samedi 7 septembre 2024

CRUEL UNIVERSE #2 (Stephanie Phillips & Riley Rossmo / Ben E. Winters & Leomacs / Chris Condon & Javier Fernandez / Christopher Cantwell & David Lapham)


- ORGANIC (Stephanie Phillips / Riley Rossmo) - "Nous sommes ce que nous mangeons." : à partir de cette formule, un fermier décide d'alimenter différemment son bétail pour alimenter plus correctement les consommateurs...


- BRILLIANT AND DECEIVED ! (Ben E. Winters / Leomacs) - Le Dr. Bixby vient de perdre son épouse mais il a un moyen de la ramener à la vie comme l'encourage à le faire son meilleur ami. Lequel ne fait pas ça de façon désintéressée...


- AND THE PROFIT SAID... (Chris Condon / Javier Fernandez) - On diagnostique à Eddie Sullivan une tumeur au cerveau a priori inopérable. Sauf qu'il accepte quand même l'intervention de la dernière chance. Avec des effets secondaires stupéfiants...


- RAY GUN (Christopher Cantwell / David Lapham) - Ancien champion de rodéo, Buck est désormais handicapé et sa copine vient de le larguer. C'est alors qu'il assiste au crash d'un ovni et découvre dans les décombres un pistolet laser qui pourrait bien lui permettre de prendre sa revanche...


J'avais adoré le premier numéro de Cruel Universe, revival d'un titre anthologique de E.C. Comics initié par Oni Press, petit éditeur revenu de loin mais qui a su, pour ce projet (et son autre mensuel, Epitaphs from the Abyss) attirer de grands noms des comics.

Ce nouveau recueil compte à nouveau quatre histoires courtes, et même très courte pour l'une d'elles (puisqu'elle ne fait que... 2 pages !), mais avec un résultat aussi jubilatoire. Passons ça en revue.

Le premier segment est le fruit de l'imagination de l'excellente scénariste Stephanie Phillips (à qui l'on doit actuellement Grim et Red Before Black, chez Boom ! Studios); Elle renoue ici avec le dessinateur Riley Rossmo qui avait illustré ses scripts sur la série Harley Quinn chez DC Comics.

Située dans un futur proche, le récit dénonce la malbouffe de manière très sarcastique en s'intéressant à un fermier qui a décidé de produire des aliments sans toutes les manipulations des grands groupes du secteur. Une équipe vient filmer un reportage sur ses méthodes peu orthodoxes... En dire plus serait criminel mais c'est absolument jouissif. On peut à la fois apprécier le résultat comme un pamphlet contre les multinationales mais aussi contre les partisans du tout bio que l'histoire renvoie dos à dos.

Phillips peut compter sur le style si particulier de Rossmo, avec ses personnages aux gueules étranges, pour souligner l'aspect malsain de sa nouvelle.

Dans le deuxième segment, donc, tout va très vite : en deux pages, c'est réglé ! Ben E. Winters a une idée géniale qui a d'ailleurs inspiré la couverture, sublime, de Greg Smallwood et qui est mise en images par Leomacs (à qui on doit Basketful of Heads ou Rogues, et actuellement Ghostlore).

Le savant fou est une figure archétypale des anthologies horrifiques et fantastiques et le Dr. Bixby ne déroge pas à la règle. Pourtant, tout le sel de ce bref récit tient dans son twist, savoureux et cruel, que je ne vais bien entendu pas vous dévoiler. Mais voilà deux planches rudement bien tournées.

Leomacs réussit à rendre justice à ce script fulgurant que le lettrage très old school ferait presque passer pour un inédit des années 50 retrouvé par hasard dans les archives de E.C. Comics.

Le troisième segment est plus consistant et on le doit, à l'écriture, au prolifique Chris Condon (That Texas Blood), qui est donc aussi inspiré pour Cruel Universe que pour Epitaphs from the Abyss. Là encore le scénario exploite un motif classique : celui d'un homme condamné mais qui accepte l'opération de la dernière chance sans se méfier des effets secondaires.

La progression dramatique est sensationnelle : le héros gagne puis perd tout avant de prendre une revanche spectaculaire. Javier Fernandez, qui a signé plusieurs épisodes de King Spawn et s'apprête à revenir chez DC (pour la relance de Batman & Robin), dessine cette histoire avec beaucoup d'expressivité mais sans avoir besoin de forcer le trait tellement le script de Condon est efficace.

Va-t-on vers un sans-faute ? Hé bien oui car le dernier segment recycle des éléments vus et revus avec brio. Imaginez : vous avez tout perdu - femme, argent, santé - mais vous récupérez un flingue extraterrestre. Qu'en feriez-vous ? Buck, lui, va se venger de tous ceux qui lui pourrissent la vie ou l'ont trahi. Jusqu'à ce qu'il attire un peu trop l'attention...

Christopher Cantwell (Iron Man, Briar) s'amuse comme un fou et c'est communicatif. Le dénouement est magistral. David Lapham, le créateur de la série culte Straybullets, dessine cette histoire à laquelle il donne une fausse banalité qui renforce justement son aspect délirant et méchant.

Dire qu'on sort de là ravi est en-dessous de la vérité. Je ne sais pas trop qui lira Cruel Universe, et donc cette critique, mais ne soyez pas rebutés par le côté nostalgique du projet : la qualité est au rendez-vous, et c'est ça qui compte.

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