SUPERMAN : HOUSE OF BRAINIAC
(Action Comics #1064-1066 ; Superman #13-15 ;
Superman : House of Brainiac Special #1)
Lois Lane s'est accordée une journée de repos dont elle compte profiter avec Jimmy Olsen, Siobhan McDougal et Clark Kent. Mais à peine leur séance de yoga dans le parc de Metropolis commencé que Superman est en alerte : une horde de czarniens et de drones de Brainiac s'abat sur la ville et la dévaste. La Super-family vient en aide à Superman mais elle est débordée - pire : Lex Luthor, Mercy Graves, Lena Luthor, Supergirl, Connor Kent, Lana Lang, Livewire, Metallo, Parasite, Kong Kenan, Otho-Ra et Osul-Ra sont téléportés dans le vaisseau de Brainiac !
Les czarniens et les drones de Brainiac se replient. Superman promet à Lois et Jimmy de ramener tout le monde sain et sauf, et pour cela, il va réclamer des comptes à Lobo, lui-même czarnien, à la morale plus que douteuse, donc peut-être complice de cette attaque. Ce dernier ignore pourtant tout, croyant depuis longtemps que ses semblables sont morts et il accepte donc d'aider le kryptonien. Reste à déjouer la garde des planètes unies qui a mis la Terre en quarantaine.
Cependant, à bord du vaisseau de Brainiac, Supergirl, Connor Kent et Livewire réussissent à quitter les cellules dans lesquelles Brainiac les a incarcérés. Ce dernier renvoie les czarniers, dirigés par le colonel Chacal, capturer Superman et Lobo qui trahit Kal-El. Supergirl enlève Luthor qui semble coopérer avec Brainiac et ils découvrent que celui-ci a réussi à sauver les habitants de sa planuète natale, Colu, en les miniaturisant.
Cependant, alimentés par l'énergie de ses prisonniers auxquels est venu s'ajouter Superman, Brainiac achève son plan en donnant naissance à sa reine. Cette version augmentée de lui-même qui le débarrasse des troupes du colonel Chacal puis s'en prend à Superman et ses amis. Brainiac peut ensuite passer à la seconde partie de son plan dont la pièce maîtresse n'est autre que Lena Luthor...
Ce crossover entre les séries Action Comics et Superman aurait pu être le troisième tome de la série Superman écrite par Joshua Williamson, mais DC a préféré ne pas faire de distinguo et c'est donc un volume à part, mais dont la lecture s'avère quand même nécessaire, ne serait-ce que pour comprendre l'amnésie qui a frappé Lex Luthor à la fin de cette histoire (et qui vient juste d'être guérie dans le Superman : Lex Luthor Special sorti récemment et dont j'ai déjà parlé).
En vérité, Joshua Williamson a longuement teasé ce crossover, dès le premier épisode de son run sur Superman avec une page annonçant de façon très suggestive ce qui attendait le lecteur pour les mois à venir. Le retour de Brainiac était donc programmé comme étant un climax après la première année de publication.
La dernière fois, si je ne m'abuse, qu'on avait vu Brainiac aux premières loges, c'était durant le run de Scott Snyder sur Justice League où il faisait partie de la Legion of Doom de Lex Luthor au service de Perpetua, la mère du Multivers. Et comme tous les vilains dans cette affaire, il n'en était pas sorti indemne quand l'event Death Metal s'était conclu.
Williamson a manifestement voulu lui offrir un retour en force. Ce qui constitue à la fois la force et la limite de ce crossover en six parties + un numéro spécial. Commençons par les mauvaises nouvelles et disons simplement que c'est digne d'un récit de Snyder : bourré d'idées, mais boursouflé, empesé, quasi indigeste.
Le scénariste aime que ça aille vite, qu'il y ait de l'action (beaucoup d'action). Ici, en plus, il a accès à tous les personnages possibles, comme la Super-family, plus Lobo, des czarniens en pagaille, des références au passé de certains personnages clés, et d'autres qu'il créé pour l'occasion mais qui serviront plus tard à l'occasion de l'event Absolute Power.
