Les enfants qu'elle a sauvés de la vente aux enchères à l'abri dans le Q.G. des X-Men, Psylocke remonte grâce à Devon la trace de Shinobi Shaw, qui devait participer à cette transaction. Il lui ouvre les portes d'un club très privé qui organise des combats entre enfants mutants et humains...
Ce deuxième épisode de Psylocke suit la même formule que le précédent : Alyssa Wong ménage à parts égales action et sentiments pour une héroïne plus habituée à l'une qu'aux autres. Mais la scénariste fait surtout l'effort, payant, de rendre Kwannon accessible, une héroïne présentable, qui transcende sa nature mutante pour se muer en protectrice.
Il me semble que, depuis la fin de l'ère Krakoa, les auteurs se divisent en deux camps : ceux qui continuent à traiter les mutants comme un problème et exploitent donc une vieille recette sur la persécution dont ils sont l'objet ; et ceux qui essaient de dépasser le fait que les mutants sont limités à cela et qui cherchent donc à s'engager dans des histoires plus super-héroïques.
A partir du moment où, sans qu'on ait daigné nous fournir une explication sur la raison qui a poussé tous les mutants à se disperser (au lieu de se chercher un nouveau refuge, une cause commune, à partager un même combat), seules deux séries creusent la question de l'après Krakoa (X-Factor, de manière sarcastique, et Exceptional X-Men, plus intimiste), partir dans une autre direction me paraît opportun.
Dans le cas de Psylocke, Alyssa Wong n'insiste pas beaucoup sur le fait qu'elle est une mutante, préférant souligner son passé d'enfant conditionné pour devenir une tueuse. Dans ce cadre, il est donc logique qu'elle s'aventure du côté de trafics d'enfants par des humains, une abomination qui la renvoie à son propre trauma.
De cette façon, la série déjoue habilement ce qu'on pouvait attendre d'elle (par exemple : des contrats exécutés par Kwannon en dehors de ses missions avec les X-Men) pour ambitionner quelque chose de plus sensible, mais sans pathos, avec de l'énergie. C'est finement joué parce que ça ne peut qu'enrichir un personnage dont il reste en définitive tout à (re)découvrir, dans la mesure où le corps de Kwannon a jusqu'à il y a peu surtout servi d'enveloppe à l'esprit de Betsy Braddock.
Il est donc question de possession, de dépossession, de liberté, d'oppression aussi mais avec un décalage malin puisque cette oppression est examinée au travers d'un personnage (Psylocke) et pas d'une communauté entière. Par ailleurs, la scénariste développe son récit comme une histoire qui emprunte à une enquête (sur l'exploitation d'enfants).
Le retour de Shinobi Shaw, fils de Sebastian (l'ex-leader du Club des Damnés), donne un supplément de piment à l'épisode, les scènes qu'il partage avec Kwannon étant traversées par une tension sexuelle évidente (mais à sens unique). Shinobi est le digne rejeton de son père, aussi arrogant, dénué de scrupules, égoïste, dominateur. Mais Kwannon a de la répartie.
Vincenzo Carratu est la grande chance de cette série, qui a bien démarré commercialement. Son trait fluide et très énergique, qui, comme je l'ai dit le mois dernier, fait penser à celui de Pepe Larraz, a certainement dû beaucoup séduire des lecteurs qui ne devaient pas être sûrs d'investir sur la durée dans ce titre.
Carratu fait la démonstration de son talent dans le découpage de scènes d'action où il décompose les acrobaties de Psylocke dont il fait effectivement une ninja redoutable, aux gestes assurés, à la souplesse imparable et à la détermination implacable. Lorsqu'il anime Shinobi Shaw, il n'a pas à accentuer ses effets : il réussit immédiatement à nous communiquer sa suffisance.
La dernière page, que je ne vais pas spoiler, indique que l'intrigue prend une dimension encore plus personnelle pour Psylocke, dont les interventions vont lui attirer des adversaires sérieux. De quoi porter les scénarios plus hauts et plus forts. Alyssa Wong a de la ressource, comme son héroïne, et tant qu'on lui laissera son dessinateur, elle peut voir loin.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire