1912, Sonora, Mexique. Sarita assiste à l'exécution par pendaison de son père arrêté par l'armée mexicaine qui l'accusait de détenir un fusil pour participer à l'insurrection contre le gouvernement. La jeune femme est emmenée en ville pour y être livrée au général Verdugo. A son arrivée, Yaqui Joue Herreira sort du lit où il vient de passer la nuit dans un hôtel avec une prostituée et observe la scène suivante. Un shérif noir se présente auprès des militaires pour qu'on lui livre Yaqui Joe, recherché pour le braquage d'une banque à Phoenix, Arizona.
Yaqui Joe créé une diversion pour permettre à Sarita de s'échapper tandis qu'il est arrêté par les soldats. Verdugo tient enfin cet indien qui soutient les insurgés mais refuse de le livrer au shérif Lyedecker qu'il pense être son complice. Il ordonne qu'ils soient fusillés. Mais les deux hommes sont sauvés par une attaque des indiens menée par Sarita et fuient avec elle dans les collines environnantes. Yaqui Joe révèle avoir volé 6 000 $ à Phoenix pour acheter cent fusils aux insurgés et demande à Lyedecker d'attendre avant de le ramener aux Etats-Unis.
Sarita promet à Lyedecker qu'une fois les fusils entre les mains des indiens, elle lui livrera Yaqui Joe. Verdugo approchant avec ses troupes, le shérif accepte à contrecoeur. Après avoir traversé un village, les indiens continuent leur chemin avec les armes tandis que, apercevant des colonnes de fumée au loin, Joe, Lyedecker et Sarita font demi-tour. Verdugo a tué tous les adultes du village auquel il a mis le feu et emmené les enfants. Ils ne peuvent se résoudre à les abandonner à leur sort et avec quelques hommes partent à leur poursuite...
100 Rifles (en vo) est un western qui a fait date pour plusieurs raisons, même s'il ne figure pas dans la liste des meilleurs films du genre. C'est l'oeuvre de Tom Gries, qui a travaillé pour la télévision à partir des années 50 puis est devenu scénariste et réalisateur la décennie suivante. En 1968, il obtient son premier succès avec déjà un western, Will Penny, avec Charlton Heston.
Les Cent Fusils (en vf) est l'occasion pour lui de diriger une grosse production mais pour limiter les coûts du tournage, le studio Warner l'envoie en Espagne, à Almeria, là où sont tournés les westerns spaghetti. Sur place, il fait une chaleur accablante qui mettra les nerfs des techniciens et des acteurs à rude épreuve.
Gries a co-écrit le script, d'après un roman de Robert MacLeod, avec Clair Huffaker. Ce dernier demandera pourtant à ce que son nom ne soit pas crédité car il estimait que le film n'avait plus rien à voir avec ce qu'il avait imaginé. Gries avait en effet des idées arrêtées sur ce qu'il voulait, mais Huffaker n'aura pas gain de cause.
L'intrigue se déroule à une époque tardive pour un western, en 1912. On voit d'ailleurs le grand méchant de l'histoire, le général mexicain Verdugo, se déplacer dans une voiture décapotable. Pourtant ces éléments ne trompent pas sur le genre. Mais c'est indéniablement un de ces post-westerns qui raconte la fin d'une époque et déplace l'action au Mexique pour souligner ce fait.
L'armée mexicaine traque des insurgés indiens et les réprime dans le sang avec une rare cruauté, et Verdugo est conseillé par un officier allemand, Von Klemme, même s'il le remet fréquemment à sa place quand il veut commander. Le film met l'accent sur le fait que les mexicains occupent des terres indiennes comme les nazis ont occupé des pays européens, la métaphore est sibylline.
Entre Sarita, la belle révolutionnaire orpheline et vengeresse, et Yaqui Joe, le bandit indien, il y a le shérif Lyedecker. C'est un homme noir et il traque Yaqui Joe pour qu'il soit jugé en Amérique où il a braqué une banque afin d'acheter des fusils aux insurgés. Pour ce shérif, c'est l'opportunité d'avoir une promotion alors que sa couleur de peau l'embarrasse, comme autrefois quand il était dans la cavalerie.
