jeudi 21 novembre 2024

AVENGERS, TOME 7 : L'ERE DE KHONSOU (Jason Aaron / Javier Garron, Ed McGuinness, Gerardo Zaffino, Geraldo Borges, Mattia de Iulis, Jan Bazaldua, Robert Gill, Szymon Kudranski, Francesco Manna)


- AVENGERS : L'ERE DE KHONSOU (Avengers #31-38)

Toujours coincé dans le passé, il y a un million d'années, Iron Man doit survivre à bien des tourments : il est traqué par les Avengers de l'époque, soumis à la tentation par Mephisto, confronté à son père Howard Stark (qui a scellé un pacte avec le démon)... 


Dans le présent, Namor rumine : il sait qu'il ne peut gagner seul contre les ennemis des mers dont il prétend être le protecteur. La même réflexion hante la Garde Hivernale russe pour vaincre les Avengers. Les vampires aux ordres de Dracula doivent aussi recomposer une nation sans être soumis à leurs hôtes. Phil Coulson rend des comptes à Mephisto à qui il doit prouver l'efficacité de l'Escadron Suprême... Et si la solution venait du ciel ?
 

En attendant, les Avengers doivent faire face à un nouveau problème venu d'un de leurs alliés : Moon Knight. A nouveau sous l'emprise de Khonsou qui l'investit d'une partie de sa puissance il s'en prend à Iron Fist puis Ghost Rider, puis Thor dont il vole les pouvoirs et les armes. Khonsou pense, ainsi équipé, être en mesure d'affronter et vaincre Mephisto dont il anticipe depuis la nuit des temps une attaque d'envergure multiverselle...


Dans un premier temps, Moon Knight remplit parfaitement ses objectifs mais la capture de Black Panther pose un problème : sa puissance, il la tient de ses ancêtres, il est le dernier d'une longue lignée de Panthères Noires et rien ne dit qu'en le tuant Khonsou récupérerait ses pouvoirs. Le dieu de la lune dirige alors son attention vers le nouveau porteur du Starbrand, sur lequel veillent Iron Man et Captain Marvel.


Captain America, She-Hulk et Blade organisent la riposte contre Moon Knight et son maître - s'il n'est pas déjà trop tard...


Il en aura mis du temps, Jason Aaron, mais avec ces épisodes, enfin, il délivre une saga digne de son rang et de la série Avengers. Alors, certes, une trentaine de chapitres pour que la fusée décolle enfin, c'était long, mais il n'y a pas eu que de mauvais moments (La Guerre des Vampires était quand même efficace, et le scénariste a semé des idées sur le point de germer). 
 

Toutefois, avec L'Ere de Khonsou (j'ai ainsi appris la traduction française de Khonshu), on a droit à une vraie collection de numéros dont la qualité est supérieure. L'arc central y est pour beaucoup, surtout parce que la série s'est (enfin !) trouvé un dessinateur capable d'enchaîner des chapitres de très haut niveau graphique, supérieurs en tout point à ce qu'on a vu depuis le début de ce run.


Pourtant, de ce point de vue, ça commence mal puisque l'épisode 31 aligne pas moins de six dessinateurs ! Le résultat tient plus du gloubi-boulga visuel que d'une production digne de ce nom, principalement parce qu'aucun des six artistes n'a un style unique. On passe ainsi du trait rugueux du vétéran italien Gerardo Zaffino à l'ultra-réalisme numérique de Mattia de Iulis en passant par les pages charbonneuses de Szymon Kudranski et de Geraldo Borges puis au graphisme plus fin de Robert Gill et enfin à l'insipide Jan Bazaldua.

Et tout ça pour nous raconter comment Iron Man, coincé dans la préhistoire, réussit à revenir à notre époque. Jason Aaron s'en sort avec une astuce franchement grossière et très providentielle, mais surtout on se rend compte, affligé, que ce voyage dans le temps de Iron Man n'a pas été mauvais, seulement mal foutu. Dommage.

Ensuite, on a droit à un épisode 32 qui s'intéresse aux vilains qui gravitent autour des Avengers : Namor, la Garde Hivernale, Phil Coulson, les vampires - ça en fait du monde. Aaron a au moins le mérite d'avoir, longuement, préparé le terrain et de justifier la motivation commune à tous ces individus : éliminer les Avengers, même si leurs raisons sont très différentes. Mephisto se montre de plus en plus présent, même s'il apparaît concrètement dans peu de de pages et donc de cases. C'est plutôt une présence menaçante, qui tire les ficelles dans l'ombre, mais qui s'impose comme le grand méchant du run de Aaron.

