mardi 24 juin 2025

POISON IVY, TOME 5 : L'ORDRE DES CHEVALIERS VERTS (G. Willow Wilson / Marcio Takara, Mike Perkins)


POISON IVY, TOME 5 : L'ORDRE DES CHEVALIERS VERTS
(Poison Ivy #25-30 + Poison Ivy/Swamp Thing : Feral Trees)


- #25 (Ecrit par G. Willow Wilson, Joanne Starer, Grace Ellis, Gretchen Felker-Martin, Dan Watters / Dessiné par Marcio Takara, Haining, Brian Level, Ataghun Ilhan, Dani) - Ivy promet à Harley Quinn, Janet HR, Killer Croc de ne plus leur attirer d'ennuis et de faire de leur maison dans le marais un vrai refuge... 
... Par le passé, Poison Ivy affronte Batman à côté de la tombe de ses parents... Au début de son aventure, elle croise la route de deux cousins à la recherche de champignons hallucinogènes... Killer Croc fait une découverte dans le marais... Un pyrophile est convaincu que Ivy sème des indices à travers le pays pour le rencontrer...

Ce 25ème numéro permet de rappeler que Poison Ivy ne devait, initialement, durer que six puis douze épisodes. Et voilà qu'elle commence ici sa troisième année de parution. Quelle performance pour la première série consacrée à un personnage qui n'avait jamais eu de titre régulier consacré à ses aventures. Et quelle belle marque de confiance de la part de DC qui su donner sa chance au projet.

Pour fêter cet "anniversaire", comme c'est souvent el cas maintenant, on a droit à un épisode à la pagination plus conséquente et c'est l'occasion à la fois de faire le point mais aussi de produire un teaser pour la suite. G. Willow Wilson et Marcio Takara ne réalisent que le début et la fin du numéro, laissant à des invités le soin de "meubler" avec des récits courts de huit pages.

On y trouvera de l'anecdotique (le premier segment par Starer et Haining), du sans intérêt (celui par Ellis et Level) et du très bon (celui par Watters et Dani, de loin le plus réussi). Mais on a aussi droit à un morceau qui, franchement, me pose beaucoup de problème, pas tant pour son contenu, que pour sa scénariste, Tracy Felker-Martin (qui fait équipe avec Ataghun Ilhan, qui, comme les autres artistes, a déjà oeuvré sur la série).

Felker-Martin, je l'ai appris récemment, est un auteur transexuel qui s'est fait un nom avec ses romans d'horreur. Mais aussi pour ses déclarations honteuses sur J.K. Rowling à propos de laquelle elle a dit qu'elle voudrait l'égorger (à cause des propos "transphobes" de l'auteur de Harry Potter). C'est déjà pas glorieux, mais ce n'est que le début.

Car Felker-Martin a aussi estimé que les attentats du 11-Septembre 2001 étaient parfaitement défendables et que Ben Laden était un héros. Et là, c'est juste pas possible ! Mais apparemment ça ne dérange personne chez DC qui vient de lui confier une nouvelle série sur Red Hood... C'est une honte !
  

- #26-30 (Ecrit par G. Willow Wilson et dessiné par Marcio Takara) - Janet HR échappe de justesse à un attentat commis dans une grande surface à Gotham et revendiqué par l'Ordre des Chevaliers Verts, des écoterroristes qui ont érigé Poison Ivy comme leur leader. Sauf que celle-ci ignore tout de ce groupuscule et ne veut pas être mêlée à leurs horreurs.


Ivy convainc Batman de la laisser enquêter et démanteler l'Ordre. Mais pour protéger Janet HR, elle doit trouver un endroit sûr. Killer Croc lui raconte alors avoir fait une découverte stupéfiante dans le marais voisin de Gotham : une ville fantôme y est apparue ! Ivy s'y rend et juge l'endroit certes inquiétant mais assez sécure pour Janet.


