jeudi 20 mars 2025

BATMAN AND ROBIN : YEAR ONE #6 (of 12) (Mark Waid / Chris Samnee)


Robin aux mains du général Grimaldi, Batman remonte facilement sa piste grâce au traceur sur la moto de son partenaire sur laquelle son ravisseur a laissé son nom. Grimaldi veut attirer Batman dans un guet-apens pour le neutraliser mais tout ne va évidemment pas se passer comme prévu...


Bon, tout d'abord, rappelons que le mois prochain il n'y aura pas de nouvel épisode de Batman and Robin : Year One. La série reprendra en Mai, le temps pour Chris Samnee de reprendre son souffle et pour Mark Waid de trouver du temps pour ses innombrables projets (le bougre écrit ce titre, Batman/Superman : World's Finest, Justice League Unlimited et DC vient d'annoncer la mini The New History of Dc Universe !).


Nous voici donc à mi-parcours de Batman and Robin : Year One, de quoi dresser un premier bilan de ce projet. En ce qui concerne ce sixième épisode, l'action est au rendez-vous : Batman se jette dans la gueule du loup pour sauver Robin kidnappé par Grimaldi et découvre que ce dernier fait pratiquer par des scientifiques d'atroces expériences sur des sujets humains dans un laboratoire.


Robin n'attend pas, de son côté, qu'on vienne le délivrer et prouve non seulement qu'il a de la ressource, héritée de ses années comme artiste circassien, mais aussi de la détermination, car non il ne prend pas son rôle à la légère, il est plus discipliné que ne le pense Batman à qui il rabat son caquet de manière tout à fait savoureuse.


Le tout se termine sur une scène haletante et très accrocheuse pour la suite. Beaucoup le disent et c'est vrai : depuis son retour chez DC, Mark Waid est en feu, il signe plusieurs séries (j'ai oublié Superman : The Last Days of Lex Luthor, dont la parution a repris après un long hiatus car DC avait publié le n°1 sur 3 sans attendre que Bryan Hitch ait terminé les planches des épisodes suivants) et il est inspiré.

L'éditeur le lui rend bien en lui donnant des artistes de premier plan, notamment Dan Mora, ou organisant ses retrouvailles avec Samnee ici. Si je suis tout à fait sincère, je dirai quand même que tout ce que produit Waid n'est pas d'une qualité égale : World's Finest m'a beaucoup frustré et j'ai lâché l'affaire après une vingtaine de n°, Justice League Unlimited me déçoit un chouia pour l'instant...

Mais il est indéniable que quand Waid fait équipe avec Samnee (et réciproquement d'ailleurs), c'est du tout bon. Samnee renoue avec un vrai bon scénariste (c'est-à-dire d'un niveau tellement supérieur à Robert Kirkman sur Fire Power). Et Waid va jusqu'à écrire un script dont l'histoire a été pensée avec son artiste. Il se passe quelque chose entre ces deux-là qui ne se passe pas avec les autres.

C'est du comics champagne, ça pétille, c'est jubilatoire. Au point qu'en vérité, à mes yeux, qu'importe l'intrigue. Je veux dire : ce que raconte Batman and Robin : Year One, c'est efficace, c'est plaisant, mais bon, le général Grimaldi, tout ça, en fait, je m'en fiche un peu, ça ne va rien révolutionner, c'est un méchant assez générique, qui manque de charisme, de dangerosité. Waid et Samnee auraient pu largement mieux faire.

Mais si je m'en fiche, c'est parce que mon vrai plaisir quand je lis les épisodes de cette mini série est ailleurs. Ou plutôt il est dans le titre même de cette mini. A la rigueur, quel qu'ait été le méchant, l'intrigue, peu importe. C'est vraiment la relation naissante entre Bruce et Dick, Batman et Robin qui fait des étincelles et qui est merveilleusement traitée.

On peut s'interroger à plein de niveaux sur Batman et Robin : le fait qu'un adulte enrôle un gamin dans sa croisade contre le crime, qu'il mette la vie de ce gosse en danger, qu'il exploite son chagrin et sa colère, que ce soit un milliardaire et un enfant de la balle, etc. Mais ce n'est pas le sujet ici.

Ici, ce qui compte, ce qui est mis en avant, c'est comment se construit le dynamic duo. Batman pense que Robin est bel et bien un gosse, et même un sale gosse : indiscipliné, casse-cou, insouciant. Il espérait un double de lui, plus jeune, et se rend compte que ce n'est pas le cas, Dick Grayson fait son deuil différemment.

Progressivement, mais c'est très sensible ici, dans cet épisode, Robin prouve qu'il n'est pas un gamin qui attend qu'on le tire d'un mauvais pas. Certes, il est intrépide, imprudent, impulsif. Mais aussi plein de malice, avec du répondant. Et discipliné. Une discipline différente de celle de Batman, apprise sur le dur, au cirque. 

Et il est résolu, déterminé à assumer son rôle de Robin, car, comme Batman cette fois, il ne veut pas que le drame qu'il a vécu, d'autres innocents l'endurent. Robin l'explique simplement à Batman : ils ne sont pas pareils, mais ils peuvent être complémentaires et cela fera leur force. Ils partagent l'essentiel (rendre la justice), même si leurs méthodes divergent.

Pour que cet échange soit efficace, il ne suffit pas qu'il soit bien écrit. C'est important qu'il le soit parce que la scène est cruciale. Mais si le dessin ne suit pas, ça tombe à plat, c'est un cliché. Et Samnee trouve toujours le bon angle, la bonne expression, le bon éclairage, pour valoriser le texte de Waid. Tenez, regardez la dernière page illustrant cette critique et examinez le visage de Bruce...

... Vous y êtes ? Alors vous comprenez ce qu'est un super dessinateur. Ce n'est pas un type qui cherche à vous en mettre automatiquement, systématiquement plein la vue, même si Samnee en est capable (voir le monstre que se coltine Batman sur la deuxième page d'illustration). Non, un bon dessinateur de comics, c'est un narrateur.

C'est-à-dire quelqu'un qui va raconter l'histoire en images, comme un orchestrateur avec une partition, en transcrivant pour chaque instrument la musique. Et c'est ce que fait Samnee. Sa narration graphique est musicale : les notes sont appuyées où et quand il le faut, ni plus, ni moins, et c'est pour ça que ça sonne si juste. Parce que ça arrive au bon moment, de la bonne façon.

C'est pour ces moments-là que Batman and Robin : Year One est une si chouette lecture. Pas franchement pour son intrigue, ni son méchant (même si tout ça prendra certainement plus de volume, d'épaisseur, de tension dans le second acte de l'histoire). Mais pour la justesse avec laquelle Waid et Samnee revienne sur les débuts de Batman et Robin, avec les doutes, l'humour, l'angoisse, l'action, etc.

*

P.S. : Et c'est aussi pour ça que le choix d'Urban Comics de proposer cette mini en deux tomes est complètement con : évidemment, c'est pour gratter un peu de pognon, mais ça va complètement à l'encontre du projet. Cette histoire est d'un seul tenant, elle n'est pas en deux parties. Urban ne coupait pas en deux les mini en 12 n° de Tom King, et quand ils l'ont fait avec The Nice House on the Lake, c'était absurde.

Donc, sauf si vous n'avez aucune patience ou êtes nul en anglais, je vous en conjure, attendez Décembre prochain et le recueil en vo avec l'intégralité des douze épisodes plutôt que cette vf absurde. Mais, quel que soit votre choix, ne passez pas à côté de Batman and Robin : Year One !

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