Après avoir éloigné Princess Shark de Metropolis, Supergirl rejoint la forteresse de solitude de son cousin Superman pour effectuer sa ronde régulière dans la cité miniature de Kandor. Elle doit raisonner La-ron mais refuse, comme le conseil scientifique le lui propose, de le l'encadrer. Elle part ensuite rejoindre ses parents adoptifs à Midvale où une surprise désagréable l'attend...
Comme la couverture l'indique, cette relance de la série Supergirl intervient dans le cadre du Summer of Superman, qui a débuté avec un one-shot (dont j'ai parlé ici il y a peu) et avant le début de la série Superman Unlimited (par Dan Slott et Rafael Albuquerque) et d'autres parutions qui accompagneront la sortie du film de James Gunn (et se poursuivront ensuite).
Kara Zor-El n'avait plus eu droit à sa propre série depuis 2016, au tout début de l'ère Rebirth. Tom King l'avait toutefois remise sous le feu des projecteurs avec sa mini Supergirl : Woman of Tomorrow (qui vient d'être adaptée en film dont le tournage s'est achevé cette semaine). Et la cousine de Superman a été intégrée au titre Action Comics avec les autres membres de la Super famille.
On pouvait légitimement s'attendre à ce qu'elle récupère un mensuel quand le long métrage de Craig Gillespie sortira l'an prochain, mais DC a préféré donner le feu vert plus tôt en confiant le projet à Sophie Campbell. Celle-ci n'est pas une débutante : à 45 ans, elle a déjà dessiné et écrit pas mal de comics en indé et elle assume d'ailleurs les deux postes sur cette série.
Reste que passer après Tom King et Bilquis Evely n'est pas une mince affaire tant la réussite de leur collaboration a redonné du lustre à la kryptonienne. Mais Sophie Campbell a choisi, intelligemment, de ne pas marcher dans leurs pas tout en proposant une histoire qui explore des thèmes qu'elle a elle-même expérimentés, en particulier la quête d'identité.
En effet, avant d'être Sophie, elle était Ross Campbell et ce n'est qu'il y a dix ans qu'il est devenue elle et a changé de prénom et de sexe. Que les anti-trans ne s'emportent pas : Supergirl ne va pas devenir un garçon et sa série une sorte de manifeste sur la transexualité. Mais, en même temps, je pense qu'en sachant le parcours de l'auteur, chacun aura déjà choisi son camp.
Campbell pose rapidement les enjeux qu'elle compte creuser : Supergirl a toujours vécu dans l'ombre de son cousin. Elle est même arrivée sur Terre après lui (car la capsule qui la transportait a mis plus de temps à la rallier). Et actuellement elle s'interroge sur sa place : doit-elle rester dans l'entourage de Superman ? S'en émanciper ? Et pour cela prouver qu'elle peut le faire, qu'elle peut exister en tant que Supergirl ?
Cela va d'autant moins de soi que dans le civil elle a adopté un nom, Linda Danvers, dont elle se demande si elle ne doit pas désormais le modifier, au risque que cela paraisse étrange. Et le comble de ses interrogations arrivera quand, de retour à Midvale, où elle a grandi avec les Danvers, elle découvre qu'une impostrice se fait passer pour Supergirl.
La situation devient encore plus compliquée quand Eliza et Jeremiah Danvers ne la reconnaissent même pas... En outre, lors de la séquence d'ouverture, on suit Supergirl à Kandor (la cité dans une bouteille abritant des survivants de Krypton) et le conseil scientifique lui demande de chaperonner un lycanthrope hors de contrôle. Ce qu'elle refuse, préférant trouver une nouvelle idée.
Campbell propose donc un portrait dense pour ce premier numéro : on a une héroïne qui souffre d'un manque de reconnaissance, qui a envie de s'affirmer (mais sans trop savoir comment), qui ne veut pas copier son célèbre cousin, qui est face à une usurpatrice... Mais pourtant, la narration est d'une fluidité remarquable, englobant tous ces éléments sans aucune lourdeur.
Cette fluidité se traduit aussi dans le dessin : grâce aux couleurs pimpantes de Tamra Bonvillain (habituelle partenaire de Dan Mora), Supergirl se pose là comme BD aux teintes légères. Le trait rond de Campbell, son découpage classique, son storytelling tonique, tout ça rend la lecture très agréable, enlevée.
La question qu'on peut se poser, c'est si cet équilibre entre des thèmes tout de même multiples et complexes et cette esthétique lumineuse, cette manière de raconter aérienne, peut durer et aboutir à une série qui dépasse son côté gentil, un peu "girly". Le mélange n'est pas du tout choquant, mais peut dérouter.
Ce qui est certain en revanche, c'est que les titres rattachés à l'univers de Superman ont tous ce côté lumineux, solaire, sans occulter leur part d'action, de drama. Et donc cette Supergirl ne dépareille pas. Sophie Campbell, en tout cas, ne manque pas d'aplomb ni d'ambition et c'est ce qu'il faut pour que sa série perdure (chose qui n'a jamais été facile pour les kryptoniennes, comme l'a prouvé l'annulation récente du titre Power Girl).
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