Après avoir coincé des membres des Chevaliers Verts, Ivy apprend que leur prophète se trouve à Seattle. Elle doit donc laisser Janet et se rend sur place. Mais comment se déplacer à l'autre bout du pays quand toutes les polices vous recherchent pour être l'instigatrice d'attentats écoterroristes ? Le brouillard qui dissimule la ville fantôme de Marshview va l'y aider...
 

Et une fois à Seattle, Ivy va croiser une vieille connaissance avec lesquelles les retrouvailles vont être tendues...


Je crois qu'il s'agit du premier arc entièrement dessiné par Marcio Takara depuis celui qui avait débuté la série et l'artiste se montre en grande forme. Au sommet de son art, même. Toujours avec les couleurs magnifiques d'Arif Prianto, c'est d'abord cela qui m'a comblé dans ce cinquième tome qui vient de paraître en vf chez Urban Comics (dont ce doit être le dernier titre encore labelisé Infinite).

Takara a vraiment énormément apporté à la série et elle lui doit sans aucun doute une partie non négligeable de son succès. Quel "flair" de la part de Marvel de l'avoir laissé filer, vraiment, après ne l'avoir jamais utilisé autrement que comme un vulgaire fill-in artist... Ah, on peut dire que ce sont de vrais génies du management artistique !

Sous le crayon de Takara, Poison Ivy a ce mélange unique de séduction et de dangerosité, idéal pour camper le personnage. D'une certaine manière, elle est, moralement, l'égal d'une Emma Frost, jamais aussi passionnante que quand on ignore si elle va retomber du côté obscur ou si elle va vraiment se ranger.

Plusieurs scènes et planches mettent en valeur la plastique de Ivy sans l'hypersexualiser mais en valorisant son charisme, sa puissance. Takara sait aussi varier ses effets pour représenter les pouvoirs de l'héroïne, tout comme il la rend superbement expressive dans des moments plus ordinaires. Après tant d'épisodes, il la maîtrise totalement et c'est un régal.

Par ailleurs, le scénario de G. Willow Wilson offre du biscuit à Takara avec des décors variés (où se distingue la ville fantôme de Marshview), mais aussi des scènes plus généreuses en figuration quand l'intrigue se déplace à Seattle. Ou, surtout, quand Ivy fait la connaissance de deux colossales créatures, représentantes anciennes du Vert et du Gris, qui auront un rôle important dans le futur.

L'intrigue, parlons-en : Wilson développe simultanément deux pistes narratives. La première concerne ces Chevaliers Verts, qui donnent leur nom à l'album, une organisation écoterroriste qui se réclame de Poison Ivy alors même qu'elle ignorait leur existence et refuse de soutenir leurs actions. S'ensuit une enquête à la fois rapide et captivante, mais qui est amenée à se poursuivre dans les prochains numéros.

La seconde concerne cette ville fantôme subitement apparue dans le marais environnant Gotham, Marshview. La vie semble s'y être arrêtée en 1958 et là, c'est Janet HR qui mène les investigations, après que Killer Croc a découvert l'endroit. Wilson reste évasive sur ce qu'elle compte faire avec ces éléments mais gageons que ça va être accrocheur.

En passant, on assiste à un rapprochement à la fois romantique, drôle, touchant er inattendu entre Janet et Killer Croc. Ce couple peut paraître dérangeant (lui est un monstre, ancien criminel), mais Wilson rend la chose naturelle et semble surtout vouloir faire avec Croc ce qu'elle a réussi avec Ivy, le réhabiliter.

De son côté, comme vous pouvez le découvrir avec les planches qui illustrent cette critique, Ivy va croiser à nouveau la route de Bella Garten, la Jardinière, avec qui elle fut l'élève de Jason Woodrue, puis son amante. La tournure de leur relation prend une dimension très intéressante, la scénariste préparant à l'évidence des développements prometteurs.

