jeudi 29 mai 2025

WE ARE YESTERDAY, PART 5 (of 6) - JUSTICE LEAGUE UNLIMITED #7 (Mark Waid / Travis Moore)


Grodd et sa Legion of Doom envoient les membres de la Justice League Unlimited à différentes époques du passé et du futur après avoir investi la Tour de Guet. Puis Grodd s'empare d'un fragment d'Apokolips à même de lui conférer la puissance de Darkseid. Mais une surprise l'attend...


Vous voulez une bonne nouvelle à propos de We are Yesterday ? C'est bientôt fini. Enfin... Ce sera fini dans un mois, avec la parution de Justice League Unlimited #8 le 25 Juin. Maintenant, on peut passer aux mauvaises nouvelles, mais sans s'appesantir parce que, bon, on va pas s'énerver encore une fois. Promis, je vais rester calme.
 

En fait, j'aimerai vous reparler de Brian Michael Bendis. C'est drôle comme on se prend à reparler d'auteurs qu'on ne lit plus depuis un bail, non parce qu'on a cessé de les aimer, mais simplement parce qu'ils n'écrivent plus rien qui vous tente. Peut-être que c'est ce qui pend désormais au nez de Mark Waid qui, avec We are Yesterday, aura grillé un paquet de cartouches.


Or, donc, Bendis. Quand je l'ai découvert avec New Avengers, série que j'adorai tant, j'intervenais beaucoup sur des forums dédiés aux comics et j'étais quasiment le seul à apprécier Bendis et ses New Avengers. La plupart des autres honnissait ce qu'il faisait des Avengers, sa narration décompressée, son mépris de la continuité, son manque de sense of wonder...


Pourtant, ceux-là même reconnaissaient à Bendis la qualité de ses travaux antérieurs. Parfois il s'agissait de comics comme Torso ou Jinx. Parfois de son run sur Daredevil. Mais New Avengers a été la série qui a divisé les fans et parfois les a dégoûtés de Bendis. Après ça, ils n'étaient plus disposés à lui passer quoi que ce soit. C'était la chasse, non pas au dahu, mais au Bendis.

Qu'il se soit agi de Moon KnightDefenders, Invincible Iron Man, Les Gardiens de la Galaxie, voire Ultimate Spider-Man (quand Miles Morales a remplacé Peter Parker), il n'y eut plus aucune indulgence pour Bendis. C'était devenu l'auteur sur lequel on se défoulait quand on ne l'aimait déjà pas beaucoup avant. Jusqu'à la caricature, soyons honnête.

Et cela fonctionnait dans l'autre sens. Pour des fans comme moi qui le défendaient malgré tout, en appréciant ses Moon Knight, Defenders, Iron Man, Les Gardiens de la Galaxie, Ultimate Spider-Man, le soutien devenait une ligne à garder, quand bien même parfois cela ne le méritait pas. Caricature contre caricature.

Un reproche qui revenait de manière régulière, c'était que Bendis, s'il était capable d'écrire des séries avec un héros, ne savait pas écrire de team books. Et après tout ce temps, je m'interroge sur la pertinence de cette remarque : y a-t-il vraiment des auteurs plus talentueux pour écrire des séries de groupes que des séries avec un héros principal ?

Si oui, alors il me semble que Mark Waid n'est pas si loin de Bendis dans la mesure où à chaque fois que j'ai lu un team book qu'il a signé, il m'a paru nettement moins bon que ses séries avec un personnage principal. Seule véritable exception : son run sur Fantastic Four avec le regretté Mike Wieringo (même si son absence de traitement de la femme invisible est aujourd'hui criant).

Or, depuis son retour chez DC, qu'a écrit Waid ? Majoritairement des team books. World's Finest ? Un team book (Batman, Superman, Robin et des guests à la pelle). Justice League Unlimited ? LE team book par excellence (et par excès). Et les events qu'il a pilotés ? Des team books encore.

Ce ne serait pas le seul avec Bendis à être ainsi affligé. Hickman ne brille pas particulièrement quand il doit s'occuper d'un héros en tête (cf. Ultimate Spider-Man actuellement ne brille que par intermittences). C'est un auteur jamais meilleur qu'avec des groupes, voire des légions de personnages (Secret Warriors, Fantastic Four, Avengers, X-Men). 

