Batman et Robin sont prévenus par Harvey Bullock que Kai Edwards, l'ado qu'ils ont sauvé et mis à l'abri, a été trouvé mort et que les agents d'une société privée, LXR, réclament sa dépouille. Oracle se renseigne sur ces hommes sans rien trouver. Bruce dîne ensuite avec Scarlett Scott et remarque sa nervosité quand il propose de participer au financement de son affaire...
Ne tournons pas autour du pot : c'est vraiment excellent. Alors que la série Batman écrite par Chip Zdarsky touche à sa fin (pour laisser la place à une saga Hush 2 par Jeph Loeb et Jim Lee de deux fois six n°), Tom Taylor m'impressionne par l'aisance avec laquelle il a rebondi sur Detective Comics après son run sur Nightwing (gros succès, mais qui ne m'a pas convaincu).
Il est d'usage de dire que la série Batman est réservée aux aventures les plus spectaculaires du héros tandis que le titre historique Detective Comics, comme son nom l'indique, est spécialisé dans les enquêtes puisque Batman est reconnu comme le plus grand des détectives du DCU. C'est aussi là qu'il est le plus entouré par des seconds rôles, en soutien de ses investigations.
Ces éléments sont respectés par Taylor qui confronte Batman à un ennemi inédit et qui l'oblige à mener des recherches en s'appuyant sur des alliés dans le GCPD (la police de Gotham, ici représenté par l'inspecteur Harvey Bullock), Oracle (Barbara Gordon) et Robin (son fils Damian). Ce qui le préoccupe, ce sont des meurtres d'adolescents placés en maison de correction ainsi que les affaires d'une ancienne généticienne de Wayne Entreprises.
A priori, les deux dossiers sont distincts, sauf qu'on se rend compte depuis trois mois que, bien sûr, ils sont associés. Reste pour Batman à savoir comment, à quel point, à quelles fins. Taylor a construit son intrigue sur un parallèle astucieux : Bruce Wayne bénéficie d'une sorte de potion de jouvence au moment même où des gamins se font tuer.
Un cas de conscience le taraude : mérite-t-il de vivre mieux et plus longtemps, lui qui est déjà un privilégié quand un tueur rôde et abrège l'existence de jeunes gens ? De plus, le fait que Batman ne sache pas qui il doit attraper montre les limites de la cure dont il profite car s'il est au top physiquement, il est dans le flou complet pour le reste.
Cet épisode continue d'exploiter la narration scindée en deux parties de Taylor : on suit d'abord Batman en mission (ici avec Robin donc, plus Oracle qui assure la liaison devant ses ordis), puis Bruce Wayne prend le relais (auprès de Scarlett Scott, la généticienne). La mort des victimes révèle son abomination (les garçons tués sont exsangues) tandis que la situation de la généticienne est plus trouble que prévu.
C'est hyper efficace, admirablement écrit. La caractérisation est excellente, avec Batman en proie à un dilemme cornélien mais qu'il documente (en s'entraînant avec son fils, constatant effectivement l'amélioration de sa forme physique), mais aussi avec Bruce Wayne qui remarque le comportement de Scarlett Scott, couche avec elle (tout en sachant que c'est une mauvais idée, mais en exploitant cette opportunité).
Taylor est aussi un très bon dialoguiste qui glisse quelques mots d'esprit ironiques quand il le faut, à bonne dose (l'échange entre Batman et Oracle sur la nuit passée par Bruce avec Scarlett). Le lecteur a un léger temps d'avance sur Batman mais ce n'est pas gênant dans la mesure où le scénariste s'arrange pour qu'à la fin de l'épisode le retard du héros se comble graduellement.
Et puis quel plaisir immense de retrouver Mikel Janin au dessin ! J'ai toujours adoré sa manière de camper Batman durant le run de Tom King, mais ce formidable artiste semblait quasiment perdu depuis. Il a participé à un run sur Wonder Woman sans y rester, idem pour Superman and the Authority où il a dû être secondé, puis Justice Society of America où il recevait les scripts en retard et s'est barré avant la fin.
Là, on sent un dessinateur revanchard, qui a d'ailleurs décidé d'assumer aussi la colorisation de ses planches en plus des crayonnés et de l'encrage. Et il tient à nouveau le rythme. Il a renoué avec son meilleur niveau, avec un personnage qui lui convient, et une histoire qui l'inspire. Sa narration est limpide, avec un découpage très rythmé et aéré à la fois, de superbes décors, une ambiance prenante, des personnages bien définis.
Janin, surtout, c'est évident, a trouvé avec Taylor un partenaire aussi motivant que le fut Tom King, mais avec un registre différent, sans doute moins formaliste, moins contraignant - et le scénariste ne tarit pas d'éloges sur son artiste : c'est d'usage me direz-vous, mais honnêtement ça doit aussi changer Taylor d'avoir un dessinateur ponctuel, régulier.
C'est aussi pour ça que DC est tellement plus excitant que Marvel en ce moment : l'éditeur monte des équipes créatives performantes sur leurs séries les plus exposées, ça donne envie de les lire, de les soutenir, d'encourager d'autres fans à y (re)venir. Detective Comics fait indéniablement partie des sommets de DC All-In.
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