dimanche 19 janvier 2025

THE MOON IS FOLLOWING US #5 (of 10) (Daniel Warren Johnson / Riley Rossmo & Daniel Warren Johnson)


Brio a rameuté ses troupes pour un nouveau combat qu'il espère décisif. Mais Duncan et Samantha sont à bout de forces et sont obligés de battre en retraite à bord d'un avion qui est vite abattu. Leur ennemi gagne impitoyablement... Tandis que dans notre dimension Tash Severin, qui veille sur leurs corps endormis, se retire dans une autre pièce...


Alors, nous voici arrivés à la moitié de cette mini-série. Le mois dernier, je vous disais que celle-ci semblait quand même marquer le pas, comme souvent avec les histoires écrites par Daniel Warren Johnson, qui, à mi-chemin, entrent dans une sorte de ventre mou. Parfois l'auteur rebondit magistralement, et parfois... Non.


Qu'en est-il pour The Moon is following us ? C'est compliqué. L'épisode est en vérité coupé en deux, pas littéralement, puisqu'on est dans une séquence mouvementée, avec beaucoup, mais alors beaucoup d'action, mais aussi avec une rupture nette dans la narration qui aboutit à un coup de théâtre que je n'avais vraiment pas vu venir et qui remet une pièce dans la machine, assez efficacement.


Bon, ne craignez rien, je ne vais pas vous spoiler, même si je crains de devoir le faire au prochain numéro car, même en résumant l'épisode, même en le critiquant le plus précautionneusement du monde, ça me paraît impossible de continuer sans devoir révéler ce qui se passe dans ce numéro. C'est même tout le vrai problème ici : Daniel Warren Johnson piège le critique.
 

Je pourrais dire que ce n'est pas très sympa, mais, d'une, ce serait puéril, et de deux, c'est quand même un peu l'avantage du créateur par rapport au commentateur : il peut, il doit même, lui rendre la vie impossible pour prouver que c'est bien lui, le maître du jeu et pas celui qui l'analyse. N'empêche, c'est emmerdant parce qu'il s'est tellement bien débrouillé qu'il me bloque.

En fait, la construction de son intrigue apparaît clairement : la série va certainement compter deux actes et comme on arrive à la moitié des dix épisodes, on va entrer dans le second acte au n°6. Jusqu'ici, on avait une histoire à la fois épique et déchirante sur deux parents dont la fille ne se réveillait plus et qui, grâce à l'aide d'un vieux monsieur, accédaient à la dimension où ils pouvaient comprendre la raison de son état.

Ce n'est jamais clairement dit qu'il s'agit d'une dimension des rêves, c'est une formule que j'ai choisie pour tenter de clarifier la structure de la narration. Mais au fond, on peut appeler ça comme on veut : ce procédé est vieux comme la bande dessinée - après tout, dans Little Nemo in Slumberland, quand le petit héros dormait, il déambulait dans ce que Winsor McKay appelait "le pays du sommeil".

Bizarrement, la partie action de l'épisode tire en longueur : on a droit à une énième bataille entre les jouets de Penny, la petite fille qui ne se réveille pas, et ceux qui la retiennent, la gardent endormie. Le combat vire au carnage, les jouets se font massacrer en bonne et due forme, et les parents de Penny, qui ont consenti à donner une grosse partie de leur énergie vitale pour être encore là sont inutiles, trop à plat pour aider ou faire basculer l'issue du conflit.

Riley Rossmo fait pourtant très bien le job : ses planches ont beaucoup d'énergie, il multiplie les angles de vue, la valeur des plans, ses compositions sont très dynamiques, ses personnages expressifs, tout en conservant à l'ensemble cette étrangeté. Mais on a quand même l'impression que le récit bégaie, que c'est encore une baston perdue d'avance, bref beaucoup de pages pour pas grand-chose de neuf.

Comme d'habitude, c'est Daniel Warren Johnson qui se charge des dessins de scènes dans notre dimension. Duncan, Samantha et leur fille Penny sont endormis au creux d'un arbre géant et Tash Severin, le vieil homme qui les aide depuis le début, veille sur eux. Et puis, c'est là qu'intervient le twist...

La dynamique du récit change complètement avec ce qui se passe ensuite : la situation des héros devient encore plus compromise tout en réservant un cliffhanger très malin... Trop malin ? Trop roublard ? Un peu quand même parce que DWJ abat ses cartes un peu comme un joueur qui sait qu'il doit faire durer la partie plutôt que comme un scénariste qui devrait penser à la conclusion.

C'est cela qui me fait peur : j'ai bien l'impression que The Moon is following us s'annonce trop long. Dix épisodes, c'est beaucoup et le scénario s'essouffle depuis deux chapitres. Ce qui apparaît à la dernière page n'est pas un rebond, mais plutôt une astuce pour faire croire à un rebond. C'est ce qui s'est passé juste avant qui chamboule un peu l'affaire.

Murder Falcon, c'était 8 épisodes. Do a Powerbomb !, 7. La plus longue mini-série de Johnson, c'était The Extremity, avec 12 numéros - et je m'abstiendrai de critiquer puisque je ne l'ai pas lue. Là, je ne vois absolument pas comme il va faire pour tenir encore cinq numéros, je ne vois les idées qui pourraient justifier cinq nouveaux épisodes, sans que ça pique du nez, voire que ça se casse la figure.

Le maître de la mini en douze n°, c'est Tom King (bon, ce n'est pas le seul sur ce format, mais c'est celui, qui ces dernières années, le maîtrise le mieux). Et même lui, maintenant, écrit des mini en six, certainement pour sortir de sa zone de confort, ou aussi sûrement parce que six épisodes suffisent pour ses nouvelles histoires. Mais ça montre que c'est un format très spécial, où il faut avoir de la matière et en même temps laisser des respirations. Mais surtout de la matière.

L'histoire de The Moon is following us est touchante, et spectaculaire, Johnson et Rossmo forment un très bon duo. Mais, je le répète, ça me semble trop long pour ce qu'ils ont à raconter. J'ai trouvé que sur ces deux derniers numéros, ça tirait déjà la langue et on en n'est qu'à la moitié ! Après je peux me tromper, ça va peut-être redécoller, jusqu'à un final de qualité. Mais j'ai de gros doutes...

Je vais évidemment poursuivre, ce n'est pas non plus comme Jenny Sparks (de King et Spokes) qui m'a découragé (même si je relirai ça d'une traite, à tête reposée le moment venu). Il y a des atouts indéniables ici, j'ai quand même envie de continuer, de savoir la fin. Mais c'est sûr que, à partir de là, je vais être moins confiant, ou du moins très prudent.

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