filles fragiles qui s'en sortent miraculeusement, mais de montrer des guerrières agressives qui n'ont peur de rien et veulent avoir la peau de celui qui s'était juré d'avoir la leur.
Le spectacle est hallucinant parce que l'action est ébouriffante, on assiste à une poursuite extraordinaire, digne des meilleures du genre, filmée de manière virtuose (prouvant que Tarantino n'est pas qu'un metteur en scène statique), et le dénouement est jubilatoire dans sa radicalité sarcastique. Le slasher se mue en revenge movie et c'est sans doute pour cela que j'aime tant Boulevard de la Mort.
Kurt Russell compose le terrifiant puis pathétique Mike le cascadeur. Pourtant il a failli ne jamais le jouer puisque le rôle a été proposé à John Travolta, Bruce Willis, Willem Dafoe, Denzel Washington, John Malkovich, Mickey Rourke et Sylvester Stallone, qui ont tous décliné. Mais Tarantino désirait Russell au fond depuis le départ, déplorant que l'acteur ne joue plus de rôles de tough guys (comme dans New York 1997). Et on n'imagine personne d'autre à sa place.
Les filles du film sont toutes des bombasses mais aussi d'excellentes comédiennes, qui ont embrassé le côté B du projet et se sont visiblement beaucoup amusées. Face A : Vanessa Ferlito, Sydney Tamii Poitier (sublime), Jordan Ladd (la fille de Cheryl Ladd, la drôle de dame), Rose McGowan (à l'époque compagne de Robert Rodriguez, qui la dirige dans Planète Terreur).
Face B, encore meilleure : avec Zoë Bell dans son propre rôle, que Tarantino avait admiré sur Kill Bill, Rosario Dawson, Tracie Thoms et Mary Elizabeth Winstead, irrésistible dans son costume de cheerleader. Ici, la référence explicite, ce sont les vixens de Russ Meyer dans Faster, Pussycat ! Kill ! Kill ! dont Tarantino avait pensé faire un remake (un de ses innombrables projets abandonnés).
Evidemment, la bande-son est extravagante, une des meilleures de la filmo de QT, avec des chansons sorties d'on ne sait où mais géniales.
Rugissant comme un moteur, violent comme un accident de la route, sexy en diable, Boulevard de la Mort, c'est de la balle !







 
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