De manière générale, ce tome 5 est vraiment le début d'une saison 2 pour la série (la saison 1 ayant été largement animée par le duel Poison Ivy-Jason Woodrue). On pourrait presque parler de nouveau point d'entrée à destination de ceux qui n'auraient pas lu les quatre premiers tomes et voudraient plonger à partir de celui-ci (même s'il est préférable de connaître ce qui a précédé).

Et puis c'est une transition nette vers le futur du titre, avec le retour de Bella Garten, mais aussi l'apparition de Marshview, des représentants du Vert et du Gris, de la romance entre Janet et Croc. Seule Harley Quinn est absente (à l'exception de deux scènes très brèves dans le #25) du sommaire. En tout cas, c'est superbement écrit, la mythologie de Poison Ivy grandit encore, la série n'en finit pas de monter en gamme.

J'ai souvent pensé que Poison Ivy était peut-être la meilleure série régulière de DC et, même si l'éditeur a une production très enthousiasmante, il est vrai que ce titre combine une vraie ambition comme dans le Black Label avec l'efficacité plus classique, normée, du catalogue traditionnel. C'est un peu le meilleur des deux mondes. Et la qualité, loin de baisser ou de stagner, est là, au top.
  

- POISON IVY / SWAMP THING : FERAL TREES (Ecrit par G. Willow Wilson et dessiné par Mike Perkins) - Une nuit, Ivy et Swamp Thing reçoivent un message de la forêt. Ils s'y retrouvent et commencent à chercher ce qui se passe. Traversant plusieurs embûches, ils suivent la piste d'une jeune femme au destin tragique...

En Octobre dernier, DC publie ce one-shot réunissant deux personnages qui ne pouvaient qu'être réunis, même si G. Willow Wilson s'en était jusqu'alors abstenu. Urban Comics a eu la bonne idée de traduire cet épisode (d'une quarantaine de pages) en supplément de ce tome 5 (alors qu'il sera absent du sommaire du tpb US).

Ne cherchez pas à quand il se situe dans la série, ce n'est pas précisé, et c'est d'ailleurs inutile. C'est une histoire à la marge. Si la scénariste reste la même, en revanche c'est Mike Perkins, qui avait déjà illustré une mini-série Swamp Thing (écrite par Ram V) qui se colle aux dessins. L'ambiance tranche complètement avec ce que produit Marcio Takara, tout comme l'ambiance de cette histoire.

Plus qu'une enquête, on suit la quête de Ivy et Swamp Thing dans la forêt, une nuit. Ils ignorent exactement ce qu'ils cherchent, pourquoi ils ont été convoqués par les forces de la nature avec lesquelles ils ont une relation spéciale. Mais c'est quasiment une sorte de trip initiatique où justement le décor s'en prend à eux, les malmène, les entraîne sur des fausses pistes...

Au cours de leur périple, ils croisent des esprits aussi égarés qu'eux, puis, progressivement, à mesure qu'ils se perdent et se réunissent, ils comprennent l'objet de leur quête. Elle se mêle au destin tragique d'une jeune femme elle aussi pourvu de pouvoirs semblables aux leurs, ayant fugué de chez elle, s'étant perdue à Gotham, puis devenue SDF s'étant réfugiée dans ces bois...

Le résultat est poignant. Wilson réussit jusqu'au bout à entretenir le mystère tout en parvenant à captiver le lecteur. Elle met en scène le duo Ivy-Swamp Thing de manière géniale, soulignant à la fois leurs points communs et leurs différences, leurs divergences aussi, tout en révélant petit à petit l'existence et le destin de la jeune femme. C'est à la fois envoûtant et déchirant, flippant et bouleversant.

Mike Perkins signe des planches magnifiques, habitées littéralement. Son trait sert magnifiquement ce récit, noir, cafardeux, énigmatique. On peut s'attarder de longs moments sur certaines vignettes où son sens des ombres et lumières époustoufle. C'est du grand art pour un numéro exceptionnel à plus d'un égard.

Une belle manière aussi de boucler un cinquième tome de très haut niveau.

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