lundi 7 avril 2025

FIRE AND ICE : WELCOME TO SMALLVILLE (Joanne Starer / Natacha Bustos)


Fire (Beatriz da Costa) et Ice (Tora Olafsdotter) sont envoyées à Smallville par Superman à la suite d'une de leurs interventions qui a tourné au désastre (par la faute de Guy Gardner, l'ex de Ice). Pour Ice, ce séjour à la campagne est une joie car elle aspire à une vie plus calme et songe même à arrêter sa carrière de super-héroïne.


Pour Fire, en revanche, rester dans ce patelin est un cauchemar car elle souhaite être reconnue pour ses mérites de justicière. Afin de s'insérer dans ce cadre, elles gèrent un salon de coiffure avec Tamarind, une styliste, et le soutien de Martha Kent. Ice se fait une amie de Rocky, une serveuse, tandis que Fire est draguée par Charlie, le frère paraplégique de Rocky.


Fire décide d'attirer des super-vilains de troisième zone à Smallville dans le cadre d'un stage de réhabilitation payé par la monétisation de ses vidéos sur les réseaux sociaux. Lorsque Ice l'apprend, elle est furieuse mais aussi embarrassée quand Jimmy Olsen vient pour en tirer un reportage à sensations. L'expérience ne tarde pas à virer à la débâcle quand Lobo, attiré par l'argent que pourrait lui rapporter la capture de ces malfrats, surgit.


Et c'est sans compter sur un masque maléfique provenant d'une île maudite autrefois visitée par les deux héroïnes (et la Justice League International) et la présence dans les parages d'un vieil ennemi de Ice...


Reconnaissons-le, les comics vraiment drôles (et pas involontairement) ne courent pas les rues. On peut rire aux éclats en relisant Justice League International ou Nextwave. Maintenant, on pourra aussi se fendre la poire en lisant Fire and Ice : Welcome to Smallville, publiée en 2024 par DC Comics, et fruit des efforts de la scénariste Joanne Starer et de l'artiste Natacha Bustos.
 

Pourtant, cette mini-série en six épisodes n'aurait certainement jamais vu le jour sans le coup de main de Tom King et Greg Smallwood, qui ont remis sous le feu des projecteurs Beatriz da Costa et Tora Olafsdotter dans leur reprise de The Human Target. Même si les deux histoires n'ont rien à voir, Smallwood s'est quand même fendu d'une superbe variant cover pour l'épisode 2 quand Kevin Maguire en produite une pour le premier chapitre (je les ai ajoutées à cette critique en fin d'article).


Joanne Starer a démarré son récit dans un n° spécial Power Girl mais vous n'avez pas besoin de l'avoir lu pour comprendre ce qui se passe ici. Tout est présenté, rapidement et clairement : Superman s'est interposé lors d'une énième dispute entre Fire et Guy Gardner après que Ice ait tenté de les calmer. Pour qu'elles réfléchissent à leurs actes, ils les envoient à Smallville.

Après avoir été hébergées par Martha Kent, elles louent un ancien salon de coiffure où elles embauchent Tamarind, une employée renvoyée suite à la fermeture de l'endroit. Ice est ravie car ce retour à la normale lui permet de souffler et d'envisager paisiblement à sa reconversion, lasse de la vie de super-héroïne et de ses drames incessants.

En revanche, Fire accepte mal ce qu'elle estime être une punition imméritée. Pour prouver qu'elle est une justicière digne de ce nom, elle entreprend d'attirer des super-vilains pour les affronter, sans se soucier du danger qu'elle fait courir aux civils. Rappelée à l'ordre, elle ruse : elle va encadrer la réhabilitation de malfrats grâce à l'argent de vidéos qu'elle poste sur les réseaux sociaux.

Evidemment, rien ne va se dérouler comme prévu : Lobo le mercenaire czarnien, se pointe pour arrêter les vilains et toucher la prime sur leur tête ; Ice se désole de tout ça et trouve du réconfort auprès de Rocky, une serveuse ; et Crave, un ancien ennemi de Tora, rôde dans les parages...

Le scénario de Joanne Starer fonctionne très bien durant les 3/4 de la mini série, mais l'auteur semble un peu débordée par le nombre d'obstacles qu'elle a dressés sur la route de ses deux héroïnes vers la fin, d'où un dénouement un peu expéditif. Mais avant cela, Fire and Ice : Welcome to Smallville est un pur bonheur et une franche rigolade.

La force du script tient en effet moins dans son intrigue que dans sa galerie de personnages que Starer adore faire interagir avec un humour vache. La présence aux côtés de Fire et Ice du robot L-Ron et de la styliste Tamarind fournit autant d'occasions de moquer l'égocentrisme de Beatriz da Costa ou les lamentations de Tara Olfsdotter.

Les dialogues sont particulièrement savoureux et fusent de toutes parts. On peut trouver ça un brin bavard, mais il me paraît difficile d'y résister. Starer a le sens de la répartie et se moque joyeusement des réseaux sociaux, du culte de l'apparence, mais aussi des sentiments trop idéalistes de Ice ou de la soif immodérée de reconnaissance de Fire.

Surtout, la scénariste parvient à pimenter chaque épisode d'éléments judicieusement exploités : je pense en particulier bien sûr à la visite de Jimmy Olsen, dont les transformations passées alimentent les échanges surréalistes, ou encore de Lobo, qui sème une joyeuse bien que brève pagaille (oui, parce que jusque-là c'était trop calme...).

Tous ces aspects farfelus bénéficient du graphisme de Natacha Bustos. La dessinatrice espagnole, qui a été révélée par son run sur Moon Girl and Devil Dinosaur (une revisite délicieuse de créations de Jack Kirby, lancée en 2015), fait feu de tout bois avec cette histoire en or, qui n'a pas besoin d'un banal traitement réaliste.

Et ça tombe bien car le style de Bustos possède une rondeur, une fraîcheur et une sorte de naïveté qui conviennent parfaitement. Tandis qu'elle illustre de manière apparemment innocente ces aventures, le ton sarcastique du récit est mis en valeur. Entre les deux héroïnes et les seconds rôles, il y a fort à faire, mais tout paraît facile sous le crayon de Bustos.

On appréciera aussi qu'elle représente Smallville comme une authentique bourgade du Kansas, le décor idéal pour que les événements improbables qui s'y déroulent prennent tout leur relief, en particulier quand Fire confine ses super-vilains ringards dans une grotte (gardée par Krypto) ou dans l'intérieur du salon de coiffure (mis à rude épreuve).

DC a dû être satisfait des critiques et des ventes puisque l'éditeur a commandé une suite à Joanne Starer. Hélas ! Natacha Bustos n'a pas rempilé, laissant la place au fade Stephen Byrne, ce qui me décourage quelque peu de lire When Hell Freezes Over (dont le premier numéro sort Mercredi)...

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Bonus, comme promis, avec les couvertures variantes des épisodes 1 et 2 :


Kevin Maguire


Greg Smallwood

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