samedi 14 décembre 2024

AVENGERS, TOME 10 : LES PLUS PUISSANTS HEROS DE L'HISTOIRE (Jason Aaron & Mark Russell / Javier Garron, Greg Land, Ivan Fiorelli, Aaron Kuder, Jim Towe, Kev Walker)


AVENGERS : LES PLUS PUISSANTS HEROS DE L'HISTOIRE
(Avengers #57-62 + Avengers Forever #6-11 +
Avengers Forever Infinity Comics #1-4)


1943. Sebastian Szardos, le Soldat Suprême, lutte, grâce à ses pouvoirs magiques contre les forces occultes du Reich. Après avoir coulé un sous-marin, il échoue sur une île où l'ont repêché des soldats américains qui sont possédés à tour de rôle par une force maléfique. Il reçoit le renfort de Thor et Captain Marvel avant de retrouver ses compagnons, les Envahisseurs Secrets.


Japon, époque Edo (entre 1600 ap. J.C. et 1800 ap. J.C.). Captain America et Nighthawk se battent aux côtés du Ghost Ronin, l'esprit de la vengeance de cette époque, contre les sbires envoyés là par Méphisto. Dans un village voisin, c'est Echo/Phénix et Namor puis Thor et Valkyrie, rejoints finalement par Starbrand et Captain Marvel qui lui prêtent main forte.
 

1868, dans l'Ouest américain. Reno Phénix et Kid Starbrand poursuivent un train Shi'ar ayant capturé des esclaves humains avant d'engager une fusillade contre des outlaws à la solde de Méphisto. Echo/Phénix et Valkyrie se joignent au combat avant que Starbrand commette une terrible erreur face à Méphisto lui-même...


Pendant ce temps, de nos jours, c'est le Jour du Jugement dernier provoqué par les Eternels qui ont réactivé le Céleste mort servant de base aux Avengers. Hawkeye (Clint Barton) est soumis à cette épreuve de vérité... Puis Starbrand continue sa traque contre Mephisto en traversant les époques... Après quoi les Avengers d'aujourd'hui font la connaissance de leurs prédécesseurs d'il y a un million d'années grâce à l'intervention d'Agamotto...


De leur côté, Deathlock, Robbie Reyes (devenu l'Omni-Rider) et Tony Stark/Ant-Man continuent de sillonner les dimensions à la recherche de héros pour contrer les Maîtres du mal du multivers. Ils vont rencontrer successivement Vibranium Man, Iron Thor, le Carol Corps, les Steve...


C'est encore un gros volume que ce tome 10 de Avengers, l'avant-dernier de cette série. On peut y lire un arc en cinq parties de la série-mère, entrecoupé par un épisode tie-in à l'event Judgment Day (de Kieron Gillen et Valerio Schiti, paru en 2022), puis six nouveaux épisodes d'Avengers Forever. Panini a mis le paquet en ajoutant les quatre numéros parus en numérique sous le titre Avengers Forever Infinity Comics.
   

Bon, on va tout de suite se débarrasser du surplus : les épisodes d'Infinity Comics ne servent absolument à rien, on peut saluer l'effort de mise en pages de Panini pour qu'ils soient lisibles sur papier (alors que ces web-comics se lisent en scrollant sur une tablette normalement), mais en dehors de ça, c'est un gadget sans intérêt. J'espère néanmoins que ça paie bien pour l'artiste puisque c'est quand même Kev Walker qui a signé les dessins (pas son meilleur taf, loin s'en faut).


Le tie-in à Judgment Day tombe également comme un cheveu dans la soupe. Jason Aaron n'en a visiblement tellement rien eu à faire qu'il a laissé Mark Russell l'écrire. Hawkeye est donc soumis au jugement du Céleste réactivé par l'Eternel Druig et Clint Barton appréhende ça avec la décontraction qui le caractérise depuis le fameux run de Matt Fraction et David Aja, qui a remis l'archer sous les feux des projecteurs (quand bien même il n'a plus eu droit depuis à des histoires dignes de ce run). Niveau visuel, ça pique puisque Greg Land se charge des planches et c'est évidemment navrant pour les raisons que l'on sait (mais qui ne semblent pas déranger Marvel qui continue à employer ce tâcheron).


L'arc qui donne son titre à ce tome voit divers Avengers, principalement par paires, observer et/ou interagir avec des héros du passé. Jason Aaron s'amuse donc visiblement toujours autant, un peu à la manière d'un Geoff Johns (en plus rock'n'roll), à imaginer des justiciers improbables dans l'Histoire de l'humanité, tout en veillant à ne jamais les montrer à côté de contemporains célèbres.


L'exemple type, c'est Sebastian Szardos, le Soldat Suprême, qui, bien que ce ne soit pas clair, semble être un ancêtre de Margali Szardos, la sorcière qui recueillit Wanda Maximoff/Scarlet Witch. Sebastian, lui, détient l'Oeil d'Agamotto que lui a confié l'Ancien, qui formera plus tard Stephen Strange, et appartient aux Envahisseurs Secrets, qui, comme son nom l'indique, serait une division des Invaders (Captain America, Namor, Bucky Barnes, Jim Hammond, Toro, Union Jack, Spitfire) spécialisé dans les black ops.


