vendredi 16 mai 2025

THE MOON IS FOLLOWING US #9 (of 10) (Daniel Warren Johnson / Daniel Warren Johnson & Riley Rossmo)


La Cascade semble avoir brisé les derniers espoirs de Duncan et Samantha de retourner dans notre dimension avec leur fille Penny. Pourtant Jedediah Swano et ses troupes viennent les sauver et couvrir leur fuite. Mais celle-ci devra s'accomplir au prix d'un énième sacrifice...


Sorti la semaine dernière, j'ai repoussé, lâchement, autant que j'ai pu la critique du pénultième épisode de The Moon is following us. Et, pour être franc, je n'ai plus qu'une hâte : que ça soit terminé, ce qui sera fait le mois prochain. Encore une fois, ce n'est pas une mauvaise mini-série, elle a de grandes qualités. Mais aussi d'énormes défauts.


La leçon que j'en tire, avant même sa conclusion, c'est que plus jamais on ne prendra à lire une série de Daniel Warren Johnson mensuellement. Là encore, ce n'est pas parce que l'auteur ne maîtrise pas ce rythme, mais tout simplement parce que ses histoires sont trop tristes et que ça devient une épreuve. Pire, peut-être : un système.


Je ne veux pas être trop sévère avec Johnson qui est au auteur complet parmi les plus originaux actuellement. Contrairement, par exemple, à Sean Gordon Murphy, qui est devenu une vedette comme lui mais sans talent de scénariste, Johnson a pour lui une vraie maîtrise narrative et graphique, avec des thèmes récurrents qui sont la marque d'un conteur singulier et passionnant.


Là où Murphy s'appuie sur un dessin très puissant mais qui affiche de plus en plus ses limites, sans jamais sortir de sa zone de confort, sur des scénarios prétextes et des développements a minima, Johnson, lui, a vraiment des choses à dire et il les dit bien, avec conviction et surtout sincérité. Toutefois, il me semble que la machine commence à tourner sérieusement en rond.

Parce que bon, après Murder Falcon et Do a Powerbomb !, ses récits sur le deuil, la famille et l'évasion par l'imaginaire le plus débridé, ça va, j'ai compris. Je ne peux décemment pas reprocher à un auteur de parler de ce qui lui tient à coeur, de le faire avec franchise, mais j'aimerai quand même qu'il dépasse tout ça au lieu de commencer à s'y complaire.

En fait, c'est un sentiment de malaise qui m'a poursuivi durant ces neuf épisodes (et je doute qu'il se dissipe avec le dixième). Malaise de voir Johnson ressasser toujours les mêmes motifs, jusqu'à la nausée, en me demandant sérieusement s'il n'avait que ça à traiter ou s'il racontait toujours, peu ou prou, le même truc parce que ça fonctionnait.

Et bon, autant ce genre de récurrence dans des comics mainstream, ça passe parce que, par essence, la répétition fait partie du mode opératoire ; autant dans les comics indés où on attend, à mon avis légitimement, que l'auteur dépasse ça, ça créé un soupçon sur une forme de cynisme de la part du créatif qui exploite plus ses lubies/phobies qu'il le ne cherche à se diversifier.

Je choisis cependant d'accorder le bénéfice du doute à Johnson, mais The Moon is following us marque une limite. Si son prochain projet en creator-owned repart dans dans cette direction, ce sera sans moi. La fiction peut être une thérapie, mais les lecteurs ne sont pas obligés d'y participer. Il convient pour un auteur de consulter un bon psy s'il a vraiment des choses à évacuer au bout d'un moment.

Cet épisode affiche à la fois tout ce qui est bon et mauvais, dans le sens de désagréable, à la lecture de cette mini série. Ce qui est bon, c'est la partie graphique, époustouflante, imaginative, radicale, énergique : Riley Rossmo signe les 9/10èmes du numéro et le fait avec une vigueur, une inventivité remarquables.

Le lecteur a son comptant d'images fortes mais aussi de storytelling superbement ouvragés. Rossmo n'a certes pas un style qui peut séduire tout le monde, mais c'était le partenaire idéal pour Johnson sur ce projet. Leur collaboration a été une des grandes attractions et la grande réussite de cette BD. Et rien que pour ça, ça valait le détour.

Mais en contrepartie, donc, je trouve qu'il y a quelque chose de profondément dérangeant dans la répétition ad nauseam de motifs narratifs, de thèmes abordés, de mise en scène dans les rebondissements. Etalé sur dix épisodes, c'est qui plus est beaucoup trop long, surtout avec un début aussi laborieux mais également avec une fin qui n'en finit plus.

J'ai découvert Johnson avec Murder Falcon et ce fut une claque, un bouquin vraiment magnifique, poignant, généreux, triste déjà mais très beau. Do a Powerbomb ! m'a paru déjà plus faible, même si le spectacle était jubilatoire. Mais The Moon is following us ressemble au combat de trop (allant jusqu'à l'autocitation grotesque). Dommage, malgré des instants magiques.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire