jeudi 23 janvier 2025

TIME WAITS #3 (of 3) (Chip Zdarsky & David Brothers / Marcus To)


Retour à la case départ pour Blue : Wyatt l'a ramené dans le futur où il va devoir répondre de ses actes devant un tribunal formé par la compagnie Eonco qui a démantelé TitanX, l'entreprise pour laquelle ils travaillaient à l'origine. A l'issue d'une parodie de procès, il est condamné à mort...


Ainsi s'achève Time Waits, même si évidemment je ne vous dévoilerai rien du dénouement de cette histoire. En revanche, ce que je peux vous révéler, c'est que Chip Zdarsky et David Brothers bouclent leur intrigue en beauté, au terme encore une fois d'un épisode à la pagination supérieure à celle d'un comic-book traditionnel.


Ce qu'il faut d'abord, toujours, rappeler, c'est à quel point les comics de DSTLRY sont beaux. Franchement, ils valent leur prix - qui, de toute manière, ne doivent pas être un contre-argument de vente puisque, vu la pagination, ils restent moins coûteux qu'un album franco-belge. Mais de la qualité du papier au format plus grand que la normale, en passant par le contenu, c'est du tout bon.


Ensuite, justement, à propos du contenu, DSTLRY se distingue par la diversité de leur offre : on a du polar, du fantastique, de la science-fiction, du western, de l'horreur... Et il semblerait même que, bientôt, l'éditeur s'aventure dans le registre super-héroïque puisque John Romita Jr. va dessiner une mini-série dans ce genre cette année pour eux.


Traitez-moi de naïf, mais je crois que la qualité ne peut que faire des émules et que les réussites d'un éditeur comme DSTLRY pousseront tous les autres à s'aligner, à se dépasser. Bon, peut-être pas Marvel, qui domine tellement le marché qu'il s'en fiche de continuer à proposer les trucs les plus improbablement mauvais de son histoire... Mais sait-on jamais ? Peut-être que les Marvelophiles les plus persévérants finiront par se lasser de leur merde actuelle.

Ce qui est certain, c'est que, lorsque DSTLRY est arrivé sur le marché, personne ne pouvait imaginer qu'il séduirait autant et aussi vite. Leur modèle économique et éditorial a pris le meilleur des indés tout en attirant de grands talents chez les Big Two - et ce n'est pas fini. De ce point de vue, Time Waits est une sorte de résumé parfait.

Chip Zdarsky achève actuellement son run sur Batman, David Brothers est un inconnu qui ne devrait pas le rester longtemps et Marcus To a choisi de délaisser X-Force pour se consacrer à ce projet. L'histoire est un concentré de SF et de polar parfaitement maîtrisé. C'est exactement ce que l'éditeur peut montrer de plus représentatif.

Ce troisième et dernier chapitre file à toute allure mais sans rien bâcler. Blue est ramené dans le futur, d'où il venait, pour répondre de sa rébellion contre la multinationale qui l'employait. Au tout début, il avait débarqué à notre époque dans un patelin pour y dérober des graines destinées à être exploitées par une grande firme. Mais, devant le bain de sang qui s'était ensuivi, il avait préféré se retourner contre ses collègues et rester sur place.

Il a trouvé l'amour, a adopté un garçon, s'est fait des amis. Et, à la manière malicieusement détournée d'une série noire, ce n'est pas son passé qui l'a rattrapé mais son futur... Tous ces ingrédients sont portés à ébullition dans ce dernier épisode où le héros doit faire face aux conséquences de ce qu'il a commis. On ne donne pas cher de sa peau, mais...

Mais, évidemment, Zdarsky et Brothers nous réservent encore quelques surprises, dans un récit toujours aussi riche en action et en coups de théâtre. Blue réussira-t-il à s'en sortir malgré tout ? A quel prix ? Jusqu'à la dernière page, les deux scénaristes ne ménagent pas leurs efforts pour donner au lecteur un divertissement de première classe, sans se contenter des clichés.

Il flotte même une sorte de mélancolie bienvenue dans cette dernière ligne droite. Mais surtout les auteurs ne se prennent jamais les pieds dans leur intrigue, ce qui n'est pas un petit exploit quand on traite des voyages dans le temps et des paradoxes qui vont avec. La rigueur de l'écriture complète le plaisir de la lecture.

Visuellement, Marcus To est irréprochable. Dessinateur sous-estimé en raison de son style exempt de tout effet tape-à-l'oeil, c'est un narrateur magistral qui trouve dans le format de cette BD une forme d'expression idéale. Il peut prouver, pleinement, à quel point il maîtrise son art, son découpage est d'une fluidité imparable.

Il est toujours délicat pour un artiste habitué aux super-héros de transformer l'essai dès qu'il en sort. Mais Marcus To a assez d'expérience et de talent pour s'imposer hors des héros en collants et des histoires explosives. Il insuffle de la vie aux personnages, de l'intensité aux situations, sans jamais en faire trop. De ce point de vue, il s'inscrit dans la ligne d'un Jorge Fornes (honteusement sous-utilisé depuis Rorschach, alors que, lui aussi, a des qualités que beaucoup de ses pairs ne possèdent pas).

Time Waits sera, comme toutes les mini-séries DSTLRY, traduite par Delcourt, qui a négocié les droits d'adaptation pour la France. C'est une excellente pioche car l'éditeur français soigne son ouvrage et vend à des prix raisonnables. Guettez la sortie de Time Waits et inscrivez-la sur votre wishlist : vous ne regretterez pas votre achat !

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