Après avoir récupéré Uranium, Plastic Man annonce sa démission à la Justice League qui ne prend toujours pas au sérieux la dégradation de son état. Mais la mort des autres Metal Men va pousser le détective Chimp à mener l'enquête pour comprendre ce qui s'est vraiment passé tandis que Plastic Man renoue avec son fils...
Plus cette mini-série avance, plus le projet de Christopher Cantwell révèle sa force inattendue. Ce scénariste semble ne jamais être aussi bon que dans des histoires à la marge : sa production chez les indépendants en témoigne, avec de beaux succès critiques (Everything ; The Blue Flame), alors que quand il travaille pour les Big Two, la méfiance est de mise chez les lecteurs (voir son run sur Iron Man).
Mais avec Plastic Man No More !, il pourrait bien réussir à réconcilier tout le monde. En vérité, Cantwell me fait un peu penser à Al Ewing. Lorsque ce dernier bosse sur de gros titres (pour la gamme X-Men ; sur Immortal Thor), il s'essouffle vite, se sacrifiant pour suivre souvent les idées des autres, alors que lorsqu'il s'intéresse à des personnages plus ingrats (Loki ; Defenders), il fait des étincelles.
Là, Cantwell a pris tout le monde au dépourvu en annonçant vouloir raconter une histoire lorgnant sur e body horror avec Plastic Man, un super-héros réputé pour son côté loufoque. Et pourtant il en tire quelque chose de poignant et d'éprouvant sur un type littéralement en pleine décomposition, physique certes, mais aussi mental, poursuivant pour tenter de se sauver un plan complètement dément.
Ce pénultième chapitre insiste principalement sur ce point puisque Plastic Man a réussi à sauver Uranium, un des Metal Men, dont il compte se servir pour concevoir une bombe atomique qui remédierait à sa déchéance mais surtout sauverait son fils, qui possède les mêmes pouvoirs que lui et est donc susceptible d'être atteint de la même dégénérescence.
Le souci, c'est que pour récupérer Uranium, les autres Metal Men ont péri. La nouvelle n'est pas très bien accueillie par le Justice League, mais sans doute ne s'en formalise-t-elle pas non plus outre mesure dans la mesure où 1/ les Metal Men ne sont pas des membres de leur équipe et 2/ doit-elle se fier au récit de ce pitre de Plastic Man.
Un seul héros prend ça au sérieux : le détective Chimp, qui avait proposé son aide à Plastic Man au tout début, sans succès. Il va se rendre dans l'entrepôt où s'est déroulé le drame et procéder à une enquête minutieuse. Car il a beau être un chimpanzé doué de parole, habillé comme Sherlock Holmes, Chimp est le meilleur détective après Batman. Et ce qu'il va mettre à jour va totalement changer son regard sur ce à quoi est prêt Plastic Man...
Pendant ce temps, Plastic Man renoue avec son fils mais avec une idée derrière la tête... Christopher Cantwell utilise ces péripéties pour souligner que, même avec les meilleures intentions, on peut agir de manière stupide et criminelle. Jusque-là on éprouvait de l'empathie pour son héros et ce qu'il endurait. Mais ensuite, on est, comme Chimp, obligé de reconsidérer ses agissements de façon plus critique.
Et c'est cette ambivalence qui donne sa richesse au récit. Non pas pour enfoncer Plastic Man et le renvoyer à son passé de criminel, mais bien pour son attitude insensée, son irresponsabilité. Au début de l'épisode, sur une planche, avec en gros plan le visage de sa femme découpée en une multitude de cases, on lit tout le ressentiment qu'elle a pour ce mari qui a préféré sa carrière de justicier repenti à sa vie de couple et de famille. Désormais à l'article de la mort, il essaie de recoller les morceaux alors que lui part en morceaux et s'interroge de savoir s'il n'est pas trop tard.
Que reste-t-il à un homme dans sa situation ? Sûrement pas l'espoir d'un pardon, ou même de la compréhension de la part de ses proches. Mais un ultime essai pour que ceux-ci ne souffrent pas davantage à cause de lui, quitte à commettre le pire.
Les dessins d'Alex Lins se font encore plus intenses dans la façon de montrer qu'à la décomposition physique de Plastic Man répond son délitement moral. Ses images ne sont pas flatteuses, ni même belles : il faut l'accepter non pas en se forçant à y voir un effet de style mais bien comme la meilleure manière de correspondre au script. Faire joli à ce stade de l'histoire serait une fausse route. Il faut au contraire souligner la laideur pour indiquer que le héros s'est engagé sur un chemin vertigineux.
Jacob Edgar a peu de place pour s'exprimer, ce qui est à la fois ingrat et normal puisque les scène dont il s'occupe sont réduites. Mais comme depuis le début, c'est le contraste entre son style cartoony et celui plus dirty de Lins qui rend la lecture poignante. Lorsque Edgar met en scène la démission de Plastic Man de la Justice League, il souligne à bon escient le comportement désinvolte, méprisant même de la Ligue face à leur ami mourant. Et c'est d'autant plus fort que le trait rond et naïf du dessinateur donne à ce moment une allure a priori inoffensive.
Comment tout ça va-t-il se finir ? En la matière, on est dans une expectative semblable à celle éprouvée lors de la parution du dénouement de Strange Adventures de Tom King, Mitch Gerads et Evan Shaner, qui imaginait Adam Strange en potentiel criminel de guerre prisonnier de ses mensonges. Le terminus pour Patrick O'Brien a des chances d'être aussi surprenant.
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