GRIM, VOL. 5 : FEAR THE REAPER
(Grim #21-25)
Sur l'île de la Vie, en brisant le pendentif que son père avait offert à sa mère, Jessica Harrow a découvert ce qu'il contenait : l'incarnation du Temps, sous la forme d'une jeune femme. Grâce à elle, Jessica explore différentes lignes temporelles où elle voit quelles vies elle aurait pu mener sans devenir une faucheuse. La seule constante dans ces réalités alternatives, c'est la haine que lui voue le Temps car elles sont toujours tombées amoureuses l'une de l'autre !
Au terme de tout, Jessica fait maintenant face à la Fin et dispute avec lui une partie d'échecs qui décidera du sort de l'humanité. Avant cela, elle réussit à éliminer Annabel devenue le Péché Originel avec l'aide d'Adira, soucieuse de se racheter. Mais avant qu'Adira ne s'empare du coeur noir du péché Originel, Eddie s'en saisit et est désintégré avec lui...
Stephanie Phillips conclut donc avec ce cinquième tome sa série, co-créée avec le dessinateur Flaviano. 25 épisodes en tout, ça peut paraître peu, mais la production a été ponctuée par des pauses, afin que l'artiste reprenne des forces pour chaque arc et qu'il n'y ait pas de fill-in. Sage décision car sans cela, le charme se serait évaporé.
Grim n'aura pas été sans défaut et, dans le tome précédent celui-ci, on avait l'impression que la série patinait sérieusement, comme si Stephanie Phillips se noyait dans ses concepts et ne savait plus trop où elle allait, comment terminer sa saga. Car Grim était certes originale mais cette originalité jouait parfois contre la série elle-même.
En fait, on s'aperçoit avec ces ultimes chapitres que, c'est en revenant aux basiques, que le scénario est à la fois le plus singulier et le plus efficace. Le projet s'était égaré en multipliant les seconds rôles, en voulant tous les développer aussi profondément que l'héroïne. Résultat : Jessica Harrow était quasiment reléguée au second plan dans ses propres aventures !
A cet égard, tous les flashbacks sur Eddie, Marcel, l'apparition du personnage du prêtre, des Parques, de la Vie, de la Fin, de Lilith Harrow, tout cela faisait beaucoup trop. Phillips consacrait des épisodes entiers à ces personnages, semblant oublier Jessica, tandis que l'intrigue sur le fait que plus personne ne mourait, que Annabel personnifiait le Péché Originel, ou que Adira avait trahi Jessica tout en s'en mordant les doigts complétaient l'embouteillage.
Phillips s'est sans doute rendu compte qu'elle avait perdu beaucoup de temps avec ces éléments et a choisi de resserrer la vis dans cette dernière ligne droite, où Jessica est aux premières loges et où tous les aspects encombrants de la série sont résolus fissa. Sans doute un peu trop, mais avec seulement cinq épisodes pour boucler, il fallait de toute façon aller vite.
Quatre de ces cinq épisodes sont encore très conceptuels : Jessica fait la connaissance de l'incarnation du Temps qui ne la porte pas dans son coeur car, quelle que soit la réalité vécue par Jessica, elles tombent amoureuses et leur relation est forcément tendue vue ce qu'elles incarnent. Jessica est devenue la Faucheuse ultime en couple avec celle qui personnifie le Temps. Autant dire deux forces contraires.
Et puis, pour décider du sort de l'humanité, où plus personne ne meurt, Jessica affronte la Fin. Celle-ci ruse pour que Jessica assume le rôle de feu son père, la Mort. Mais Jessica refuse. Reste à décider ce qu'elle veut vraiment être. Et son choix est plutôt logique : elle veut revivre, mais en redevenant mortelle. Cette solution lui apparaît la plus sage pour vivre sereinement son amour avec le Temps.
Je vous laisse découvrir qui remplacera la Mort, mais je trouve que Phillips a fait de bons choix. L'épisode 24 est particulièrement poignant, pratiquement entièrement composé de splash pages, résumant une vie d'amour, de bonheur, de chagrin, jusqu'à la vieillesse et l'attente sereine de la fin. Soudain, tous les concepts s'incarnent, paisiblement, et la série avec retombe sur ses pieds, élégamment, intelligemment, émotionnellement.
Le tout dernier épisode est une sorte de boucle, la forme que beaucoup de scénaristes veulent atteindre pour prouver que leur histoire est un éternel recommencement mais avec une logique forte. Phillips fait preuve de finesse, et même de malice, pour aboutir à un très joli dénouement, qui révèle peut-être le vrai motif de son projet : la transmission, la filiation, une espèce d'immortalité par la descendance.
Quoiqu'on puisse penser des hauts et des bas de Grim, celui qui n'aura jamais déçu et se sera révélé comme un narrateur assez phénoménal, c'est bien Flaviano. Encore une fois, il livre des pages splendides, que les couleurs de Rico Renzi subliment. A eux deux, ils ont élevé la série à des hauteurs rares.
J'ignore comment rebondira cet artiste, s'il va s'inmpliquer dans un nouveau projet en creator-owned qui mettent aussi bien ses qualités en valeur, ou si Marvel ou DC auront remarqué son talent et sauront l'exploiter avec la sagesse requise, mais j'espère qu'on relira vite du Flaviano, si possible toujours accompagné par Rico Renzi, parce que c'est un dessinateur exceptionnel.
Il va vous falloir être toutefois patient si vous attendez le trade paperpack de ce volume 5 car il ne sera disponible qu'en Avril 2026. Je trouve ça aberrant que Boom ! Studios attende autant pour collecter ces derniers épisodes car c'est largement suffisant pour que les plus curieux oublient cette sortie. Mais surveillez les sollicitations des éditeurs, d'autant qu'il est exclu que Grim soit traduit (Huggin & Munnin ayant visiblement lâché l'affaire).






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