Gries va appuyer sur les particularités raciales pour porter un discours étonnamment progressif dans un western, à une époque où la lutte pour les droits civiques était loin d'être acquise (et elle ne l'est toujours pas) aux Etats-Unis. On a donc une femme latino, un métis indien, et un homme afro-américain dans les trois rôles principaux, ce qui n'est pas commun en 1969.
Et, progressivement, le récit met en avant le fait que tous les trois sont des opprimés et que, en s'alliant, même provisoirement, ils peuvent corriger une situation injuste. Pourtant la morale du film est pessimiste - réactionnaire même pour certains critiques de l'époque - puisqu'un l'un des protagonistes périra et que les deux autres subsisteront dans une position tout aussi précaire qu'au début.
Pour ponctuer ce discours, Gries nous gratifie de belles scènes d'action, souvent très spectaculaires, où il tire avantage des décors somptueux du Sud de l'Espagne qu'on peut confondre aisément avec les grands espaces de l'Amérique ou du Mexique, avec des plaines à perte de vue et des collines arides. La bataille finale est épique et avant cela, l'attaque du fort en pleine nuit est haletante.
Mais Les Cent Fusils va rester dans les mémoires pour d'autres raisons. La première, la plus iconique, c'est cette scène où, pour distraire des soldats mexicains pendant que ses compagnons d'armes préparent une embuscade, Sarita prend une douche sous un château d'eau. Contrairement à la légende, elle n'est pas complètement nue mais c'est suffisamment érotique pour marquer les esprits.
La seconde, encore plus notable, est une scène d'amour physique entre Sarita et Lyedecker. Gries l'a tournée au tout début des prises de vue et les acteurs impliqués étaient très nerveux. Pas seulement à cause de la teneur du moment, mais parce qu'ils ne s'entendaient pas - et évidemment, ça ne s'est pas arrangé ensuite. Mais cela a provoqué un scandale lors de la sortie en salles car on y voyait un homme noir et une femme blanche faire l'amour.
Dans certains Etats, le film n'a pu être projeté car les exploitants de salles ont reçu des menaces de mort et les acteurs ont été traînés dans la boue par des tabloïds racistes. Plus tard, des historiens raconteront que, pour cette scène, Raquel Welch/Sarita aurait exigé qu'une serviette soit glissée entre elle et Jim Brown/Lyedecker pour ne pas que leurs peaux se touchent.
Légende ou vérité ? En tout cas, Brown et Welch ont une relation tendue dès le départ et Burt Reynolds a raconté qu'il avait servi de modérateur entre eux, étant ami à la fois avec l'un et l'autre. Brown expliquera, quant à lui, qu'il voulait protéger Welch mais que celle-ci était tellement nerveuse qu'elle faisait tout pour écourter le tournage de la scène et ne lui parla plus ensuite.
Jim Brown était, avant de se tourner vers le cinéma, un footballeur, ce qui explique sa carrure impressionnante. Il s'est avéré être un excellent acteur, mais aussi l'opposé d'un Sidney Poitier (vu comme le "bon noir de service"). Il a fait quelques très bons films avant de se perdre dans des longs métrages d'exploitation, indigne de son talent. Il est en tout cas très bon ici.
Raquel Welch, malgré donc une attitude apparemment limite, tient aussi un de ses meilleurs rôles avec Sarita. Elle lui donne sa beauté farouche et sensuelle mais aussi une détermination à fleur de peau.
Et donc Burt Reynolds joue Yaqui Joe avec ce mélange d'énergie et de flegme, même s'il se trouva assez moyen dans le film, estimant que son personnage était trop insouciant.
Fernando Lamas campe le méchant Verdugo avec théâtralité, on adore le détester tout du long.
Mentionnons encore la superbe musique de Jerry Goldsmith, une de plus à son actif.
100 Rifles mérite mieux que son statut de série B et que ses polémiques sur la mixité raciale. C'est un western épique, singulier et très efficace, qui mérite d'être réévalué.







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