Tout ça, ça fait beaucoup, et ça fait même trop : à force de multiplier les protagonistes, finalement on voit assez peu Superman. La vedette ici, en dehors de Brainiac, c'est la Super-family et Lobo, le genre d'anti-héros qui vole la vedette à n'importe qui. Parce que Lobo est et reste cet énergumène inclassable, à la fois comique et amoral, violent et imprévisible, avec son look de biker extraterrestre improbable. C'est bien simple : quand il apparaît, les autres deviennent quasiment des figurants.
Williamson écrit les trois épisodes d'Action Comics et les trois de Superman, plus la majorité de House of Brainiac Special, en compagnie de Mark Russell. Le souci, c'est que le chapitre de Russell tombe littéralement comme un cheveu dans la soupe, n'ayant aucun rapport véritable avec le reste : il s'intéresse à la campagne électorale de Perry White pour la mairie de Metropolis face à un candidat anti alien qui profite de la crise en cours.
J'aime plutôt bien ce qu'écrit Russell, mais là, c'est d'une lourdeur sans nom, avec des allusions à Trump très maladroites. Et donc, surtout, on se demande vraiment ce que ça vient faire là, ça coupe le rythme, au pire moment. Steve Pugh dessine en plus cette partie en appuyant les effets comiques et ça aussi, c'est décalé mais pas très inspiré.
Ce numéro spécial est d'ailleurs assez fouillis : on y trouve un passage sur Amanda Waller qui découvre qui se cache derrière le mystérieux Council of Light qui veut l'aider à neutraliser tous les super-héros. L'identité de ses membres tombe complètement à plat, et en prime c'est très moche niveau illustration (par Fico Ossio). Il y a un autre passage avec Vril Dox, le "fils" de Brainiac, au dessin atroce (signé Mirko Colak).
Plus réussis : le segment concernant l'origine du plan de Brainiac et de son association avec les czarniens, qui bénéficie en outre du dessin d'Edwin Galmon. Et surtout, le plus important et le plus abouti, celui concernant Lena Luthor, jouet à la fois de son père Lex et de Brainiac et qui devient dans la dernière ligne droite un personnage décisif, bien servi par le dessin de Laura Braga.
On peut passer aux points forts : Williamson a toujours cette façon bien à lui d'orchestrer une histoire ambitieuse en sachant doser ses effets jusqu'à un final très percutant et surprenant. L'utilisation de Lobo est ingénieuse, le scénariste sait employer le Main Man dans toute son ambiguïté et sa puissance et il est un contrepoint très divertissant à Superman, vertueux à l'extrême.
Le rôle de Lex Luthor est également passionnant, d'une ambivalence parfaite, et ce qui lui arrive in fine est inattendu (bon, de ce côté-ci, le spoiler est inévitable : il devient amnésique, mais c'est très bien amené).
Autre bon point pour la partie graphique : Rafa Sandoval est présent sur les six épisodes du crossover, même s'il reçoit le renfort de Miguel Mendoça sur Superman 14 et Action Comics 1066. Mendoça a été meilleur que ça en d'autres occasions, on sent qu'il a été appelé en dernière minute et il a fait le choix de ne pas être encré, ce qui donne à ses planches un côté bâclé.
Sandoval est égal à lui-même, depuis qu'il n'est plus assisté par Jordi Tarragona à l'encrage : son trait est moins lisse, toujours aussi puissant, mais les détails l'empêchent donc d'enchaîner les épisodes sans un second artiste. Il maîtrise bien tous les personnages grâce à son expérience et son découpage sait être inventif, même s'il reste meilleur en étant simple et sobre.
Ce crossover s'avère efficace à défaut d'être imparable. C'est une étape entre la fin de la première année du run de Williamson sur Superman et la suivante, actuellement en cours. Si Lex Luthor est le personnage le plus impacté, ça suffit pour en rendre la lecture sinon indispensable, du moins utile pour comprendre donc son état récent.
Après ça, Williamson va devoir composer avec Absolute Power dans le prochain tome de Superman dont je vous parle tout bientôt...
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