lundi 5 août 2024

MAXXXINE (Ti West, 2024)


1985. Los Angeles est le théâtre d'une série de crimes sataniques imputés à un assassin surnommé "le rôdeur de la nuit". Maxine Minx auditionne pour le fil d'horreur "La puritaaine 2" et convainc la réalisatrice, Elizabeth Bender, de la choisir malgré sa réputation sulfureuse d'actrice de films pornographiques. Elle partage la nouvelle avec Leon, qui tient un vidéo club, puis ses amis Amber James, autre professionnelle du x, et Tabby Martin, danseuse dans un peep-show, qui l'invitent à une soirée privée sur les hauteurs de Hollywood, mais elle décline l'offre.  


Pour arrondir ses fins de mois, Maxine se produit également dans un peep show où elle danse lascivement devant une vitre sans tain, ignorant qu'elle se donne en spectacle pour un client visiblement très crispé. De retour chez elle, Maxine trouve devant sa porte une enveloppe avec une VHS sur laquelle se trouve le film porno qu'elle a tourné six ans auparavant dans une ferme du Texas et dont l'équipe de tournage fut décimée. Puis elle reçoit un appel téléphonique d'u certain John Labat pour discuter de cette cassette vidéo.


Le lendemain matin, deux officiers du L.A.P.D., les agents Torres et Williams, sont appelés sur une scène de crime : le rôdeur de la nuit a fait deux nouvelles victimes, qui ne sont autres que Amber James et Tabby Martin. Maxine rencontre Labat qui lui donne l'adresse de son employeur qui souhaite sa visite sinon il usera de son immense influence pour ruiner ses ambitions professionnelles. Puis, de retour chez elle, elle est attendue par Torres et Williams qui souhaitent connaître son emploi du temps et la protéger. Mais Maxine est résolue à régler ses problèmes seule...


Avec Pearl et X, Ti West avait réussi un diptyque fameux que personne n'avait vu venir. Tournée pendant le pandémie de Covid, ces deux petits films, produits par le studio A24, rendaient des hommages appuyés et brillants aux films d'horreur des années 70 et au mélo d'épouvante des années 50. Le cinéaste et sa muse (et co-scénariste sur Pearl), Mia Goth, ambitionnait une trilogie pour boucler leur histoire.


Et voici donc le troisième et dernier volet : MaxXxine. L'action se déroule six ans après les événements de X, au cours desquels une équipe de tournage filmant un porno fauché dans une ferme du Texas appartenant à un couple de vieillards fut décimée par ces derniers. Seule Maxine Minx en réchappa, tuant pour cela les assassins de ses amis.


Nous voilà donc transportés en 1985 à Hollywood. Maxine est devenue une actrice de films pour adultes mais cela ne lui suffit toujours pas. Elle reste cette jeune femme obsédée par l'envie d'être une star de cinéma. Pour cela, elle passe une audition pour la suite d'une film d'horreur et décroche le premier rôle en impressionnant la réalisatrice, Elizabeth Bender, qui veut faire "une série B avec des idées A".


Mais très vite, le passé de Maxine la rattrape avec un détective privé qui veut la forcer à rencontrer son employeur tandis qu'en ville un tueur satanique sème la terreur... On attendait légitimement beaucoup de ce "climaxXx" avec sa reconstitution des 80's, le dénouement attendu des aventures de Maxine Minx, son intrigue avec un serial killer, bref une synthèse de tout ce qui avait si bien fonctionné dans X et Pearl.

Autant le dire, c'est une déception. Une partie de la réussite des deux premiers opus tenait à leur manque de moyens compensé par une inventivité ironique. Ti West se posait comme le nouveau petit génie de la bricole s'appuyant sur un personnage-concept fort et des références parfaitement digérées. Avec un décor à chaque fois quasi-unique, une efficacité narrative et visuelle à chaque plan, et une actrice habitée, c'était un mix réjouissant et tonique.

