vendredi 7 mars 2025

THE NICE HOUSE BY THE SEA #6 (of 12) (James Tynion IV / Alvaro Martinez Bueno)


Deux salles, deux ambiances. Pendant que les habitants de la maison de la plage complotent pour décider de la meilleure manière d'éliminer ceux de la maison du lac, ces derniers - en particulier Reg Madison et Ryan Cane - se mettent en tête d'aller rendre visite à leurs semblables pour tisser des liens amicaux. Ce, pendant que Norah et Max se retrouvent...


C'est le dernier épisode de The Nice House by the Sea avant un bon moment. A l'heure qu'il est, les fans sont dans le flou le plus complet puisqu'aucune date n'a été annoncée pour le retour de la série et son deuxième et dernier acte. Une situation qui trouble puisque pour The Nice House on the Lake, l'interruption avait duré six mois et on l'avait appris à la fin du 6ème numéro.


Mais James Tynion IV et Alvaro Martinez Bueno sont en situation de faire comme bon leur semble : leurs séries sont des cartons critiques (avec une flopée de prix glanés partout dans le monde) et commerciaux, et DC n'a visiblement pas l'intention de presser les deux stars pour préserver la qualité du titre.


Donc, en bref : il va falloir s'armer de patience. Et rien ne dit que, quand ça reviendra, on aura six ultimes épisodes en six mois. Déjà, les six premiers ont connu des retards (Alvaro Martinez Bueno est parti faire des dédicaces en Europe)... Je n'ai pas l'habitude de me formaliser sur ce point, mais là, je trouve que c'est un chouia abusé niveau planning.
 

Bon, ceci étant dit, il ne faudrait pas perdre de vue l'essentiel : la qualité du produit. Et ce sixième épisode est encore une fois magistral. Le récit occupe trois niveaux, trois actions parallèles : ce qui se prépare à la maison de la plage, ce qui se joue à la maison du lac, et ce qui s'échange entre Norah et Max.

Passons ça en revue : on le sait déjà, les habitants de la maison de la plage ne sont pas ravis 1/ de savoir qu'il existe d'autres survivants dans une autre maison car ils les considèrent comme des rivaux, une menace. Pourquoi ? Parce que, semble-t-il, Max, leur hôtesse, leur a promis des avantages et qu'ils craignent de les voir désormais partagés. Décision est donc votée d'éliminer carrément les voisins.

Dans la mesure où les occupants de la maison de la plage bénéficient de connaissances plus avancées grâce aux cadeaux que leur a faits Max (en particulier sur la régénération physique, le contrôle des éléments, etc), on se dit qu'ils ne vont faire qu'une bouchée de ceux de la maison du lac, tranquillement installés dans une existence paisible et hédoniste, malgré les drames traversés.

James Tynion IV souligne ce contraste dramatique en montrant Ryan et Reg échanger sur un projet : Reg a découvert qu'un passage était constamment ouvert entre les deux maisons et il pense qu'il est temps de se présenter aux habitants de la maison de la plage et de devenir leurs amis. Le raisonnement est logique : ils sont tous des survivants et a priori cela devrait les souder.

Mais le scénariste va plus loin dans ce malentendu en montrant les retrouvailles à l'écart de tout ça entre Norah et Max. L'épisode est entrecoupé par des mails envoyés jadis par Norman (avant donc sa transition pour devenir Norah) à Max. Il apparaît clairement qu'ils ont une relation amoureuse, que n'approuvait pas Walter, et qui s'est terminée brusquement et unilatéralement quand Max a disparu de l'existence de Norman.

Mais il devient aussi clair que, actuellement, Norah sait que Walter n'est pas mort, tout comme le sait Max. Norah sait que Walter comme Max ne peuvent mourir comme des humains, mais elle n'a rien dit à ses amis pour les conforter dans leur action. Max d'ailleurs ne se formalise pas qu'ils aient tenté de tuer Walter. Sa préoccupation est différente : l'équilibre est rompu, il faut le rétablir.

Attention, Max ne pense même pas à empêcher les habitants de la maison de la plage de mettre leur plan à exécution. C'est une expérience comme une autre et on verra ce qu'il adviendra, qui gagnera. Et les morts peuvent ressusciter avec la technologie alien de Max et Walter... En revanche, Max paraît vouloir épargner Norah à tout prix. Par remords ? Ce n'est pas clair, mais c'est fort possible.

Et le marché qu'elle lui propose à la fin de l'épisode comme la réponse de Norah a de quoi nous donner envie de lire la suite, quel que soit le moment où elle paraîtra. Tynion connait son métier et il le fait très bien. A sa manière, c'est un brillant manipulateur, comme Walter et Max - et ce ne serait pas le premier scénariste de comics à s'amuser cruellement avec ses héros et le lecteur, comme un vrai bon méchant sadique.

Visuellement, la série reste sur sa lancée : c'est aussi une expérience absolue, par un très grand artiste, Alvaro Martinez Bueno, et le résultat doit aussi énormément à sa collaboration avec Jordie Bellaire, la coloriste. Ensemble, ils réussissent à saisir le lecteur par un style radical, très audacieux, qui prouve qu'on peut proposer une mise en images hors normes sans braquer les fans.

En même temps, Martinez Bueno et Bellaire appliquent des formules simples, étonnamment simples : les scènes entre Max et Norah sont dominées par des camaïeux de bleus correspondant à la nuit et au temps pluvieux ; les scènes dans la maison de la plage sont rouges comme pour symboliser le sang qui s'apprête à couler mais aussi une sorte de fièvre assassine qui s'empare des habitants. Et les scènes entre Ryan et Reg sont les plus nuancées, comme pour signifier la bienveillance de ces deux personnages.

Le découpage est également très fluide, Martinez Bueno prenant soin de ne pas compliquer la narration pour mieux que le lecteur distingue les endroits, les personnages, les ambiances. C'est dans ce mélange de sobriété et de radicalité que The Nice House by the Sea trouble le plus. On est constamment entre deux feux : d'un côté, comme bercé par la tranquillité inéluctablement funeste du récit, et de l'autre, remué par les atmosphères contrastées.

J'espère quand même que DC ou les auteurs communiqueront assez vite sur le retour de la série parce que nous laisser ainsi dans l'expectative est un peu cavalier. Bien entendu, je serai là quand ça reprendra, mais ça va être long d'attendre quoi qu'il en soit...

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