Ed McGuinness dessine-t-il l'épisode entier ? Pas encore cette fois-ci où Francesco Manna, bien brave, joue encore les pompiers de secours le temps de quelques pages (avec Blade et Black Widow qui quitte la série après un arc). Cela dit, les deux artistes signent un épisode très correct, mais bon, deux dessinateurs pour vingt pages, ça finit pas être lassant - et on se demande ce que fiche McGuinness.

Enfin, on rentre dans le dur avec l'arc sur Moon Knight. Bon, Aaron n'a pas fait dans la dentelle de calais depuis le début, et ça ne va pas changer ici. Mais il ne s'agit pas de transformer Moon Knight en adversaire des Avengers juste pour le fun. Si le scénariste choisit d'ignorer totalement le run de Jeff Lemire sur le Chevalier de la Lune (au terme duquel Marc Spector se débarrassait de Khonsou), à l'arrivée on a un récit très spectaculaire et trépidant.

Khonsou utilise donc à nouveau Moon Knight comme son soldat et il l'investit à la fois d'une partie de sa puissance divine - ce qui lui permet de flanquer des roustes anthologiques à Iron Fist, Ghost Rider mais surtout Thor (!) - et d'une mission précise. Pendant la majorité de l'intrigue, l'objectif de Khonsou est même défendable puisqu'il veut être prêt à en découdre avec Mephisto.

Les Avengers du coup apparaissent comme des parasites qui risquent de gâcher une opportunité unique. Toutefois, le point de bascule dans le scénario d'Aaron se situe avec la capture de Black Panther et l'impossibilité de lui voler ses pouvoirs, issus de sa lignée et non de nature divine, diabolique ou mystique. Khonsou cherche alors à voler le Starbrand et bien entendu, le lecteur ne peut le suivre puisque ça revient à tuer un poupon mais aussi parce que ça trahit autre chose...

Et cette autre chose, c'est à la fois la soif de pouvoir de Khonsou qui en veut toujours plus et cherche surtout à instaurer son règne sur l'humanité. Il est donc question d'abattre Mephisto mais pour des motifs moins nobles qu'apparents. Le récit s'emballe dans sa dernière ligne droite où Aaron fait feu de tout bois, convoquant à la fois une bataille qui a eu lieu entre le dieu de la lune et les Avengers de la préhistoire (Khonsou n'a jamais digéré de ne pas faire partie du groupe), la force Phénix (ce qui annonce le prochain arc) et la rébellion de Moon Knight.

Impossible de ne pas être diverti par cet arc, d'autant que Javier Garron entre en scène. Comme je le disais plus haut, une des lacunes de ce run, c'était, jusque-là, de ne pas avoir un dessinateur régulier, capable d'enchaîner les épisodes de qualité. Il y a eu David Marquez, mais il n'est pas resté et, malgré ses atouts, il n'a pas non plus fourni une prestation extraordinaire. Ed McGuinness semble surtout avoir été mis en avant pour son attractivité auprès des fans - sa carrière parle pour lui, il est dans le métier depuis longtemps avec des hits à son actif. 

Javier Garron est un jeune talent, mis en avant par Marvel, mais qu'on n'attendait pas sur un titre aussi important que Avengers après qu'il ait brillé sur Secret Warriors ou The Legendary Star-Lord. Pourtant, l'artiste espagnol va littéralement s'imposer : ses planches sont un mélange de Gil Kane (pour l'expressivité corporelle des personnages), de George Pérez (pour le foisonnement des détails) et disons de Stuart Immonen (pour l'énergie de ses découpages).

Des comparaisons écrasantes, mais pourtant il suffit de lire ces épisodes pour voir qu'on a affaire à un vrai phénomène. Soudain, les scripts prennent vie, l'action est intense, l'envergure est immense, c'est bluffant. Il maîtrise les personnages comme s'il les dessinait depuis des lustres, soigne les décors, ne recule pas devant la figuration, et tout ça avec du style, de la personnalité. Il n'imite pas ses glorieux ainés : il dessine comme un patron. Et il ne va plus guère lâcher l'affaire, enquillant les prestations de très haut vol !

Du coup, quand Ed McGuinness, persévérant, revient pour l'épisode 38, on a l'impression qu'il a vu le travail du nouveau et que ça la piqué dans son amour propre. Alors il sort son arme préférée : des splash pages percutantes, pas très subtiles mais musclées. Une sorte de baroud d'honneur pour celui qui a peiné depuis le lancement de la série.

Bref, The Age of Khonshu, c'est vraiment épatant. Pas très fin (mais à ce stade, on a compris que Jason Aaron a choisi son camp) mais diablement entraînant.

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