Lane, un vétéran de la guerre de sécession, accepte d'aider une jeune veuve, Lilly Lowe, à restituer 500 000 $ volés lors d'une attaque d'un train de la compagnie Wells Fargo commise par son mari et son gang afin de laver son nom de famille de son fils. La compagnie a promis une récompense de 50 000 $ à qui lui rendra cet argent. Mais Lane pense que les complices de feu Mr. Lowe vont aussi vouloir mettre la main sur ce magot et il décide de rassembler une équipe de vieux camarades de l'armée pour cette expédition.
Lilly insiste pour les accompagner, se méfiant d'hommes qu'elle ne connait pas et qui pourrait ne pas vouloir restituer cet argent. A leur insu, ils sont suivis par un agent de l'agence Pinkerton. L'équipe progresse lentement mais sûrement jusqu'à la frontière avec le Mexique et traverse le Rio Grande. A la tombée du jour, elle fait une halte pour la nuit et chaque membre se relaie pour veiller sur le campement. C'est aussi l'occasion, à chaque fois que cela se produira, pour mieux faire connaissance et gagner la confiance de Lilly.
Comme prévu, le gang de Lowe est à leur poursuite tout en gardant ses distances. Cela intrigue Lane qui songe à tout abandonner, sachant qu'avec sa propre bande ils ne pourraient résister longtemps contre une telle horde qui enlèverait alors Lilly et l'obligerait à communiquer la cachette du trésor. Mais Jesse et Grady, les deux plus vieux compères de Lane, qui ont servi sous ses ordres dans l'armée nordiste, le convainquent de continuer. Ils atteignent le désert et trouvent le train déraillé où Lowe a laissé l'argent. Mais ils se trouvent aussi encerclés par l'ennemi...
En 1973, quand John Wayne joue dans The Train Robbers (en vo), il a 66 ans et il ne lui reste plus que six années à vivre. Il est atteint d'un cancer et suit un traitement mais son ami, le réalisateur Henry Hathaway, l'a convaincu de continuer à jouer pour garder le moral. Toutefois, c'est le crépuscule de la carrière d'un géant du cinéma et qui a incarné, plus que tout autre, le western.
Il est ici dirigé par un autre de ses proches, Burt Kennedy, avec qui il a déjà fait La Caravane de feu en 1967. Kennedy était un de ces artisans hollywoodiens, un honnête faiseur, qui savait qu'il n'avait pas le talent des grands comme John Ford ou Anthony Mann. Il était d'ailleurs lucide à ce sujet et parlait de Les Voleurs de train comme une de ses rares réussites.
Il en avait écrit le scénario spécialement pour Wayne qu'il estimait parce que, disait-il encore, dans les scènes de dialogue, le spectateur savait qu'on ne pouvait pas lui faire dire quelque chose qu'il ne pensait pas personnellement - il était donc honnête et juste. Une scène illustre cela dans laquelle Lane et sa bande, sur le chemin du retour, s'arrêtent dans un pueblo mexicain, avec le gang de Lowe à leurs trousses.
Grady dit alors à Lane de le laisser monter avec Grady dans le beffroi de l'église et, depuis de point, ils pourront tuer tous leurs poursuivants facilement. Pendant qu'il explique ça, on entend un bébé pleurer dans une maison du village et Lane répond alors : "Tu entends ça ? As-tu déjà enterré un bébé ? Moi non plus et je tiens à ce que ça continue.".
Lane refuse donc la confrontation dans un lieu habité par peur des dommages collatéraux. Et cela résume parfaitement le personnage : brave en temps de guerre, sage en temps de paix. Et si on y croit, c'est parce que c'est John Wayne qui joue Lane, cet homme qui préfère encore avoir un gang de tueurs à sa poursuite que de risquer la vie d'innocents en les fusillant dans un village.
Kennedy se distingue aussi dans Les Voleurs de train par l'humilité formelle de son film. En 1973, le western spaghetti, le post-western comme certains critiques l'appelleront, est devenu la forme dominante du genre. Les héros sont devenus des anti-héros, cyniques, mal rasés, couverts de poussière, affrontant des ennemis encore plus terribles et crasseux qu'eux.
A côté, les personnages de Les Voleurs de train paraissent anachroniques, comme des reliques d'une époque révolue. Ce sont d'anciens soldats de la guerre de sécession, des hommes âgés, escortant une jeune veuve. Mais ils ont de l'allure et de la noblesse. Le soir, au coin du feu, ils se remémorent leurs faits d'armes et surtout la camaraderie inébranlable qui les unit depuis.
Ainsi Lilly Lowe, qui se méfiait d'eux, craignant en leur indiquant l'emplacement de l'argent qu'elle veut restituer à la compagnie ferroviaire attaquée jadis par son mari qu'ils ne s'en emparent, comprend son erreur. Ils sont non seulement dignes de confiance, mais, à la manière de preux chevaliers, ils ne font pas ça pour l'argent, mais d'abord pour s'entraider comme ils l'ont fait sur les champs de bataille.
A la fin, ils renonceront même à leur prime pour que, une fois qu'elle aura rendu l'argent à la Wells Fargo, elle dispose d'un petit pécule avec lequel elle pourra élever son enfant... Sauf que, justement, Kennedy, après avoir été bien sage pendant tout le film, réserve un twist jubilatoire aux héros et au spectateur à la fin.
Je ne vais pas spoiler mais croyez-moi quand je vous assure que vous ne le verrez pas venir. C'est à la fois savoureux et cruel, comme si le cinéaste se moquait gentiment du cynisme du western spaghetti et de ses aventuriers sans morale. La première fois que j'ai vu le film, j'ai éclaté de rire avec ce coup de théâtre tellement il m'a pris par surprise. Et, en le revoyant, j'y ai pris le même plaisir.
Alors, même s'il n'est pas bien long (à peine 90'), il y a quand même quelques longueurs. Le rythme est très pépère, et on sent bien que le script n'est pas assez étoffé. Mais c'est un western sympathique, avec un règlement de comptes final explosif, et donc ce twist jubilatoire.
John Wayne n'a plus la prestance qu'il affichait chez Ford ou Hawks, mais il en impose sans forcer. Ann-Margret cache bien son jeu, même si elle souffre un peu à vouloir exister entre ses partenaires masculins. Rod Taylor et Ben Johnson, deux autres vieux routiers du genre, campent des acolytes impeccables. Et Ricardo Montalban, presque sans rien dire tout du long, incarne l'agent de Pinkerton qui mystifiera les cowboys à la fin.
C'est typiquement un western "dernière séance" (référence qui ne parlera qu'aux vieux comme moi), mais qui se savoure pour cela.







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