Mais donc Aaron ne montre pas les Invaders et suggère même que Captain America n'a jamais entendu parler des Envahisseurs Secrets (où on trouve aussi un Ghost Rider, un Man-Thing, et un Blade). En revanche, le scénariste s'autorise plus de liberté avec le Ghost Ronin de l'époque Edo au Japon ou Reno Phénix et Kid Starbrand dans le far-west du XIXème siècle américain. Tout ça, à défaut d'être passionnant, est très divertissant et spectaculaire. Même si...


... Même si, en vérité, ça doublonne un peu avec la série Avengers Forever où le trio Deathlock-Robbie Reyes-Tony Stark remonte à la fois le temps et explore les dimensions pour former une armée au service du Premier Avenger. Dans les deux cas, il est question de rencontres avec des surhumains ayant été investi de pouvoirs aujourd'hui détenus par certains Avengers. 

La seule différence, elle est notable, c'est que, dans Avengers Forever, on recrute, alors que dans Avengers, on s'instruit au contact des héros qui ont agi dans le passé. Là où la question, réelle, légitime, se pose, c'est : est-ce qu'il y avait vraiment besoin de deux séries pour ça ? Pour moi, il aurait été plus pratique et plus concis d'alterner des épisodes dans le passé et dans le multivers.

Et ainsi, on aurait certainement échappé à des épisodes franchement pas captivants. Parce que, oui, Avengers Forever est toujours aussi faiblard : le titre semble n'exister que pour permettre à Aaron d'inventer des amalgames de plus en plus improbables et dont on apprécie mal en quoi ils peuvent menacer et Méphisto et ses Maîtres du Mal.

Jugez-en plutôt : Vibranium Man, c'est un mélange entre Black Panther et Iron Man avec des origines copiées sur celles de Superman (un exercice auquel s'était livré Warren Ellis dans Planetary, mais avec un tout autre brio), un Thor qui acquiert le poing de fer parce qu'il est incapable dans sa dimension de brandir Mjolnir, des Steve Rogers enfermés dans une prison qui doivent unir leurs forces pour trouver la sortie, une Carol Danvers devenue esclave du Club des Damnés, des tas de Tony Stark complètement à la ramasse...

Le seul intérêt de ce gloubi-boulga dans le multivers, c'est ce qui advient de Robbie Reyes, investi désormais d'une telle puissance qu'il n'est plus Ghost Rider mais l'Omni-Rider. Et ainsi augmenté, il risque d'oublier son humanité et de ne plus être qu'un esprit inarrêtable de la vengeance... Aaron aime ce personnage, comme il aime la mythologie des Ghost Rider en général (à laquelle il a beaucoup apportée). Mais tout ce qu'il y a autour de cette évolution est pénible à supporter avec ces héros fusionnés.

Heureusement, graphiquement, ça tient la route. Javier Garron est de retour pour les épisodes 57 à 59 et c'est toujours aussi éblouissant. Ce garçon est phénoménal : le script de Aaron lui réclame des décors, de la figuration, des batailles insensés, et il sort des scènes visuellement exceptionnelles. Il faut prendre le temps de s'arrêter sur certaines vignettes, pages, pour admirer le niveau de détail bluffant de l'artiste espagnol en même temps que le dynamisme de son découpage.

Mais cette débauche d'efforts a un prix et Ivan Fiorelli doit le suppléer sur les n° 61 et 62. L'italien n'est pas mauvais, mais il est quand même bien moins bon que l'espagnol. Son trait, plus anguleux, moins ouvragé, ne tient pas la comparaison, alors qu'il a une séquence essentielle à illustrer avec Starbrand contre Méphisto. Toutefois, je ne veux pas être trop sévère avec Fiorelli que Marvel exploite de manière assez médiocre, sans jamais lui confier de séries dès le début, toujours à jouer aux pompiers de service. Il a du mérite. Il lui reste à progresser.

Aaron Kuder s'acquitte, incroyable, de trois épisodes consécutifs (#7-8-9) sur Avengers Forever. Bon, le #7 n'est pas trop exigeant en matière de décors, mais quand même, saluons cet exploit. Jim Towe officie sur les épisodes 6, 10 et 11, avec toujours ce manque de personnalité (on pense à Marcus To, mais sans la même maîtrise dans les compositions et le storytelling en général). J'ignore qui s'est chargé des designs des héros du multivers, mais il faut bien admettre qu'ils sont tous d'une laideur accablante : dommage, ça aurait été bien de confier ça à quelqu'un de capable.

Comme le tome précédent, on trouve le temps un peu long, mais on garde espoir que le grand final du tome 11 soit à la hauteur. Jason Aaron a souvent de l'inspiration pour boucler ses runs (cf. Wolverine a the X-Men, Doctor Strange), donc on croise les doigts et on y croit fort.

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