Claremont aussi était comme ça, magistral sur des groupes. Byrne aussi. Tandis que Miller restera à jamais l'auteur associé à Daredevil. Il existe des exceptions : Grant Morrison a été également inspiré sur des héros en solo (Animal Man, Batman) qu'avec des équipes de héros (Doom Patrol, JLA, New X-Men). Mais prenez Tom King : pourquoi n'a-t-il jamais écrit de team book ? Sûrement parce qu'il ne se sent pas d'en faire un, préférant nettement se concentrer sur un protagoniste.

Je crois que l'erreur initiale de Waid avec JLU, c'est sa manière d'animer cette armée de super-héros. Hickman a bien cerné les deux manières de gérer un effectif aussi massif : dans Avengers, le nombre était crucial pour affronter des menaces colossales. Dans X-Men, au contraire, il choisissait, un peu à la manière de la Force Mission : Impossible, des experts à chaque épisode pour résoudre un problème spécifique.

Waid, lui, ménage la chèvre et le chou et n'aboutit à rien de concluant. Comme la Justice League n'a jamais eu de leader réel (même quand un scénariste désignait untel ou untel chef d'équipe), il n'y a pas l'équivalent d'un stratège à qui tout le monde fait confiance comme Cyclope chez les X-Men ou Iron Man/Captain America chez les Avengers. Du coup, Waid suggère que celle qui dirige les troupes sur le terrain, c'est Wonder Woman, mais sans que ce soit non plus une désignation officielle.

Les menaces auxquelles a été confrontée la JLU jusqu'avec ce crossover ne légitime jamais son nombre de membres. Il y a au bas mot des dizaines de membres qui sont inutiles ou en tout inutilisés, juste là pour faire de la figuration, un peu comme cette scène dans cet épisode avec Ralph Dibny vite neutralisé.

Quand à une configuration d'experts choisis en fonction des missions à accomplir, elle se fracasse tout seule puisqu'il n'y a pas de chef-stratège pour désigner qui serait de sortie. Red Tornado dispatche les héros mais à chaque fois ils sont dépassés, ce qui la fout mal pour celui qui est censé choisir les plus compétents.

Voyez quelqu'un comme Mr. Terrific (dont une mini-série, Year One, débute cette semaine) : il pourrait être ce leader-stratège-dispatcheur. Sauf que visiblement ça n'a pas frappé Waid. Scott Snyder avait promu le Limier Martien comme chef d'équipe (une idée valable vu l'ancienneté du personnage et ses pouvoirs), mais après Absolute Power, il est trop diminué pour remplir la fonction.

La facilité avec laquelle Grodd et sa Legion of Doom en provenance du passé parvient à mettre en déroute la JLU, à infiltrer sa Tour de Guet (décidément une vraie passoire après ce qu'on a lu dans The Question : All along the Watchtower), rend tout le concept de la JLU pathétique. Non pas en tant que telle mais par rapport à ce qu'en fait Waid (ou plutôt : ce qu'il n'en fait pas).

Pour cette fois, on pourrait au moins se dire que c'est bien dessiné parce que c'est au tour de Travis Moore. Mais Moore, en vérité, a le même problème que Clayton Henry : c'est un dessinateur trop propre, trop sage, trop lisse, pour exprimer la tension d'une telle intrigue, des moments que le script dispense.

Le découpage manque cruellement de nerf, de puissance. On a l'impression d'observer des personnages réellement perdus alors qu'ils ont traversé des mésaventures si nombreuses qu'ils devraient être moins désemparés que ça. Waid nous prive encore une fois d'affrontements qui éprouveraient aussi bien les héros que leurs adversaires et seul Grodd paraît l'intéresser suffisamment alors que la Legion of Doom est une machine de guerre dysfonctionnelle prompte à générer des péripéties.

Quand arrive la dernière page de l'épisode, ce n'est pas un sentiment positif qui nous étreint mais une forme de soulagement par anticipation car c'est bientôt fini. Mais n'en est-il pas de même pour la série elle-même ? Car comment se relever d'un crossover aussi pitoyable ? Comment Waid peut encore nous faire croire qu'il a les capacités à en faire une série captivante ? Même si les héros gagneront à la fin, je crains que ça ne suffise pas cette fois : leur scénariste, lui, sera vaincu.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire