dimanche 28 juillet 2024

MINOR THREATS, VOLUME 2 : THE FATEST WAY DOWN (Patton Oswalt & Jordan Blum / Scott Hepburn)


Depuis les morts du justicier the Insomniac et de son ennemi the Stickman, Frankie Follis/Playtime a scellé un pacte avec l'équipe de super-héros de Twilight City pour prendre le contrôle du quartier mal famé de Redport, où vivent retranchés tous les supe-vilains. En échange, Brain Tease, un de ses anciens compères, a accepté de purger une peine de prison pour le meurtre de the Insomniac.


Playtime est assistée de Scalpel qui est devenue son amante pour conduire les affaires de Redport. Elles rencontrent bien quelques problèmes avec des groupes comme le Holiday Gang, mais c'est vite réglé. Frankie est davantage préoccupée par deux autres éléments : d'abord, son règne repose sur un mensonge (la culpabilité de Brain Tease), et ensuite, elle veut élever sa fille Maggie en la protégeant et en ayant de bons rapports avec son ex, Mike.


Inévitablement la situation va lui échapper lorsqu'un groupe de jeunes justiciers formés par the Insomniac apprend par Reptilian, un ami de Snakestalker (qui faisait partie de la bande de Playtime), que Brain Tease n'a pas tué leur mentor. Pour connaître le vrai coupable, ils s'en prennent à Loretta Follis/Toy Queen, la mère de Frankie...
 

Je vous avais parlé il y a quelque temps du premier volume de Minor Threats et je prends un peu d'avance sur la parution du trade paperback du volume 2, qui sortira en Novembre prochain, pour vous présenter une critique de sa suite. Comme précédemment, elle ne compte que quatre épisodes, publiés par Dark Horse, avec la même équipe créative : le duo Patton Oswalt-Jordan Blum au scénario et Scott Hepburn au dessin.


Si j'avais beaucoup aimé les débuts de Minor Threats, c'était pour l'amour véritable que ses auteurs portaient au genre super-héroïque et leur manière de l'exprimer qui n'est pas sans rappeler Astro City de Kurt Busiek, c'est-à-dire en évoquant les personnages phares de Marvel et DC mais revisités. On reconnaissait ainsi avec the Insomniac un avatar de Batman, the Contiuum une équipe façon Justice League-Avengers, the Stickman un cousin du Joker, et pour les Minor Threats un groupe renvoyant à tous les vilains de seconde zone.

En seulement quatre numéros, Oswalt, Blum et Hepburn réussissaient l'exploit de créer leur petit univers de poche, avec une cohérence qui forçait le respect, un max d'action, de l'humour, des rebondissements à la pelle, et un dénouement qui promettait une suite explosive. Allaient-ils transformer l'essai ?

Je ne vais pas faire durer le suspense : c'est un grand oui. The Fatest Way Down est aussi réussi et abouti que A Quick End to a Long Beginning. Toutes les qualités sont conservées et même amplifiées par un scénario très malin, efficace et à la conclusion (temporaire, car un volume 3 est désormais inévitable) imparable et amère.

Comme dans le résumé ci-dessus, la fin du volume 1 plaçait Frankie Follis/Playtime sur un trône fragile car sa mainmise sur la pègre de Twilight City et le quartier de Redport était fondée sur un mensonge. Pour s'assurer que les super-héros ne l'embarrassent pas, elle a sacrifié un de ses amis qui a endossé la responsabilité du meurtre de the Insomniac et croupit donc depuis en prison. Elle lui rend fréquemment visite, mais en vérité moins pour s'assurer qu'il va bien (il fanfaronne volontiers sur son "exploit") que parce qu'elle culpabilise de le savoir derrière les barreaux à sa place.

Malgré tout, aux côtés de Scalpel, qui est désormais son amante, elle assure à Redport une tranquillité que ce secteur ne connaissait plus depuis longtemps, et ce ne sont pas des lascars comme le Holiday Gang qui l'inquiète. Toutefois, Scalpel souhaiterait qu'elle n'intervienne plus en personne pour calmer les huluberlus dans leur genre et qu'elle se consacre au business, notamment quand un promoteur immobilier propose de réhabiliter Redport. Mais Frankie ne le supporte pas quand elle voit que l'immeuble où vit sa mère sera rasé dans l'opération.

Par ailleurs, Frankie veut s'occuper de Maggie, sa fille, pour lui éviter ce qu'elle a vécu (une mère absente et en taule), et pour cela, elle veut regagner la confiance de Mike, son ex, le père de la petite. Ce qui, évidemment, ne plaît guère à Scalpel. Lorsque de jeunes émules de the Insomniac veulent savoir qui a vraiment tuer leur idole (puisque Brain Tease n'a pas su garder le secret) et qu'un ancien vilain s'en mêle, l'explosion est inévitable...

Comme on le voit, l'intrigue est dense et nerveuse à la fois. Quand tant d'auteurs décompressent complaisamment une histoire sur des mois, voire une année, Oswalt et Blum n'hésitent pas à griller toutes leurs cartouches et ce sentiment d'urgence alimente la tension constante du récit. Comme Frankie, le lecteur n'a pas le temps de souffler, de prendre du recul et donc il sait que la catastrophe est déjà en route. Tout, en effet, se règlera dans un déluge de violence, avec son lot de dommages collatéraux tragiques. Car, oui, si Minor Threats est fun à lire, se dévore, les auteurs n'évitent pas le traitement des conséquences.

Ensuite, le dessin de Scott Hepburn, un artiste qui, on le sent, est lui aussi chaud patate après avoir été négligé par Marvel, donne tout ce qu'il a pour animer cette histoire, ses personnages, son action quasi-ininterrompue, mais sans sacrifier les moments plus calmes, où les protagonistes doivent tenter de composer avec leurs démons. Le résultat est d'une tonicité impressionnante, au point que les quatre épisodes ont cette consistance qui manque à tellement de comics super-héroïques.

Ici, encore une fois, il n'est pas question de s'économiser. Hepburn fait feu de tout bois : ses doubles pages sont extraordinaires, quand il ponctue une scène par une splash page c'est pour un effet d'un impact maximal. Le reste du temps, son découpage est sidérant d'inventivité et souvent de drôlerie, comme quand les jeunes héros de the Action doivent faire face aux vieux super-vilains amis de Loretta Follis.

Enfin, un des points forts de Hepburn, c'est l'expressivité : il ose exagérer les mimiques, les proportions, sans verser non plus dans la caricature car il aime, comme ses scénaristes, d'un amour sincère les super-héros, leurs costumes bariolés, ce mélange de noblesse et de grotesque, leur théâtralité aussi, ce mélodrame permanent. Tout est un peu too much mais pas plus que dans les autres comics du genre, sauf qu'ici, l'artiste peut lâcher ses coups : il n'est pas contraint par le fait que les personnages sont immortels et leurs fautes sans conséquences. Idem pour les décors, toujours très fournis mais jamais surchargés : Twilight City et Redport en particulier font l'objet d'un souci du détail qui les rendent crédibles, vivants.

Minor Threats peut-être, mais major comic book ! Vite un tome 3 (et un éditeur français pour traduire cette pépite) !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire