Dans la maison du lac, on réfléchit tout haut à ce que Norah, Reginald et Ryan ont découvert dans la maison de la plage : comment expliquer à Max, quand elle viendra les visiter, l'absence de Walter ? Dans la maison de la plage, Oliver est sommé de manière brutale de s'expliquer sur la visite de Ryan, Reginald et Norah...
Je dois bien avouer que The Nice House by the Sea ne ressemble pas du tout à ce que je pensais. Et c'est tant mieux ! Car, reconnaissons-le, l'option la plus probable, c'était qu'on allait lire une histoire avec un nouveau décor (une maison près de la mer), des nouveaux personnages, bref quelque chose qui allait remettre une pièce dans la machine (une machine où les auteurs et l'éditeur ont gagné le jackpot)...
... Et puis James Tynion IV a déjoué les attentes : évidemment, on a droit à une nouvelle maison, de nouveaux personnages, mais c'est une vraie suite à The Nice House on the Lake, à laquelle elle est organiquement liée, et qu'il est donc indispensable d'avoir lu. Mais, et c'est le plus fort, la mécanique feuilletonnesque du projet est devenue essentielle : les deux séries sont connectées, mais surtout interdépendantes.
En vérité, The Nice House by the Sea est la saison 2 de The Nice House on the Lake. J'ai déjà abondamment comparé tout ça à Lost, mais plus ça avance, plus cette comparaison me paraît évidente. Non pas tant pour l'intrigue (pas d'île, pas de monstre, pas de voyage dans le temps...), mais pour la construction qui repose sur un développement narratif par l'addition de personnages densifiant le récit.
Vous remarquerez au passage que ce 4ème épisode est estampillé non plus du DC Black Label mais du label Vertigo, que DC a donc ressuscité (les trois épisodes précédents seront rétroactivement labelisés Vertigo pour leur édition en recueil). C'est une décision logique dans la mesure où ainsi The Nice House... ne figure plus dans une collection de mini-séries consacrées majoritairement à des histoires super-héroïques (le plus souvent hors continuité).
C'est aussi la volonté de DC de ramener un label qui a fait une partie importante de son histoire à partir des années 80, avant l'apparition des éditeurs indépendants comme Image, Dark Horse et d'autres : Vertigo était alors le refuge des auteurs qui pouvaient y écrire des séries adultes mais ne s'inscrivant pas dans le registre super-héroïques (même si, ensuite, certaines de ces séries sont devenues canoniques pour l'univers DC des super-héros, avec des personnages/séries intégrés comme Swamp Thing, Hellblazer/John Constantine...).
Alors j'en vois déjà qui se disent : "oui mais The Nice House..., ça n'aura jamais autant d'impact que Sandman !". Déjà, j'ai envie de répondre : on verra. Et même si James Tynion IV ne livre pas une oeuvre telle que celle de Neil Gaiman, est-ce que c'est grave ? (Déjà, si Tynion IV ne finit pas sa carrière avec des casseroles comme celles que Gaiman a au cul actuellement, ce sera déjà bien...)
Mais revenons à nos maisons. Le mois dernier, trois des éminents résidents de la maison du lac ont découvert l'existence de la maison de la plage et révélé à un de ses occupants la mort de Walter. De retour chez eux, Ryan, Norah et Reginald racontent leur périple à leurs amis et tout le monde va se mettre à phosphorer sur ce qu'implique ce nouveau statu quo - et le point le plus important est : que vont-ils raconter à Max au sujet de l'absence de Walter ?
S'ils lui apprennent qu'ils l'ont tué (puisque c'est ce qu'ils croient), ils seront, ils en sont sûrs, tués par Max. Mais Reginald se charge de nuancer la situation en résumant les relations entre Walter, Max et Oliver Landon Clay (le résident de la maison de la plage rencontré par Norah, Reg, et Ryan) : Walter était amoureux de Oliver qui, lui, ne l'était pas et qui a fini par changer d'université pour s'éloigner de Walter - qui a évidemment très mal pris la chose.
Maintenant, dans la maison de la plage, ledit Oliver est confronté par Richard, Hector et Quinn qui ont remarqué la présence des trois visiteurs a posteriori et ils veulent savoir qui c'étaient, et pourquoi Oliver le leur a cachés. Celui-ci refuse de répondre, estimant n'avoir pas de compte à rendre (du moins dans l'immédiat). Mais ses trois interrogateurs ne l'entendent pas ainsi et vont répliquer de façon terrible, à la fois pour le sanctionner et obtenir des réponses...
Cette réaction, représentée de manière très graphique par Alvaro Martinez Bueno et Jordie Bellaire, atteint ceux de la maison du lac, qui ignorent pourtant tout de ce qui se passe à ce moment-là mais qui le déduisent intelligemment : Oliver a tout fait pour que la visite de Ryan, Reg et Norah passe inaperçu, soit rapide et discrète. Mais quand ses compagnons l'apprendront, il sera inévitablement en danger (de facto c'est ce qui se passe déjà)...
... Et cela, Walter a pu le prévoir. N'étant plus en capacité de protéger celui qu'il aimait, la mission revient donc aux résidents de la maison du lac ! James Tynion IV noue donc un problème terrifiant où les deux espaces (les deux maisons) et la temporalité (ce qui se passe dans les deux maisons au même moment mais aussi ce que Walter avait pu craindre et voulu prévenir) unissent tous ces personnages.
Le tour de force actuel, c'est que, bien qu'on soit en présence d'une vingtaine de protagonistes (et même si la plupart de ceux de la maison de la plage soient pour l'heure complètement insignifiants), le scénario parvient à impliquer le lecteur, sans l'égarer. Certes, à moins que vous ayez une mémoire colossalement plus développée que la mienne et que vous reconnaissez tout ce monde d'un mois sur l'autre sans effort, malgré les dessins et les couleurs très stylisés de Martinez Bueno et Bellaire, vous serez probablement incapables de savoir instantanément qui est qui en dehors de cinq ou six personnages sur la vingtaine, mais...
... En se concentrant (pour l'instant) sur ceux qui pèsent le plus sur l'intrigue, ses ramifications, ses liens, ses conséquences (soient Ryan, Norah, Reg d'un côté ; Oliver, Hector, Quinn et Victor de l'autre), la série reste étonnamment abordable, compréhensible - même plus facile qu'elle ne l'était à l'époque de The Nice House on the Lake !
C'est donc très fortiche. Et incroyablement addictif. Qui aurait parié là-dessus ? Pas moi. Mais c'est parfois bon de se tromper.
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