samedi 5 juillet 2025

RESURRECTION MAN : QUANTUM KARMA #4 (of 6) (Ram V / Anand RK, Butch Guice)


1998. Rhea Binny meurt. Mitch Shellyest devenu un SDF et assiste aux funérailles de la femme qu'il a aimé sans se montrer.... A Samsara, son double lui explique pourquoi il a besoin du cube créé par Rhea pour exterminer Shohei Kagawa, le Gashadokuro, qui a acquis le pouvoir de voyager à travers l'espace-temps et décime le multivers...


Contre toute attente, on trouve encore une planche du regretté Butch Guice dans ce quatrième épisode de Resurrection Man : Quantum Karma, ce qui incite à penser que cette mini-série a été conçue très en amont pour qu'il y participe, même modestement, compte tenu de son état de santé. C'est une page encore une fois superbe et qui rappelle le talent immense du bonhomme.


Si je commence par cela, c'est parce qu'en vérité Resurrection Man, sous la plume de Ram V, parle autant des personnes qu'on a connues et qui ont disparues que de celles qu'on ne connaît pas et qui sont menacées. Pour Mitch Shelley, ces deux conceptions se mêlent et produisent une même souffrance puisque lui, à chaque mort, revient.


Jusqu'à présent, les ennemis de Mitch étaient bien identifiés : il y avait cet officier japonais, Shohei Kagawa, devenu un monstre après avoir consommé sa chair d'immortel, devenant le Gashadokuro, et puis il y avait Vandal Savage, qui acquit son immortalité à l'aube des temps de la même manière que Shelly découvrit son don de résurrection. 


Dans l'épisode précédent celui-ci, on a assisté à la rencontre en Kagawa et Savage, le premier toujours aussi affamé demandant à l'autre de lui faire goûter un morceau de sa chair immortelle. Savage, amusé à la perspective que Kagawa croise un jour le chemin de Shelley (tout en ignorant que ça avait déjà été le cas) accepta la requête.

Shelley continue d'échanger avec son double à Samsara, la limite de l'espace-temps et ce dernier évoque la transformation terminale de Kagawa à cause de Savage : il est devenu une créature capable de se déplacer dans le multivers et il le décime, monde par monde. Shelley est le seul à pouvoir arrêter ce carnage grâce au cube que conçut Rhea Binny.

Mais Shelley s'y refuse. Il estime avoir trahi la femme qu'il aimait et qui est morte depuis en volant ce cube. Il ne veut pas utiliser le cube, quel que soit l'enjeu. Et si l'ennemi le plus dangereux de Mitch Shelley n'était pas Kagawa, ni même Savage, mais son double multiversel ? Voilà qui relance l'intrigue de manière imprévue et aboutit à un twist à la fin de cet épisode où on renoue avec un personnage récemment exploité par Tom King...

Ram V a compris en reprenant Resurrection Man que le piège avec ce personnage était de l'écrire comme un énième super-héros. Il n'y a aucun moyen de créer un suspense avec un être qui ressuscite, le lecteur sait que, même s'il meurt dans une aventure, il reviendra dans la suivante. Ce qu'il faut faire, c'est le traiter pour ce qu'il est et creuser les questions autour d'un tel pouvoir.

Et quand un immortel devient poursuivi non pas par son adversaire désigné mais par son double, c'est toute la perspective du récit qui s'en trouve altérée. De fait, quand Mitch Shelley cherche le seul homme qui puisse lui permettre de (peut-être) échapper à son double, c'est-à-dire à lui-même au fond, celui qui peut l'aider est un spécialiste de l'usurpation d'identité.

Ram V continue de développer une intrigue passionnante, tortueuse certes, complexe assurément, mais captivante. Il ne prend pas le lecteur de haut, mais surtout, plus important, il ne le prend pas pour un imbécile en le confrontant à des questions nébuleuses. Au contraire, une fois une sorte de premier barrage passé, ce qu'on lit devient limpide.

Ce premier barrage, c'est essentiellement le dessin de Anand RK. Son style est toujours aussi particulier, et il peut rebuter. Mais ce serait dommage de ne pas produire un petit effort pour s'y accoutumer, parce qu'alors on a droit à des planches renversantes, à une imagerie unique. Si vous aimez sortir des sentiers battus, ne reculez pas.

Au-delà de ça, Anand RK traduit visuellement à la perfection le sens du récit de Ram V : les contours sont flous, imprécis, comme à travers une vitre martelée. Mais on peut comprendre qu'en avançant dans la vie éternelle comme Mitch Shelley, c'est ainsi qu'on voit le monde et donc le traitement graphique de l'artiste suit une logique esthétique.

C'est parfois très beau, parfois étrange, parfois laid. J'y vois du Francis Bacon quelque fois. Mais c'est une expérience fascinante, grâce aussi aux couleurs extraordinaires de Mike Spicer.

Comme l'est la lecture de Resurrection Man : Quantum Karma, assurément une des mini séries de 2025, un projet très audacieux mais remarquable.

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