vendredi 4 octobre 2024

THE NICE HOUSE BY THE SEA #3 (James Tynion IV / Alvaro Martinez Bueno)


Ryan Cane, Norah Jacobs et Reginald Madison ont franchi un portail activé par la foudre tombée sur une des sculptures entourant la maison près du lac et débarquent dans les environs de la maison près de la mer, accueillis par Oliver London Clay. Ce dernier n'est pas sûr que leur présence ravira Max et veut savoir comment va Walter...
 

Bon, on va être très honnête : ce n'est pas facile de se replonger dans The Nice House by the Sea après un mois, surtout quand ces dernières semaines ont été chargées en lectures. Mais c'était déjà le cas pour The Nice House on the Lake quand je l'avais suivie mensuellement. Nul doute que cette nouvelle mini-série sera encore plus appréciable à lire quand elle sera disponible en album(s).


Il faut dire que James Tynion IV aime les intrigues denses, avec beaucoup de personnages, beaucoup de mystère(s) : il exige de son lecteur une attention maximale. Mais le lecteur, sollicité par d'autres titres, doit aussi avoir de la mémoire pour retenir tous les noms, visages, caractéristiques de ces personnages. Même en prenant des notes comme je le fais avant chaque rédaction de critiques, même en ayant des pense-bête, c'est du travail.


Dit comme ça, je me rends compte que je ne vais pas vous encourager, en tout cas pas vous recommander la lecture de The Nice House by the Sea en single issue. Mais cela dit, vous n'êtes pas obligé comme moi de lire autant de séries mensuelles, d'être une sorte de bédéphage imprudent qui doit prendre des notes pour se rappeler de tout.


Et puis j'exagère un peu. Parce que le grand talent de Tynion IV, c'est quand même, en tout cas ici, de raconter une histoire captivante. Alors oui, il faut se préparer, mais non, ce n'est pas inabordable. Et ce troisième épisode rappelle à quel point cette suite à The Nice House on the Lake est bien plus qu'une suite.

En fait, moi comme d'autres, quand cette nouvelle mini-série a été annoncée, avons eu cette réflexion : "pourquoi ? Pourquoi de nouveaux personnages ? Une nouvelle maison ? Une nouvelle intrigue ? Pourquoi ne pas avoir repris là où The Nice House on the Lake s'était achevée ?". Et effectivement, ces questions sont légitimes. James Tynion IV aurait très bien faire une suite directe, surtout avec le twist final et vertigineux de sa première série.

Mais comme il a choisi de développer cet univers post-apocalyptique, avec une nouvelle maison, de nouveaux protagonistes, soit. Surtout que ces nouveautés sont dignes d'intérêt. Ce ne sont pas seulement des variations sur le même thème, le scénariste introduit des éléments vraiment étonnants qui montrent leur pertinence très vite. Et le rebondissement survenu le mois dernier ouvre grand les portes d'un récit tentaculaire et palpitant.

On a donc trois habitants de la maison du lac qui ont découvert un passage vers la maison de la plage. Tynion IV n'a pas choisi ces "explorateurs" par hasard : il y a Ryan Cane (qui était l'invitée de dernière minute de Walter, mal intégrée au reste des invités), Norah Jacobs et Reginald Madison (deux des plus anciennes relations de Walter - et dans le cas de Reg un des concepteurs de la maison). S'il devait bien y avoir trois personnages qui fassent ce voyage, c'étaient eux.

Et quand ils arrivent dans cette autre maison, ils sont reçus par Oliver Landon Clay, l'acteur. On découvre rapidement que Oliver, Norah et Reg se connaissent depuis longtemps. Ils avaient en commun d'être proches de Walter qui leur avait présenté Max (l'hôtesse de la maison de la plage). Ryan, dans cette configuration, joue le rôle du lecteur : elle intègre ces informations en temps réel, elle est le témoin, nos yeux.

Si l'épisode est ponctué par des moments en compagnie de Sam Nguyen (le photographe, résidant dans la maison du lac) qui feuillette un album photo de clichés de lui en compagnie de Reg, Norman (Norah avant sa transition, Walter et même Max), Tynion IV articule l'action autour des échanges tendus entre Norah, Reg et Olivier. Au centre de leur discussion : Max et Walter. Comment la première appréciera-t-elle la situation si elle la découvre ? Comment se porte le second ?

Evidemment, Norah et Reg (même si Ryan manque de gaffer) ne comptent pas révéler à Oliver (et encore moins à Max) que Walter est mort (comme ils le croient). Cela serait une catastrophe. Mais un tel secret peut-il être gardé longtemps ? Sûrement pas. Et Tynion IV applique la recette hitchockienne : il montre la bombe et le suspense consiste alors dans l'attente pleine d'effroi du spectateur de savoir quand elle explosera. Efficace.

Alvaro Martinez Bueno et Jordie Bellaire, qu'on ne peut plus décemment séparer pour évoquer la partie visuelle de la série, accomplissent un nouveau tour de force avec cet épisode. Non seulement encore une fois pour le brio du découpage (ah, ces doubles pages sont décidément insensées !), le soin apporté à la gestuelle des personnages, l'ambiance chargée tout du long. Mais surtout il y a une audace dans le traitement graphique qui distingue cette série de toutes les autres.

Cette audace, c'est précisément de ne pas être dessinée comme un comic-book traditionnel. Martinez Bueno et Bellaire, eux aussi, demandent un effort au lecteur. Les images qu'ils produisent sont parfois radicales, le traitement des couleurs est agressif, le trait du dessin est expressionniste. Ce n'est pas commun. Mais c'est possible grâce à la technique imparable d'un grand artiste et d'une grande coloriste, qui ne font pas ça juste pour faire stylé, mais bien pour coller au plus prés du script, de l'ambition toute entière de cette série.

Alors, oui, The Nice House by the Sea n'est pas une BD facile, pour toutes les raisons que j'ai pu citer depuis le début de cette critique. Mais 1/ elle mérite qu'on s'accroche et 2/ une fois dedans, on ne peut plus nier sa qualité, et surtout sa capacité à vous emporter.

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