samedi 28 décembre 2024

MOON KNIGHT : FIST OF KHONSHU #3 (Jed MacKay / Domenico Carbone)


Situation de crise pour Moon Knight et ses amis : le S.W.A.T. emmené par l'inspectrice Frazier, à la solde du dealer Achilles Fairchild, vient arrêter Marc Spector et sa bande dont la Midnight Mission a été neutralisée. Obligés de prendre la fuite, ils apprennent ce qu'on leur reproche aux infos et comprennent que leur position a totalement changé...


On peut dire que Jed MacKay ose tout sur Moon Knight : il a tué Marc Spector, a fait croire à son remplacement par le Suaire, en a fait le nouvel amant de Tigra, lui a collé un partenaire encore plus violent et mystique (Hunter's Moon), lui a donné un quartier général qui est un immeuble vivant... Et ce mois-ci il en fait un hors-la-loi !


Comment le scénariste si peu inspiré de Blood Hunt, si inégal sur Avengers et débattu sur X-Men, réussit-il à se dépasser sur Moon Knight ? Cela me rappelle, il y a quelques années, des discussions enflammées sur les scénaristes dont on reconnaissait les mérites sur des séries avec un héros solo alors qu'ils ne convainquaient pas sur des team books et inversement.


Bien entendu, il y a des auteurs à l'aise dans les deux catégories, mais je crois en vérité que la réponse est ailleurs. Un de ces scénaristes contestés était alors Brian Michael Bendis dont on louait le run sur Daredevil et conspuait celui sur New Avengers. Je crois que la même chose se passe avec Jed MacKay pour Moon Knight d'un côté, Avengers et X-Men de l'autre.


Mais encore ? Hé bien, Daredevil, même s'il a toujours été plus populaire que Moon Knight et a compté quelques grands runs et grands scénaristes à son service, n'est pas non plus une vedette comme Captain America, Spider-Man ou Iron Man. C'est un street-level hero, un peu à la marge, avec une personnalité complexe, des aventures tragiques.

Et c'est également le cas, en encore plus radical, pour Moon Knight. Et ces personnages-là, au fond, les éditeurs comme Marvel s'en fichent un peu, on laisse ceux à qui on les confie faire ce qu'ils en veulent, parfois pour le meilleur, parfois aussi pour le pire (comme c'est actuellement le cas pour DD). Les scénaristes se lâchent parce qu'ils savent que, le temps que ça durera, personne ne viendra leur demander de se calmer. Au contraire, on les incitera à l'audace, ce qui est rare.

Et cela se manifeste dans cet épisode de façon très nette, très brutale. Au fond, Jed MacKay, qui entame là son troisième run sur Moon Knight, sait qu'il faut mettre un grand coup de pied dans sa petite entreprise. Il a malmené son héros mais quelle est la crise ultime pour un justicier ? C'est de se trouver accusé d'être un vilain et de devenir un hors-la-loi et un fugitif, acculé.

Moon Knight est dans cette situation, et il y a entraîné sa bande. Par un twist savoureux, MacKay en fait ce qu'ils voulaient éliminer de leur quartier, des dealers vendant une drogue puissante, mélange de composés scientifiques et magiques. Le scénariste fait aussi preuve d'esprit de synthèse en cachant Moon Knight, Tigra et compagnie là où Warren Ellis et Declan Shalvey, il y a dix ans, avait envoyé Mr. Knight déloger un agent du SHIELD devenu fou.

Ce récit mené tambour battant et jubilatoire est dessiné par Domenico Carbone à qui revient la lourde tâche de passer après Alessandro Cappuccio, parti illustrer Ultimate Wolverine, et dont le nom et le travail restent attachés au run de MacKay depuis son début. Il ne restera pas (à moins qu'il ne revienne ponctuellement comme fill-in artist), mais il s'acquitte de sa mission ingrate avec beaucoup de talent.

Je ne connaissais pas cet artiste mais il livre une copie très efficace, avec un bon ratio de splash pages dans un numéro bourré d'action. Il n'a aucun problème à s'emparer de personnages qu'il découvre et la fuite des héros dans New York, via les égouts, est palpitante grâce à un découpage tonique, de belles compositions, des personnages expressifs.

Mais donc, ce qu'il faut retenir et qui justifie, si besoin était, que ce Moon Knight : Fist of Khonshu mérite vraiment le détour, c'est l'énergie qu'il dégage, la volonté de son auteur à ne pas se reposer sur ses lauriers et sa qualité visuelle. Par les temps qui courent chez Marvel, avoir tout ça sur un titre n'a pas de prix.

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