Neutralisés par Clock King, les Titans sont branchés à une machine qui augmente les capacités de leur ennemi à lire dans leurs esprits. Il espère ainsi découvrir tous leurs secrets et réussir là où Amanda Waller a récemment échoué en éliminant tous les super-héros...
John Layman est un scénariste pressé. En deux épisodes, il a réorganisé les Titans, écartant Wally West/ Flash, réintégrant Roy Harper/Arsenal, remplaçant Nightwing par Donna Troy à la tête du groupe, et les confrontant au Clock King, un adversaire a priori facile mais qui leur a infligé une déculottée éclair.
Pourtant, plus que la rapidité de l'exécution, c'est la densité du propos qui frappe car Layman a visiblement un plan pour les Titans et leur série. Ce que Tom Taylor a péniblement développé pendant moins d'un an et demi, lui compte bien le bâtir sans laisser aux héros et au lecteur le temps de souffler.
Et pour cela il s'appuie sur les événements récents que peut connaître le lecteur sans avoir suivi le run de Taylor, c'est-à-dire ce qui s'est produit dans Absolute Power. Si les Titans n'ont pas été touchés par tout le manège autour des pouvoirs perdus/échangés/altérés à la fin du récit de Mark Waid, il n'en va pas de même pour le méchant à l'oeuvre ici et qui était au premières loges en tant que membre de la dernière Suicide Squad de Waller (sous-titrée : Dream Team).
En effet, le Clock King dont les capacités jouent sur le temps a vu ses talents dopés et c'est ainsi qu'il a pu mettre au tapis aussi facilement les Titans. Ce n'est pas Kang le conquérant, mais ça a suffi pour que les héros soit K.O. et installés à une machinerie qui permet à leur adversaire de lire dans leurs pensées et d'y instiller une peur en relation avec leurs phobies les plus profondes.
Pour cela, il va s'appuyer sur le membre le plus impétueux et qui vient juste de revenir : Roy Harper/Arsenal. Une sorte d'ancre émotionnelle qui relie tous les Titans, la clé pour pénétrer leur inconscient. Mais en se servant de l'un d'eux, il va aussi commettre une erreur et révéler son propre secret...
John Layman articule son scénario de la même manière que son méchant articule son plan : il ne s'agit pas ici de créer un suspense artificiel consistant à faire croire au lecteur que Clock King va battre les Titans et arriver à ses fins en découvrant ce qu'ils savent sur la communauté super-héroïque. Ce n'est pas un spoiler de vous révéler qu'il va être battu à son propre jeu (mais sans être capturé pour autant).
Non, en vérité, et c'est pour cela que je parlai de plan dans la démarche de Layman, Clock King est aussi une ancre, une clé pour un autre vilain qui va lui proposer une alliance afin de mettre leurs compétences en commun. C'est aussi une manière assez maline de dire que les Titans ne sont plus une bande de jeunes héros faciles à avoir, ils ont remplacé la Justice League, ils sont aguerris, on ne peut plus les sous-estimer et espérer les prendre par surprise.
Sur l'identité du vilain qui offre une alliance au Clock King, je ne dirai rien, même si je dois avouer avoir été assez perplexe en le découvrant à la toute dernière page. Layman joue une carte qui a fait ses preuves mais il lui faudra quand même expliquer comment ce vilain est de retour car la dernière fois qu'on l'a vu, il était dans un sale état. Et surtout il faudra l'exploiter de manière intelligente car c'est un ennemi familier des Titans...
Pete Woods a été critiqué par quelques fans pour son dessin trop expressif sur le précédent numéro. Personnellement, j'en étais très satisfait mais l'artiste a tenu à répondre sur BlueSky qu'il avait entendu ces remarques et comptait se reprendre. J'espère quand même qu'il conservera le style qu'il a ici car je le trouve très en forme - et pourtant j'ai souvent eu du mal avec ce qu'il a produit par le passé.
Mais il faut avouer que ses planches sont excellentes. D'abord pour leur sens du détail : non que son dessin soit hyper fourni, mais il sait découper avec un vrai brio et insérer des éléments subtils et très bien pensés - comme par exemple quand il montre les yeux du Clock King et que l'iris ressemble au cadran d'une montre avec des aiguilles : superbe.
Plusieurs pages sont consacrées à la fouille qu'effectue le Clock King dans les hantises des Titans et le fan peut ainsi passer en revue des moments forts de toute l'histoire de l'équipe, avec des moments devenus des classiques (la saga de Trigon) ou des épisodes plus récents (Beast World). On voit en tout cas que Woods comme Layman connaissent leur sujet et savent le mettre en scène.
C'est dynamique, inventif, et, mis à part donc l'identité du méchant à la fin, qui peut paraître un peu paresseuse dans son choix, la série confirme son gros potentiel avec cette équipe créative. En attendant le premier épisode de Justice League Unlimited la semaine prochaine, on peut compter sur Titans comme un de ses très bons team books de l'ère DC All-In.