Et puis, presque inévitablement, MaxXxine a bénéficié d'un budget plus conséquent et a attiré des acteurs désireux de se frotter à cet univers de poche si singulier. Le succès, en terme de box office, a été indéniable (bien que son exploitation en salles soit restée limitée, le film est déjà disponible en VOD un mois après sa sortie). Donc, d'un point de vue financier, c'est une nouvelle bonne affaire pour le cinéaste et le studio.

Mais sur le fond, ça ne fonctionne jamais vraiment. Le début est très prometteur et West a soigné son ouvrage pour nous replonger dans une époque, multipliant les clins d'oeil cinéphiles (le pansement sur le nez de Kevin Bacon comme celui de Jack Nicholson dans Chinatown, le décor du Bates Motel de Psychose recyclé, la scène dans la boîte de nuit renvoyant à La Fièvre du samedi soir...). Il réussit aussi à convoquer l'industrie du porno (cf. X) et les tueurs en série (cf. Pearl). Tout est là (même si on ne peut s'empêcher de comparer avec la fabuleuse série The Deuce, qui représentait tout ça encore plus puissamment).

Pourtant, passé cette entame prometteuse, l'intrigue s'égare. Entraîner le spectateur sur des fausses pistes (en l'occurrence l'identité du rôdeur de nuit qui pourrait être l'homme qui veut rencontrer Maxine en la faisant chanter, voire Maxine elle-même) est accrocheur, sauf quand la vérité s'avère aussi brouillonne que ce qu'elle est ici. Là, pour le coup, Ti West se plante complètement au point que le final manque cruellement d'intensité et de perversité.

La raison ? Le cinéaste a voulu faire de Maxine une héroïne en action, qui prend l'initiative. Or, le personnage a toujours été défini par sa réactivité et cette nuance fait toute la différence. Tant qu'elle est sous pression (du détective Labat, des agents Torres et Williams, de la réalisatrice Elizabeth Bender), rien à redire : on retrouve la jeune femme qu'on a adoré dans X (et d'une autre manière dans Pearl). Mais lorsqu'elle prend les devants et se met à enquêter, à aller au-devant du danger, à entrer dans la gueule du loup (très connement d'ailleurs), ça ne va plus du tout. Tout ça se termine de manière grand-guignolesque. Le personnage perd toute son ambiguïté. Quel gâchis !

Non, vraiment, Mia Goth méritait mieux que ce terminus : l'actrice fait de son mieux, elle est encore souvent géniale, il lui suffit d'apparaître à l'écran pour mesurer son charisme si particulier, cette présence unique, comme lors du monologue de l'audition au début. Mais la suite ne rend pas justice à tout ce qu'elle a incarnée précédemment, cette espèce de folie survivaliste, d'ambition implacable, de force démente et de fragilité à fleur de peau.

Le casting qui l'entoure est composé de grands acteurs, ce n'est pas la question, mais ça ressemble surtout à une réunion de vedettes ou en tout cas d'interprètes trop prestigieux, trop bourgeois pour une saga bâtie sur des inconnus. Elizabeth Debicki est dans la caricature d'elle-même, grande et chic au point qu'elle fait tâche. Bobby Cannavale et Michelle Monaghan semblent sortis d'un autre film. Giancarlo Esposito comme Lily Collins paraissent être là pour s'encanailler (surtout Collins dont l'image est désormais si attachée à Emily in Paris). Le seul qui s'en sort mieux que les autres est Kevin Bacon, formidable en ordure pathétique.

On peut conclure en disant que MaxXxine est en quelque sorte victime de sa hype : trop attendu, désormais trop riche, le film n'a pas résisté à l'écrasante ambition qu'il visait. Espérons que Mia Goth comme Ti West sauront rebondir (pour elle, c'est assuré puisqu'elle figure au générique du Frankenstein de Guillermo del Toro, un cinéaste fait pour elle).

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