lundi 24 novembre 2025

BANDOLERO ! (Andrew V. McLaglen, 1968)


Le gang de voleurs mené par Dee Bishop braque la banque de Valverde, une petite ville texane, mais l'opération tourne mal après qu'un riche client est abattu et que le shérif abatte un des bandits. Les autres sont arrêtés et enfermés dans les cellules du bureau du shérif où ils vont attendre leur exécution par pendaison. Non loin de là, Mace Bishop, le frère de Dee, apprend accidentellement la nouvelle par le bourreau qui va pendre les malfrats. Il attend que l'homme s'éloigne pour le neutraliser et endosser son rôle.


Alors que Dee et ses complices montent à la potence, Mace glisse à son frère cadet un revolver avec lequel il prend le shérif en otage. Les bandits prennent la fuite et le shérif rassemble une dizaine d'hommes pour les traquer. Mace s'éclipse discrètement et profite de l'absence d'hommes de loi pour dévaliser la banque sans défense. Cependant, en croisant la jolie veuve du client qu'un de ses hommes a tué, Dee capture cette dernière, Maria Stoner, pour dissuader le shérif et ses hommes de les poursuivre.


La nuit venue, Mace rejoint Dee après avoir, comme lui, franchi le Rio Grande. Le shérif, bien que sachant qu'il n'est plus dans juridiction, continue sa chasse à l'homme mais enregistre déjà quelques défections dans son équipe de volontaires. Dee explique qu'il souhaite gagner le village de Salinas mais Maria le met en garde contre les bandoleros, des bandits mexicains sanguinaires qui contrôle la région. Et aussi sur le fait que le shérif ne le lâchera pas car il est amoureux d'elle...


Victor McLaglen était un des acteurs fétiches de John Ford et c'est à n'en pas douter en accompagnant son père sur les plateaux de tournage que Andrew V. MacLaglen, son fils, a découvert sa vocation : il dirigerait lui aussi des westerns. Hélas ! pour lui, il n'a jamais eu ni le talent ni la reconnaissance de Ford, même s'il a tourné avec beaucoup de ses acteurs favoris, comme John Wayne et James Stewart.
 

Avec beaucoup de condescendance, les critiques ont considéré Andrew V. McLaglen comme un piètre faiseur, tout juste bon à mettre en valeur des stars, mais sans style. Si ce n'est pas totalement faux, il a au moins réussi à surprendre avec Bandolero !, qui est vraiment un curieux western, démarrant quasiment comme une comédie, se poursuivant comme un film d'aventures pour se finir en drame.


En 1968, le western spaghetti a déjà pratiquement terrassé le western classique et on en ressent l'influence dans Bandolero ! avec le look des personnages, mal rasés, sales, à la morale douteuse, et dans l'intrigue qui se déroule principalement au Mexique - même si le film y a bien été tourné, et non en Espagne comme c'était déjà le cas pour de nombreuses productions américaines du même genre.
 

J'ai vu pour la première Bandolero ! il y a fort longtemps, certainement dans un numéro de La Dernière Séance, présentée par Eddy Mitchell, l'émission idéale pour des séries B, et j'y avais pris un plaisir très simple. Pourtant, en le revoyant, je me suis rendu compte que j'avais oublié des éléments clés de l'histoire, notamment son dénouement, très noir.

Mais n'est-ce pas une des particularités des westerns ? Quand on en a vu beaucoup, on oublie facilement les moins bons et on peut même les réécrire comme des fantasmes, en croyant que tel personnage était ainsi ou tel rebondissement était autre. Ce qu'on retient en vérité, c'est l'écume du film, ses aspects les plus classiques, quitte à ce qu'ils soient incorrects.

Ce manque de précision reflète l'écriture du film lui-même et, de ce point de vue, Bandolero ! a de quoi vous faire perdre le Nord. Il y a d'abord la scène d'ouverture avec ce braquage raté qui envoie les bandits au cachot puis à la potence. Avant que le frère du chef de ce gang ne sauve la mise à toute la bande, après avoir pris la place du bourreau.

