vendredi 23 août 2024

ULTIMATE SPIDER-MAN #8 (Jonathan Hickman / Marco Checchetto)


Harry Osborn/le Bouffon Vert et Peter Parker/Spider-Man reçoivent la visite de Tony Stark/Iron Lad. Plus tard, Peter est accompagné par son oncle Ben et J. Jonah Jameson dans une boulangerie pour prendre le cadeau d'anniversaire de son fils Richard. Cependant, Wilson Fisk reçoit les hommes qu'il a décidés d'employer pour se débarrasser de Spider-Man et du Bouffon Vert...


Cette semaine, Jonathan Hickman est doublement dans l'actualité des sorties puisque Marvel publie le premier épisode de sa mini-série Wolverine : Revenge et le huitième de Ultimate Spider-Man. Et le moins qu'on puisse dire est que les réactions ont été très contrastées : Wolverine s'est globalement fait démolir tandis que Spider-Man continue de recevoir des louanges.


Je ne me prononcerai pas sur Wolverine : Revenge - après avoir hésité à l'acquérir, j'ai décidé de zapper car je n'ai jamais été vraiment passionné par les aventures en solo du griffu (hormis ses tout débuts avec Claremont/Buscema puis Hama/Silvestri, mais ça remonte loin). A vrai dire, je n'ai pas compris pourquoi Hickman s'était engagé là-dedans, pas plus que pour sa prochaine mini Avengers vs Aliens.


Mais cela témoigne de la position particulière qui est la sienne chez Marvel : l'éditeur considère le nom de Hickman comme un argument de vente, quelqu'un qui va immanquablement attirer le lecteur (et en plus pour Wolverine : Revenge, il est associé à Greg Capullo, de retour chez Marvel, tandis qu'il retrouvera Esad Ribic pour Avengers vs Aliens). Et non content de lui confier le griffu, les Aliens, c'est aussi lui qui donc écrit Spider-Man dans sa version Ultimate dont il a relancé l'univers.
 

Et là, je crois qu'une partie des compliments qu'il reçoit sur cette dernière série provient aussi du fait que le titre classique Amazing Spider-Man connaît depuis plusieurs années maintenant des runs médiocres (même si le personnage conserve sa popularité intacte, à l'instar de Batman qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse et visiblement les fans du tisseur achètent quelque soit la qualité du produit).

Voilà pour ce qui forme en quelque sorte la périphérie de l'affaire. Maintenant, venons-en au coeur de la série. Cet épisode est clairement un chapitre de transition avant les grandes manoeuvres : le dernier tiers est entièrement consacré à la présentation des sbires que Wilson Fisk a réuni pour éliminer Spider-Man et le Bouffon Vert. Est-ce que je spoile quoi que ce soit en vous disant qu'il s'agit des Sinister Six de cet univers ? Je ne crois pas - même si pour l'instant ils ne sont que cinq (à moins que le Caïd ne soit le n°6 ?).

A l'exact opposé, on a une séquence qui reprend directement où on en était resté le mois dernier, avec l'apparition impromptue de Iron Lad dans les locaux d'Oscorp alors que le Bouffon Vert et Spider-Man s'entraînaient l'un contre l'autre. C'est un moment intéressant où Tony Stark révèle que Spider-Man figure tout en haut d'une liste que le Créateur a tout fait pour empêcher la naissance (ce qui provoque la jalousie de Harry Osborn). Mais Hickman nous frustre en abrégeant cette scène en forme de "on se reverra plus tard"...

Je passe sur ce qui se déroule entre ceci et avec Fisk car je dois bien avouer que l'anniversaire de Richard Parker ne m'a pas emballé. C'est vraiment le ventre mou de l'épisode. Un épisode qui aurait sans doute gagné à être simplement confié à David Messina, plus à l'aise dans ce répertoire, d'autant que que dernier s'occupera des #10 et 11 (dans lequel on assistera à la première apparition de Black Cat et j'aurais adoré que Checchetto s'en charge).

Marco Checchetto fait néanmoins de l'excellent boulot comme d'habitude. C'est simplement que, quand on l'a à sa disposition, je trouve préférable qu'il soit utilisé pour les épisodes les plus spectaculaires, où son sens de la mise en scène pour l'action est incomparable. Là, il n'a rien pour le mettre particulièrement en valeur et je parierai que ce genre de numéro ne l'excite pas des masses (même si les pages de présentation de chaque Sinister Six sont un régal, avec quelques designs vraiment superbes).

Non, ce qui fait le prix de cet épisode, c'est justement la conscientisation du temps. Tout à coup, pour la première fois de manière forte, je l'ai intégrée. L'épisode sort en Août et l'action se passe en Août. Je l'avais déjà mentionné, mais chaque épisode se déroule sur un mois à chaque fois : huit numéros, huit mois écoulés pour nous mais aussi pour les personnages. Peter le fait d'ailleurs remarquer à Mary Jane : "Peux-tu imaginer que nos enfants vont avoir un an de plus ?" et elle répond : "Non. Je ne peux pas. Parce que ça signifie que j'ai un an de plus... Et toi aussi !".

Donc, qu'est-ce que ça veut dire, concrètement ? Que dans l'univers Ultimate façonné par Hickman, les personnages ne sont pas seulement plus vieux en général que leurs semblables dans l'univers classique Marvel. C'est qu'ils vieillissent. Et donc ils sont mortels. C'est fascinant de lire un comic-book où le temps est concret, défile, s'écoule vraiment. C'est comme un tabou qui saute : dans l'univers classique (aussi bien chez Marvel que chez DC d'ailleurs), les héros sont en somme éternels, leurs histoires sont publiés depuis 80 ans mais ils n'ont pas vieilli. Ils sont certes parfois morts, mais ils ont ressuscité surtout, donc ça ne compte pas. Bruce Wayne comme Peter Parker sont toujours quasiment les mêmes, ils n'ont pas vieilli ou sin peu, sans cheveux blancs.

Ce n'est pas le cas ici et en fait c'est là depuis le début du projet de Hickman : on sait que le Créateur sera libre un an après les événements de Ultimate Invasion et retrouvera ses alliés pour mener une riposte contre ceux qui l'ont piégé. Et tous les personnages, héros ou vilains, auront pris un an d'âge. Ce qui signifie que si, mettons, Hickman et les autres auteurs sont encore en poste dans, disons, cinq ans par exemple, ils écriront des personnages cinq ans plus vieux qu'aujourd'hui, dont certains seront peut-être morts, de vieillesse, de maladie, ou au combat.

C'est l'anti-thèse des X-Men qu'écrivit Hickman, qui avaient trouvé le moyen de vaincre la mort grâce aux Cinq et à la technologie Cerebro, qui étaient une réponse très futée à l'artifice des morts ressuscités de façon grotesque dans les comics. Là, le scénariste prend le contre-pied de ses X-Men en exposant ses héros au temps qui passe. Jusqu'à présent, ce genre de situation était cantonné à des récits alternatifs, des What if... ? (ou Elseworlds chez DC), ou seulement pratiqués chez des éditeurs indépendants. Mais appliqués à des personnages aussi populaires, édités par Marvel, c'est une toute autre affaire. Et ça modifie complètement la perspective du récit et la lecture de la série.

Encore une fois ce diable de Hickman réussit un tour de passe-passe épatant. Finalement, qu'importe si Wolverine : Revenge vaut le coup, Ultimate Spider-Man, c'est là où ça se passe pour les fans de l'auteur actuellement.

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