samedi 27 juillet 2024

THE SIX FINGERS #5 (Dan Watters / Sumit Kumar) - avec The One Hand, 2 comics qui n'en font qu'un


Ada a été arrêtée et conduite au poste de police pour y être interrogée, non pas sur la position de Johannes Vale, qui est connue, mais sur sa possible complicité dans les meurtres qui a commis et leur signification. A l'aéroport, Ari Nassar retrouve Vale qui achève de décoder les glyphes du tueur à une main...


Cette fois, c'en est fini de ce projet assez unique que furent les deux mini-séries qui se répondaient, The One Hand (Ram V / Lawrence Campbell) d'un côté ; The Six Fingers de l'autre. La fin de The One Hand m'avait déjà pas mal désarçonné et j'espérai que celle de The Six Fingers me fournirait un dénouement moins cryptique. Ce n'est pas le cas.


Comment dire ? Je conçois que le terminus de ce projet en frustrera beaucoup quand il sera disponible en vf. Pourtant je continue de le recommander parce que j'aime ce genre de défi, de pari : ça sort de l'ordinaire, c'est stimulant, et il faut encourager cela. Mais est-ce abouti pour autant ? Est-ce suffisamment accompli. Non.
 

Je dirai que je suis déçu en bien. C'est antinomique, je sais, mais je n'ai pas trouvé mieux pour exprimer mon sentiment à la sortie de ce cinquième et dernier chapitre. Comme je viens de le dire, j'aime ce que Ram V, Lawrence Campbell, Dan Watters et Sumit Kumar ont tenté. Ce n'est pas parfait, loin s'en faut, mais c'est osé, y compris par l'hermétisme de la conclusion (ou son mystère, si on veut enrober ça de façon plus méliorative).


Mais j'ai quand même l'impression que beaucoup de promesses n'ont pas été tenues. Ou pour être plus exact, que ce formidable, cet excitant concept de deux séries qui se répondent, qui sont indissociables, accouche d'une souris trop nébuleuse à mon goût. Et pourtant je ne suis pas de ceux qui courent après des résolutions faciles.


J'aime bien, par exemple, au cinéma, des auteurs qui s'amusent avec moi, qui se jouent de moi, qui prétendent que leurs histoires n'obéissent pas à la logique mais sollicitent les sens, comme David Lynch. Je ne regarderai pas ça tous les jours, mais je reconnais l'aspect ludique de la démarche et je fais l'effort si c'est nécessaire de ne pas être trop cartésien.

Là, avec cette histoire croisée d'un flic sur la fin et d'un tueur copieur, je sentais qu'il y avait de quoi faire quelque chose de vraiment grand, neuf, inspirant. Et il faut reconnaître que sur les 3/4 du projet, c'est parfait. Ram V comme Dan Watters nous ont entraînés sur des terrains glissants, des pistes touffues, avec des serial killers bizarres, leurs copycats, une langue cryptée, des androïdes, des passages secrets, etc.

Mais au regard de la fin des parcours de Ari Nassar et Johannes Vale, on ne peut s'empêcher de ressentir comme un manque, un goût d'inachevé. A moins, et ça, c'est tout aussi possible, que je ne sois intelligent pour saisir ce qu'ont voulu dire les auteurs. Il est toujours dangereux d'attendre trop d'une histoire - c'est le meilleur moyen d'en être déçu. Mais c'est comme si j'étais passé à côté de quelque chose, et ça, c'est énervant.

Je ne dis pas non plus qu'avec un épisode de plus de chaque côté, ça aurait miraculeusement tout arrangé. On ne le saura jamais de toute façon, donc c'est inutile de spéculer. Mais je crois que ce qui manque essentiellement, c'est qu'en fin de compte les deux séries qui fonctionnaient si bien en parallèle échouent à se se réunir au bout. C'est difficile d'expliquer ça sans spoiler, mais tant que Nassar courait après le tueur et que Vale le semait, rien à dire, très efficace, très intrigant, et puis patatras ! Derniers épisodes, rideau, et en fait pas de synthèse.

Dans The One Hand, Nassar finit dans une sorte de bureau à répondre à on-ne-sait-qui sur ce qu'il veut après cette dernière enquête. Dans The Six Fingers, le code est cracké, mais au fond on ne voit pas le sens de tous ces meurtres, de ce qui est arrivé à Vale. D'une certaine manière, je pense que Ram V et Lawrence Campbell ont mieux terminé que Dan Watters et Sumit Kumar parce que Nassar finit dans des espèces de limbes comme celles dont il n'est jamais sorti. Alors que Vale accomplit quelque chose de plus grandiose mais d'incompréhensible. Je ne peux pas dire mieux sans en dire trop.

Visuellement aussi, The Six Fingers fait l'effet d'être moins bien dessiné que The One Hand. Campbell joue beaucoup sur l'obscurité et la suggestion quand Sumit Kumar ne cache pas grand-chose. Le souci, c'est qu'il n'y a pas grand-chose à cacher puisque, la plupart du temps, mais c'est particulièrement vrai sur ce dernier épisode, il zappe complètement les décors. Beaucoup de cases, de planches avec cette impression de vide. Le style de Kumar est moins puissamment évocateur, moins intense que celui de Campbell et affaiblit le récit (même si les toutes dernières pages sont quand même saisissantes).

Pour résumer, The One Hand et The Six Fingers forment bien une seule histoire en deux mini-séries parallèles. Mais cet ultime numéro contredit tout ce qui a précédé comme si Ram V et Watters avaient écrit leurs conclusions chacun de leur côté. Comment dit-on déjà ? "Le crime était presque parfait"...

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