Vite filmé, pour un budget dérisoire, avec seulement cinq acteurs principaux, Pearl n'est jamais limité par ces nombreuses contraintes. Au contraire, le cinéaste tire parti du contexte pour livrer un long métrage qui va droit au but tout en entretenant une ambiance électrique et horrifique très efficace. Car vous l'aurez deviné, Pearl n'a pas toute sa tête...
Cette jeune fille vit dans un environnement particulièrement pesant, entre un père invalide et une mère castratrice, dans un coin isolé. Sa seule distraction, c'est le cinéma et le rêve qu'elle nourrit d'en faire un jour. Ainsi la voit-on se produire dans la grange de la ferme devant la vache, le mouton et le jars... Qu'elle finit par tuer d'un coup de fourche avant de le donner en repas au crocodile dans le lac voisin !
Bon, elle a donc un pet au casque, la petite, mais rien ne va vous préparer à la suite. D'autant que le récit esquisse une romance entre elle et le projectionniste, même si ce dernier n'a pas l'air très net non plus. Drôle d'idée en effet de montrer un film érotique à une gamine des champs puis de lui dire de but en blanc qu'il la verrait bien dans une production de ce genre...
Tout le petit génie du film réside dans l'attente : à quand Pearl va-t-elle griller un fusible ? En vérité, le drame éclatera de la manière la plus inattendue possible, sans même qu'elle en soit responsable, en tout cas directement. Mais ensuite c'est la glissade dans la folie la plus terrifiante et Ti West parvient magistralement à surprendre le spectateur en en faisant son complice. Un malaise prégnant s'installe et gagne tous ceux qui environnent Pearl.
Lorsqu'on regarde Pearl après X, la perspective est évidemment sinistre. Mais quand, comme moi, on l'a vu avant X, tout change puisque les références faîtes au passé de Pearl dans X prennent une tout autre tournure : il flotte alors un air de malédiction sur cette ferme, quelque chose d'inéluctable, de délicieusement dérangeant. Quoiqu'il en soit, l'entreprise de cette trilogie est fascinante et donne vraiment très envie de découvrir comment Ti West va aborder l'ultime volet avec MaXXXine, dont l'action se déroulera en 1985 (soit six ans après les faits survenus dans X).
Encore une fois, Mia Goth est extraordinaire : elle fait de Pearl une figure à la fois tragique, pour laquelle on éprouve de la compassion, et en même monstrueuse, qui suscite l'angoisse. Le dernier plan du film est déjà inoubliable quand elle est longuement saisie en plan-séquence, affichant un sourire crispé très perturbant. Le contexte est alors primordial, mais je ne vous le révèlerai pas.
A ses côtés, on reconnaîtra l'excellent David Corenswet dans le rôle du projectionniste et on savourera sadiquement le sort réservé au futur Superman de James Gunn...
Une série B diablement mordante et la confirmation du talent unique de Mia Goth, définitivement l'actrice la plus atypique du cinéma américain actuel.
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