Bruce Wayne a recueilli Dick Grayson après la mort de ses parents, acrobates dans un cirque. Le garçon a découvert que son bienfaiteur était Batman et suit une formation pour être son partenaire. Pour leur première mission ensemble, ils doivent récupérer un dossier volé au commissaire James Gordon par Double-Face...
Batman and Robin : Year One est un projet qui, dans son concept, s'inscrit dans plusieurs registres. Le plus évident, c'est celui des séries Year One : après Batman (par Frank Miller et David Mazzucchelli, un chef d'oeuvre), Batgirl (par Chuck Dixon & Scott Beatty et Marcos Martin), Robin (par Dixon & Beatty et Javier Pulido), Nightwing (Dixon & Beatty et Scott McDaniel), il était temps que le Dynamic Duo ait droit à des origines dûment racontées.
Ensuite, cette mini-série en 12 n° marque les retrouvailles entre Mark Waid et Chris Samnee, qui ont déjà à leur actif des réussites comme un run sur Daredevil, une mini Black Widow, un arc de Captain America - sans parler des couvertures variantes que Samnee dessina pour les épisodes de Shazam ! écrits par Waid.
Enfin, c'est le dream project de Samnee qui depuis plusieurs années poste sur ses réseaux sociaux un dessin par jour sur l'univers de Batman durant le mois d'Octobre dans le cadre de l'Inktober qu'il a rebaptisé le Batober. Samnee dessinant une histoire complète de Batman, en dehors d'un chapitre de Batman : Black & White, c'était donc inévitable.
Alors, oui, évidemment, revenir à la source, faire encore une histoire de Batman, avec Robin, ce n'est pas original. Il n'y a pas si longtemps (en 2021), Jeff Lemire et Dustin Nguyen avaient produit Robin and Batman qui se déroulait déjà aux débuts du tandem. Mais bon, qui, franchement, n'a pas envie de lire à nouveau un comic-book par Waid en Samnee ?
On n'assiste pas à la rencontre entre Bruce Wayne et Dck Grayson, pas plus qu'on n'a à nouveau droit à la scène où Dick découvre que Wayne et Batman, ou même au moment où Wayne accepte que Dick deviendra Robin et donc son partenaire. L'action démarre juste après ces instants fondateurs, lors de la toute première mission du dark knight et de son sidekick.
Sur le fond de l'intrigue, je me garderai de me prononcer. Ce n'est que le premier des douze épisodes, Waid met en place son récit, c'est accrocheur mais difficile de deviner où tout cela va mener, à quel point ce sera réussi. Le commissaire Gordon a perdu un dossier sensible, sous scellés, tombé dans les mains de Harvey Dent/Double-Face et il demande à Batman de le récupérer. Tout en réclamant qu'il ne lise pas ce que ledit dossier contient. Pourquoi ? On peut déjà phosphorer sur ce point.
Non, ce qui fait le sel de ce premier chapitre, c'est bien la caractérisation. Mais d'abord il faut comprendre qu'il ne s'agit pas vraiment d'une BD écrite par et dessinée par : la vérité, c'est que depuis Black Widow, la relation entre Waid et Samnee a changé. Samnee avait demandé à Waid de l'aider à construire une histoire sur Black Widow. De même avec Captain America (où le scénariste fut plus réticent, ayant déjà écrit sur ce personnage).
Encore cette fois, c'est Samnee, qui rêvait donc de dessiner une histoire de Batman et avait pitché plusieurs intrigues à DC, sans succès, qui a demandé à Waid son aide. Comme Waid a signé un retour gagnant chez DC, le projet s'est monté facilement. Après qui a eu telle idée ou telle autre, cela restera un mystère, mais on sait que Samnee comme Waid d'ailleurs voulait quelque chose qui se déroule dans le passé, aux débuts du Dynamic Duo, avec Dick Grayson en Robin.
Ce qui est intéressant de savoir, c'est que, pour Samnee, il est encore question d'évoquer la relation père-enfant (père-fils en l'occurrence), comme il l'avait fait dans Jonna and the Unpossible Monsters (co-écrit avec sa femme) où il parlait de ses filles. Et que Waid, lui, n'ayant pas d'enfant, s'est trouvé à écrire sur quelque chose qu'il n'avait jamais abordé de manière si directe. A travers Batman et Robin, ce sont donc des éléments personnels qui sont abordés.
Et Waid trouve la note juste tout comme Samnee. Il est évident que leur favori ici, plus que Batman, c'est Robin. Dick Grayson est encore ce gamin espiègle qui, comme leur Daredevil, évacue ainsi la douleur, la peine, le chagrin qu'il vient de traverser. Robin est décrit comme un gosse joyeux, un peu insolent, très insouciant, mais intelligent, vif. Les couleurs vives de son costume (Matheus Lopes a remplacé Matthew Wilson à ce poste) renvoient esthétiquement à ce tempérament quand Batman, figure paternelle de substitution, autoritaire, méthodique, vigilant, mais aussi dubitatif (il n'a jamais été père lui non plus) porte un costume sombre.
Samnee saisit chaque expression avec cette économie miraculeuse, les gestes, les sourires, le regard brillant de Robin sont un régal à observer. Le découpage est une autre prouesse, qui démontre une fois encore quel narrateur génial il est, avec cette manière incroyable de jouer sur le rythme, de guider le lecteur là où il le veut, d'accélérer, de ralentir, de faire monter la tension. C'est vraiment une leçon qu'il faudrait montrer à tous les dessinateurs de comics, débutants ou confirmés : à part Immonen, qui mieux que Samnee sait aussi bien raconter une histoire en images, "plusser" le script comme disait Alex Toth ?
Oui, vraiment, je ne vois pas comment on peut ne pas avoir envie de lire ça, ni comment on peut ne pas être ébloui par la complicité de Waid et Samnee. C'est ce genre de lecture qui vous rappelle pourquoi on aime les comics de super-héros.
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