Dans mon souvenir, Mace Bishop était un faux prêtre venu confesser les bandits et il faisait évader son frère, Dee, et ses acolytes directement depuis leur prison dans le bureau du shérif. C'est curieux d'avoir confondu un faux bourreau et un faux prêtre, même si tous les deux portent un habit noir, mais que le premier vient pendre des malfrats et l'autre vient tenter de les confesser.

Ensuite, il y a une très longue séquence d'évasion avec bandits et forces de l'ordre qui se poursuivent au-delà de la frontière américano-mexicaine. Je croyais qu'il y avait là une succession de scènes d'action, de rebondissements spectaculaires alors qu'en fait pas du tout. Comme dans Les Voleurs de Train (Burt Kennedy, 1973), le rythme est assez pépère et l'histoire est ponctuée par des haltes régulières de nuit au coin du feu.

Cela permet à James Lee Barrett, le scénariste qui a adapté le roman de Stanley Hough, de livrer des dialogues censés nous permettre de cerner la psychologie des personnages, en tout cas au moins du trio de base (Mace et Dee Bishop et Maria Stoner, les autres étant relégués au rang de faire-valoir). Dee et Mace s'opposent sur leur avenir, le premier ne croyant pas pouvoir refaire sa vie, le second essayant de convaincre son cadet de renoncer à fuir et à commettre des méfaits.

Du côté des bons, le shérif July Johnson est dépeint comme un gros ours qui court moins après les frères Bishop qu'après Maria Stoner dont il est épris, ce qui lui vaut la défiance des hommes qu'il a enjoint de l'aider à capturer les bandits et qui ont deviné sa véritable motivation. En même temps, le film développe à partir de là une sorte de triangle amoureux entre Dee, Maria et Johnson.

Et on entre dans la partie la plus intéressante, la plus sincère du film qui interroge sur la réciprocité des sentiments, la volonté de se racheter, la foi placée dans un homme qui ne croit plus en sa rédemption, les liens entre deux frères. Subtilement, sans qu'on y prenne garde, Bandolero ! bascule dans un territoire inattendu, où deux hommes veulent se faire aimer de la même femme tout en étant ennemis.

Le dernier acte rejoue la figure bien connue d'une bataille rangée et très déséquilibrée qui va révéler l'héroïsme inattendu de certains, les sentiments émergeants d'autres, et une fin totalement surprenante par sa noirceur. Bandolero ! confirme alors qu'il a trotté dans une direction atypique, imprévisible, et qui le rend plus attachant, plus profond que ce qu'on pouvait imaginer.

Alors, oui, bien sûr, ce n'est pas très bien filmé, ni rythmé. Sur 105' de film, avec un 1/4 d'heure de moins, le résultat aurait gagné en intensité, peut-être en force émotionnelle aussi. Mais c'est loin d'être aussi mauvais que d'autres longs métrages de McLaglen. Qui, encore une fois, peut s'appuyer sur un casting très solide.

Dean Martin a prouvé, notamment dans sa superbe composition d'ivrogne dans Rio Bravo (Howard Hawks, 1959), qu'il était excellent dans les westerns et ici, il campe un voleur qui examine lucidement ses erreurs. Raquel Welch est très belle et, même si là aussi on lui a reproché ses interprétations souvent faibles, elle est vraiment très bien dans ce rôle de veuve prise entre deux feux.

George Kennedy est également impeccable dans la peau de ce shérif amoureux et entêté. Mais la véritable attraction du film est James Stewart, 60 ans à l'époque, qui joue sa propre participation, presque parallèle à celle des autres. Il insuffle de la comédie au début, puis impose son humanité tranquille ensuite, avant de redevenir un héros touchant à la fin. C'est vraiment lui qui donne le la, le tempo à tout le film.

Enfin mentionnons la superbe bande originale de Jerry Goldsmith, notamment le thème d'ouverture avec une guimbarde très Ennio Morricone.

Bandolero ! est un drôle de western, décousu, mais avec un vrai charme. L'avoir vu ado, et le revoir adulte est une vraie madeleine proustienne.

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