samedi 21 septembre 2024

X-FACTOR #2 (Mark Russell / Bob Quinn)


Après l'échec total de la première mission avec la première équipe d'X-Factor, Rodgers Broderick promeut Havok nouveau leader de la formation. Mais le général Mills a découvert que quelqu'un avait trahi et soupçonne Polaris. Pour lui faire plaisir, Havok accepte d'accompagner cette dernière à un groupe de paroles pro-mutant...
  

Ce deuxième épisode de X-Factor confirme tout le bien que j'ai dit de la série écrite par Mark Russell. Mieux même : il me conforte dans l'idée que X-Factor est sans doute la meilleure série mutante depuis le lancement de From the Ashes - A New Beginning voulu par Tom Brevoort. Pourquoi ? Je vous explique.
  

La période Krakoa avait établi que tous les titres X étaient interconnectés. On pouvait ne pas tous les lire, mais tous les mutants étaient désormais rassemblés par un habitat et un mode de vie communs. C'était une nation, avec ses soutiens et ses opposants parmi le reste de l'humanité, dont on a vu l'ascension, la règne et la chute.


Tout ça a volé en éclats. On peut le déplorer, mais c'est ainsi. Même si Jonathan Hickman était resté l'architecte en chef, je ne crois pas qu'il en aurait été autrement, sauf peut-être que la fin de Krakoa aurait été mieux construite. En tout cas, maintenant, on est dans un nouveau statu quo. Les mutants ont renoué non seulement avec leur condition d'éternels parias mais ils se sont dispersés, n'ayant plus de cause et de refuge communs.


Dans cette configuration, il n'y a que deux manières pour les auteurs de mener leur barque : soit suivre à la lettre les ordres du nouveau chef, soit se démarquer en profitant que les personnages et le concept de leur série ne soient pas la préoccupation première du chef en question. Jed MacKay et Gail Simone, en charge de X-Men et Uncanny X-Men, sont aux avant-postes. Et les autres ?

Je crois que Eve L. Ewing et Exceptional X-Men sont moins exposés que Gail Simone et Uncanny X-Men avec lesquels ils ont en commun de mettre en scène de nouveaux mutants aux côtés de cadres célèbres. Geoffrey Thorne et X-Force est davantage dans la marge, comme en témoigne la structure narrative de la série et son casting. X-Factor est clairement l'électron libre de cette collection de team books.

Ce n'est pas faire injure à Havok, Xyber, Pyro, Frenzy, Cecilia Reyes et Granny Smite (une création originale du scénariste et du dessinateur) de dire qu'ils ne comptent pas parmi les mutants les plus populaires. Donc je pense que Mark Russell jouit d'une certaine liberté pour raconter ce qu'il souhaite, comme il le souhaite. Et il ne s'en prive pas comme en atteste le premier épisode.

Le mois dernier, le premier numéro d'X-Factor s'est achevé sur un twist digne d'X-Force quand Peter Milligan et Mike Allred reprirent le titre. Dès lors, pour le lecteur, il est évident que la suite sera imprévisible, d'autant plus donc que les protagonistes ne sont pas des vedettes intouchables. Et c'est précisément pour ça qu'X-Factor tire son épingle du jeu.

Tom Brevoort et ses auteurs ont opéré un retour vers les années 90, quand Chris Claremont a été écarté d'Uncanny X-Men : ça se voit avec la mise en avant de certains personnages (comme Gambit, Malicia, Jubilé), d'une esthétique (le retour des costumes avec des poches, des vestes), et une multiplication ahurissante de titres (rien que ces derniers jours, on a appris que Magik, Psylocke, allaient avoir elles aussi droit à leur propre série...). Dans ce contexte, X-Factor est le seul titre à s'en amuser sans se cacher.

Le look des membres de l'équipe, le retour de Havok en leader, sa romance ravivée (mais déjà en crise) avec Polaris, la présence de Frenzy, le fait que des mutants bossent pour le gouvernement pour persécuter leurs semblables, tout ça est très 90's. Mais Mark Russell écrit dans un registre de comédie sarcastique, en caractérisant Havok comme un idiot, Polaris comme sa contrepartie, et le scénario repose sur une mise en abyme, celle qui voit X-Factor comme l'attraction d'un show de real-TV.

Dans l'épisode de ce mois-ci, tous ces éléments convergent de manière très efficace et acide. Russell ne montre aucun sentimentalisme, pas plus pour les 90's que pour l'ère Krakoa. Son écriture est volontiers cynique mais ménage des scènes très drôles aussi (voire le pouvoir et la raison d'être de Granny Smite). Bref, on est à des années-lumière de la relance de Brevoort où tout est fait pour caresser le fan nostalgique dans le sens du poil en lui donnant ce dont il a envie. Peu de chance donc que X-Factor laisse indifférent, ni que la série soit impliqué dans de futures crossovers ou events : trop ironique pour ça.

Bob Quinn a fait d'énormes progrès pour dessiner cette série, je l'avais déjà mentionné dans ma précédente review. Mais cette amélioration ressemble au moins autant à un travail appliqué de l'artiste qu'au plaisir pour lui d'avoir un tel script à illustrer. Je crois que le talent appelle en quelque sorte le talent et Quinn est motivé par Russell. Son trait expressif, son découpage dynamique, en témoigne, avec cette maîtrise nouvelle. Ces deux-là étaient faits pour se rencontrer, sur cette série. Leur complémentarité est frappante et se distingue des autres tandems créatifs où chacun semble davantage se reposer sur ses lauriers (sachant qu'ils n'ont pas à se forcer avec le matériau dont ils disposent).

Est-ce que X-Factor séduira suffisamment de lecteurs pour durer ? Ou survivra-t-il jusqu'à une annulation précoce et dommageable ? Pour ma part, je conseille ce titre plus qu'aucun autre si vous aimez sortir des sentiers battus, ne pas vous contenter d'un produit formaté.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire